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Full text of "Le Compendil pour la douleur et maladie des yeulx qui a esté ordonné"

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LE COMPENDIL 



POUR 



LA DOULEUR ET MALADIE DES YEULX 



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TRAVAUX DU D' PANSIER 



Les Manifestations oculaires de l'hystérie. Paris, Âlcan, 1892, io-S*", 
avec planches on couleur. 

Traité de l'œil artificiel. PariF, Maloine, 1895, in-18, avec fl(^uresdans 
le texte. 

Traité d'électrothérapie oculaire. Paris, Maloine, 1805, avec figures 
dans le texte. 



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LE GOMPENDIL. 

POUR LA 






ï 




QUI A ESTÉ ORDONNÉ 



i»^R BIEN VENU GRi^FFE 

MAISTRB P.T DOOIEIR EN MÉDECINE ""' 

Edition fraw^aise d'apri'$ le manuscrit de la hihliothèque nationale de 

Paris (XV^ t^iècle) 

REVUE Eï COLLATJOxNNÉE 

PAU 

LE D' P. PANSIER ht CIL LABORDE 

D'AVIGNON DE MONTPELLIER 

Suivie de la cersion provençale d'après le manuscrit de Bàle {XIII' siècle), 
qvec îs? planches en phototypte. 

ÉDITÉE PAR 

Henri TEULIÉ 



PARIS 

A. MALOLNE. ÉDITEUR 

21, l'LACE DE I.'ÉOOLE DE MÉDECINE, 21 

1901 



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LE COMPENDIL 

POUR 

LA DOULEUR ET MALADIE DES YEULX 

Qui a esté ordonné par BIENVENU GRAFFE, Maislre et Doclear en Médecine 

INTRODUCTION 

I. 

Le nom de Bienvenu de Jérusalem semble allaché aujourd'hui 
à celui d'Alberlolll ; c'est en effet grâce au professeur d'oplilal- 
mologie de Modéne que les œuvres de ce vieil oculiste sont 
sorties de l'oubli. Avant les recherches d'Âlbertotti, Bienvenu 
était peu connu; les dictionnaires en faisaient une courte mention. 
Daremberg le citait en note dans son histoire de la médecine, et 
Hirsch', dans son histoire deTophlalmologie, en parlait fort peu. 
Et cependant, le traité De oculis eorumque œgritudinibus^ de Ben- 
venutus Grassus Hierosolimitanus^ fut, au moyen âge, le véritable 
code de l'oculistique. 

L'œuvre de Bienvenu nous est parvenue par l'incunable, publié 
à Ferrure en 1494 ', dont Albertotti a donné une réédition en 

* Hirsch ; Geschichie der Augen Heiikande* Leipzig, 1877, pag. 294. 

^ il exisleroil d'autres éditions de ce traité. 

Beavenuti Graphei, de Jérusalem ; Ars probala de oculorum affectihus. Veae- 
tiis, per Octavium Scatuoi. 1497. 

Grassi Beaveouti ; De oculis eorumque xgriludinibus et curis. Veaetiis. 1500. 

Benvenutus Grapheus, de Jérusalem ; Ars probala de ^egriludinibus oculorum, 
Venetiis. 1549. 



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— 6 — 

1897, el aussi par de nombreux manuscrils qui alleslenl Tim- 
porlance qu'elle a eue en son lemps. En 1884 cl 1887, Berger et 
Auracher onl publié trois de ces manuscrils : les manuscrits 
latins des bibliothèques de Monaco el de Bre^lau, et le manuscrit 
provençal de la bibliothèque de Bâle. 

Alberlolli, avec un soin scrupuleux, a recherché les différenls 
manuscrits qui exislenl dans les bibliothèques ; il a même pu 
acquérircelui de la bibliothèque Boncompagni de Rome, qui vient 
d'être malheureusement dispersée par une \ente aux enchères ; 
il a publié les plus importants de ces textes. 

De la comparaison de ces difFérenls manuscrils, on retire l'im- 
pression qu'ils procèdent lous du même enseignement ; ils se 
ressemblent, à la manière d'une même leçon d*un maître recueillie 
en diverses langues par difFérents de ses élèves : semblables 
quant au fond, ils ne diffèrent que par les détails ou par le plus 
ou moins de longueur du texte. La plupart sont en langue latine» 
mais cous en avons un en lungue provençale, datant du xiii* siècle, 
un en langue française, et nous en voyons citer un autre en 
langue hébraïque. 

Ces manuscrits sont moins complets que Tincunable de Ferrare, 
qui semble, dit Albertolti, être une collalion postérieure de 
différents manuscrils faite par un praticien de cette époque. A 
moins qu'il ne soit la reproduction d'un texte plus complet, 
aujourd'hui perdu. 

L'édition que nous donnons de l'œuvre de Bienvenu de Jéru- 
salem est la reproduction du manuscrit français de la bibliothèque 
nationale do Paris. Ce manuscrit, du xv© siècle, catalogué n** 1327 
du fonds français, comprend 129 feuillets de 21 cenL sur 29 ; 
d'une belle écriture gothique avec en-létes rouges ou verts, il 
conlient les traités suivants : 

1. Gompillation faicte par Maistre Bernard de Gourdon, doc* 
teur en médecine, et par luy compillé en la noble université de 
Montpellier, l'an mil trois cents, au mois de juinct ainsy comme 
cy après s'ensuit. 



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— 7 — 

2. Cy après sensuit le Compendil qui a esté ordonné par Bien- 
venu Ra/jfe, maistre et docteur en médecine, qui a esté composé et 
compilé et ordonné à Montpellier pour la douleur et maladie des 
yeux sur ceste forme (Du recto du folio 38, au verso du folio 60). 

3. Cy après sensu} t le voulum du régime des dames ^ pour leur 
aydier en leur maladies et adversitez tant de la concepcion comme 
de V enfantement et aultrement, 

4. Cy après sensuit lesvertuz et propriétèz de l'eau de vie corne 
il est cy des&oubz desclairé et premièrement. 

5. Cy après sensuit les verttts et propriétez de aurum potabile 
et la manière comment on le fait. 

6. Médecine ordonnée contre l'épidémie laquelle a esté envoyée 
par nostre saint Père le pape au Roy iiostre seigneur^ qui est une 
manière de beuvraige par deffault duquel plusieurs sont aies delà 
vie à trespas, lesquels se Hz en eussent user feussent restaurez do 
mort à vie ou ne leur feust point venue ladicte maladie. 

Après avoir copié le lexle manuscrit, avec les fautes iahéreales 
au copiste, nous PavoQs collatioané pour les passages obscurs, 
soit avec les manuscrits publiés par Alberlotti et AulTacher, soit 
avec l'incunable de Ferrare. En passant, nous avons corrigé ce 
qu'on appellerait aujourd'hui les fautes d'impression du copiste. 

Tout en conservant l'ordonnance et la division en chapitres du 
manuscrit, nous avons ajouté, pour en rendre la lecture plus 
facile, les sous-titres et les divisions qui nous ont paru nécessaires ; 
ces additions sont, d'ailleurs, toujours prises dans le texte original. 

Mais, à part le manuscrit provençal, le manuscrit français est 
le plus court de tous: Il ne contient rien de ce qui concerne 
les traumatismes, la Qstule lacrymale, Torigine des larmes. Aussi, 
désiiant donner de Tœuvre de Bienvenu une édition française 
complète, avons-nous ajouté au manuscrit de Paris la traduction 
do toute cette dernière partie. Cette traduction n'a pas la préten- 
tion d'être une imitation de la vieille langue française ; nous avons 



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- 8 — 

seulemenl voulu faire une Iraductioo des plus juxlaliuéaires, 
employant, autant que possible, les expressions et les mots déjà 
employés dans les précédents chapitres. Nous avons aussi puisé dans 
Guy de Ghauliac^ qui cite souvent le traité de Bienvenu. Gomme 
texte, nous avons suivi le texte latin de 1 ^incunable de Ferrare, 
publié par Albertotti. Si notre langage est un peu archaïque, 
c'est donc que cet archaïsme se prête plus facilement à la traduc- 
tion exacte de ce latin barbare. 

Nous avons jugé inutile de mettre le texte latin en regard de 
la traduction, la réédition de l'incunable permettant de le consulter 
aujourd'hui dans toutes les bibliothèques. 

A défaut des manuscrits, on compulsera avec un vif intérêt les 
différentes publications d* Albertotti^, donnant la reproduction 
diplomatique du texte français et de deux textes latins^ ainsi que 
des reproductions photographiques de chaque manuscrit. 

En terminant cette partie de notre introduction, nous avons le 
devoir de remercier M. Teulié, le savant bibliothécaire de la 
Faculté de médecine de Montpellier, pour Tobligeance avec 
laquelle il a mis à notre disposition sa connaissance approfondie 
de la bibliographie et des langues romanes. G'est à lui que nous 
devons la publication du texte provençal que nous donnons à la 
fin de notre ouvrage, et qui est intéressant à plus d'un titre pour 
notre université méridionale. Ge texte n'est pas la copie directe 
du manuscrit de Bâle, que nous n'avons pu avoir en commun!- 

* La grande Chirurgie , de Guy de Gbauliac, revue et augmentée par Nicaise. 
Paris, Alcaa, 1890. 

^ AlbertoUi; Benvenute Grossi Hyerosolimitani,.. De oculis eorumque egrilU' 
dinibus. Incunablo Ferrarese dell anno 1474, Con noiizct Bihliografiche. Pavia. 

1897, in-SV 

Considerazioni inlorna à Benvenuio, ed alla sua opéra oftahnocatrica. Pavia. 

1898, ia-8*. 

L'opéra ofialmocalrica de Benvenuio nei codicinegliincunabilienelleedizione 
moderne, Modena, ia-i». i897. 

/ Codici Riccardiano, Parigino, ed Ashburnhamiano del l'opéra ofialmoca- 
lrica de Benvenuio. Modeua, ia-4o. 1897. 



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— 9 — 

cation : c'est la reproduction du texte publié par MM. Berger et 
Auracher, mis au net et corrigé par M. Teulié, à qui revient 
rhonneur de cette partie de noire travail. 

Nous allons maintenant esquisser une courte étude de la vie et 
de l'œuvre de Bienvenu. 

II. 

Le nom même de Benevenutus Grapheus de Jérusalem peut 
prêter à de longues discussions. En effet, probablement par suite 
des erreurs des copistes , nous trouvons ce nom ortho- 
graphié de différentes façons: Grassus, Crassus, Grapheus, 
Griphus, Cripbus, Graffeus; le manuscrit français, en titre et à 
l'explicit, rappelle Raffe; dans le cours de l'ouvrage, il est nommé 
une fois Grasse et une fois Graffe. C'est ce nom que nous avons 
adopté, comme se rapprochant le mieux des dénominations des 
divers manuscrits. 

Mais, d'autre part, les auteurs postérieurs qui le citent, tel Guy 
de Chauliac, l'appellent simplement Benvenutus ou Bienvenu. Le 
manuscrit provençal l'appelle seulement Benvengut De Salem. 
Aussi nous rangeons-nous à l'opinion d'Albertotti, qui pense 
qu'on devrait l'appeler du seul nom qui ne varie pas dans les 
différents textes: Benevenutus Hierosolimitanus ou Bienvenu de 
Jérusalem • 

Il est plus difficile de déterminer, avec quelque exactitude, 
l'époque à laquelle il a vécu. Tous les renseignements qui con- 
cernent sa vie ne peuvent être tirés que de son œuvre. 

La nouvelle biographie générale de Firmin Didot nous donne 
sur Grassus la notice suivante : 

Grapheus ou Grassus, médecin italien, appartenait à Técole 
de Salerne; il vivait au xii" siècle. Ua laissé deux ouvrages en 
latin barbare : 

Arsprobaia de ooulorum aff'ectibus; Turin 1492, in-4'* ; Venise 
1497, in-folio. 



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— 10 — 

Tractatus de oculis ecyi'umqueoegriivdinibus et curis] Ferrare 
1474, in.4\ 

Kestner \ Medicinische Gelehrlrn-I.exikon, p. 358. 

D'après Malgaigne^, Bienvenu aurait vécu entre Bernard de 
^ Gordon et Guy de Chauliac. Voici sur quoi il repose son dire : 

Le manuscrit de Paris porte que le corrpcndil a été composé et 

ordonné à Montpellier. SMl a été compusé à Montpellier, c'est entre 

Bernard de Gordon, qui ne le connaît pas, et Guy deChauliac, qui le 

cite. Bienvenu serait postérieur à Bernard de Gordon, et antérieur 

I à Guy de Chauliac: il aurait donc vécu entre 130Ô et 1363. 

Cette thèse n'est pas invraisemblable ; mais par un raisonne- 
ment analogue, de ce que Bienvenu ne cile ni Alkoalim (xii® 
siècle), ni Canamosali (xi® siècle), ni Jésus Hali (x* siècle), ne 
pourrait-on conclure qu'il a vécu avant eux? Alkoatim, Canamo- 
sali, Jésus Hali surtout, étaient cependant des médecins arabes 
fort en honneur, qui se sont spécialement, eux aussi, occupés des 
affections oculaires, et qui ont laissé là-dessus des traités qui nous 
sont parvenus; il paraît étonnant que Bienvenu les ait ignorés, 
puisqu'il vivait à cette époque où la médecine méritait surtout la 
qualification d'arabiste. 

L'auteur le plus récent que cite Bienvenu est lohannitius, ou 
Honein Ben Ishac, qui mourut en 873 ; d'autre part, Guy de 
Chauliac est le premier auteur qui fasse mention de Bienvenu. 
Il a donc certainement vécu entre le ix« et le xiv* siècle. 

Dans le manuscrit provençal, il est appelé, nous Tavons vu, 
Benvengut de Salem ; dans les différents textes il cite fréquem- 
ment les médecins de Salerne, il parait donc admissible qu'il ait 
étudié à Técole de Salerne. Cette école est très ancienne, puisque, 
d'après Daremberg, on citerait des médecins salernilains en 846, 

• Le Lexicon de Kesiner (Dictionnaire des Médecins) a paru à léna, 1740, 
ia-W. Il passe i>our conlenir i as mal «l'crrours bio et bibliographiques. 

Quant aux deux ouvrages de Bienvenu qu'il a signalés, ce seraiebt siroplemeot 
les éditions dilTt'renles du traité que nous possédons. 

* Malgaigue ; préface à léJilion des CiLUvres d'A. Paré. 



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— 11 — 

el que les textes relatifs à son enseignement remontent au x". 
siècle. A partir du xii* siècle, elle décline, no produit plus; elle 
persiste seulement. Officiellement, elle n'a disparu que le 29 no- 
vembre 1811 *. 

Ces dates concordent, mais ne nous flxent pas d'une façon plus 
précise. 

D.ins l'incunable de Ferrare, Bienvenu parlant des humeurs 
des yeux, dit : ahumor vilreus, et chrislallinus a gummositate 
cerebri nulriuntur secundum magistrum Nicolaum r> , Ceci pourra 
nous Gxer plus exactement, car ce Nicolaus serait Nicolas ou 
Niceolo, dit Prsepositus, qui enseignait à Técole de Salerne, dont 
il devint praepositus, c'est-à-dire doyen au commencement du 
XII* siècle. On peut donc supposer avec vraisemblance que Graffe 
a vécuauxii** siècle, comme l'indique Keslner. 

11 était de Jérusalem, il nous le dit fréquemment; de plu», il 
appelle volontiers ses collyres, ses électuaires, ses poudres, hiero- 
soHmitanes, d'après le nom de sa patrie. Mais faut-il en conclure 
avec Dareroberg qu'il était juif ? 

Au moyen âge, la médecine était fréquemment exercée par 
des rabbins juifs. Dans le midi en particulier, les juifs, fuyant 
l'Espagne, où Arabes et Espagnols les persécutaient avec un égal 
enthousiasme, inondèrent le Languedoc. Connaissant la langue 
arabe, ils contribuèrent par leurs traductions, hébraïques d'abord, 
latines ensuite, à vulgariser les ouvrages des médecins arabes. La 
ville deLunel, en particulier, paiait avoir été vers cette époque 
une pépinière de rabbins et traducteurs médecins^. 

Dans la suite, comme c'est le propre de leur race, ils devinrent 
tellement envaliissants, qu'ils nécessitèrent une intervention des 
pouvoirs publics. C'est ainsi que par une ordonnanjce du 27 

* Nicaise j loc. cit. 

2 II y avait à Luael et dans les eaviroDS de véritables écoles, où les «Hudiaol» 
juirs recevaient non seulement l'enseignement, mais les vêlements et b uoiiiri* 
lure. (I>aval ; Histoire de la Faculté do Médecine d' Avignon, tom. I, Parib, UjcIi«t- 
valier, 1889). 



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— 12 — 

décembre 1362, le roi Jean Ql défense aux juifs d'exercer la 
médecine et la chirurgie dans le royaume. En 1338, le concile 
d'Aîx avait interdit aux chrétiens d'avoir recours aux médecins 
de race hébraïque; le concile de Trente renouvela cette défense, 
et non seulement interdit aux chrétiens d'avoir recours aux soins 
des médecins juifs, mais leur défendit même de se servir de 
médicaments préparés par eux. L'ordonnance de Ferdinand I, 
roi d'Aragon, disant : t qu'aucun juif, mâle ou femelle, ne pourra 
exercer la médecine ni la chirurgie à l'égard des chrétiens », nous 
montre en quelle estime se maintenait la race maudite. 

Mais ^06 ces ordonnances étaient peu ou mal appliquées, mémo 
et surtout dans les villes reconnaissant l'autorité des papes, qui 
furent toujours pour les juifs plus cléments que les puissants de 
la terre. C'est ainsi que nous voyons Alphonse de Poitiers, ma- 
lade à Avignon, mander d'Espagne un ophtalmologiste juif célè- 
bre. Jeanne de Navarre confie les soins de sa santé à un médecin 
juif. Benoit XIII a pour médecin un juif converti, Josué Halor- 
que. En 1358, trois médecins et deux chirurgiens juifs figurent 
dans le serment prêté au pape Innocent VI. En 1441, Durand, 
medicus judaeus, est médecin des frères prêcheurs et fermier des 
revenus de la chambre apostolique V En 1529, on nomma même 
un physicien juif, Emmanuel de Lattes, à une chaire de l'Uni- 
versité d'Avignon^. 

Les médecins juifs ne se contentaient d'ailleurs pas de donner 
à leurs clients les soins médicaux ; ils avaient généralement plu- 
sieurs cordes à leur arc. Nous venons de voir que Durand était 
non seulement médecin, mais fermier de la chambre apostolique; 
d'autres de ses confrères étaient aussi marchands et banquiers, 
et vendaient à leurs malades des étoffes, des bijoux, ou leur 
prêtaient à gages. En 1377, le chirurgien juif d'Avignon, Bellaut 
de Stella, reconnaît avoir reçu trois pièces de robe, un corset et 

1 Laval ; Histoire de la Faculté de médecine d'Avignon, loc, cit. 

2 G. Bayle ; Les médecins d'Avignon au Moyen Age, AvigQon, Seguia, 1882. 



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— 13 — 

deux tuniques que Jeauue de Mouteolivo, d'Arles, lui avait don- 
nés en gage pour un prêt, à elle fait pendant sa maladie ^ 

Mais nous ne pouvons cependant admettre que Bienvenu appar- 
tenait à la race juive: en effet, parlant delà cataracte, il dit qu'on 
doit la tenir abaissée avec l'aiguille le temps de réciter quatre fois 
le Pater Noster, et puis par dessus Tœil on fera le signe de la 
croix. Le quatrième chapitre commence par ces mots : Ou nom de 
notre seigneur et rédempteur Jésus-Christ. Le septième chapitre 
commence : Ou nom de Dieu et de la glorieuse trinité ; toutes 
expressions que nous ne trouverions pas dans la bouche d'un juif. 
1^ Il est donc à peu près certain que Bienvenu était un oculiste 
chrétien du xii* siècle. 



III. 



Quelques mots maintenant sur les spécialistes de l'époque ; 
mais auparavant, rendons-nous compte de la condition qui était 
faite aux médecins. 

On les distinguait on physiciens et en chirurgiens: les physiciens, 
les méges dans le midi, étaient les médecins. Pétrarque mot ces 
derniers bien au-dessous de leurs confrères : «Que dirai-je de 
vos remèdes? que sur mille il n'y en a pas un qui réussisse ! 
Beaucoup opèrent et souvent tuent les malades. Je parle des 
médecins qui se glorifient de porter le nom de physiciens, et qui 
regardent avec mépris ceux qu'on appelle chirurgiens, et auxquels 
ils abandonnent les opérations malpropres. Cependant, plus d'une 
fois sur moi et sur d'autres, j'ai constaté les excellents effets des 
remèdes de ces derniers pralicieos, et j'ai vu leurs procédés guérir 
de graves blessures et de fétides ulcères. Les chirurgiens voyent 
ce qu'ils font, tandis (]ue vos physiciens agissent toujours en 
aveugles.!) Cet antagonisme entre les médecins et les chirurgiens 
a, d'ailleurs, duré des siècles. 

Parmi les chirurgiens, on distinguait les chirurgiens en robe 



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— 14 — 

longue ou maîtres en chirurgie, et les chirurgiens barbiers. Les 
preoQiers avaient étudié la nnédecine et avaient pour insigne une 
boite; ieî> seconds étaient de simples praticiens, ils avaient pour 
insigne une lancette'. 

C'est qu'en effet pendant longtemps les Facultés ne délivrèrent 
pas de grade en chirurgie : a les chirurgiens étaient des clers 
maîtres en médecine, d'autres étaient des laïcs sans titres ou des 
juifs ayant étudié dans les arabes» . Ils ne devaient pas toujours 
avoir la première qualité que Guy de Ghauliac demande au 
chirurgien : être lettré. 

Au moyen âge, à part les troubadours et les clercs, peu de gens 
entendaient la langue des savants, le latin. Aussi Thistoire nous 
a-t-elle conservé, comme une chose extraordinaire, le nom d'un 
marquis de Montferrand qui avait une bibliothèque et lisait le 
latin. Ce Montferrand mourut centenaire en 1230. 

Quant aux clercs, leur instruction était parfois fort négligée, 
puisque nous voyons en 1293 un évêque d'Angers^, considérant 
que tous les prêtres sont illettrés, illiteraii^ déclarer qu'il 
n'ordonnera plus personne à moins qu'il n'ait quelque teinture de 
grammaire. 

Ajoutez à cela que les livres étaient rares et .chers, et que 
presque seuls les monastères possédaient des bibliothèques'? 
Celles-ci, quoi qu'en dise Daremberg, étaient généralement fort 
soignées; les livres étaient considérés comme dos objets de prix 
qui figuraient dans les testaments et les actes publics ; et l'ar- 
marins, bibliothéquaire du couvent ou de l'église, s'engageait 
par serment à bien conserveries ouvrages confiés à sa garde, à 
ne point les vendre, les engager, ni les prêter. 

Aussi ne sommes-nous point étonnés de voir qu'à cette époque 
la plupart des médecins étaient des clercs parfois engagés dans 
les ordres: il y eut même un pape médecin, Jean XXI, qui avait 

* Bayle ; loc. cil. 

^ Histoire Uitéraire de la France, par le Bénédictin do Saint-Maur, lora. XVI. 
3 Cependant les premières bibliothèques publiques auraient été fondées par 
Saint-Louis. 



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— 15 — 

étudié la aiédecine à Montpellier*, et qui écrivit un ouvrage 
qui nous est parvenu : le manuel des pauvres ou l'art de guérir. 
Les médecins étaient tenus au célibat, mais cette règle n'était pas 
rigoureuse ; elle a cependant persisté longtemps, et ce serait le 
cardinal dTstourville en i452 qui l'aurait abolie. 

En vérité, la condition des médecins n'était pas faite pour 
assurer les progrés de la science : en médecine, la scholaslique 
réduisant toute la science à des commentaires stériles, aboutit à 
son arrêt complet, a Ce serait, ditHirsch^ un travail pénible 
que de vouloir soumettre à uco critique judicieuse les énormes 
in-folio qu'a produits cotte période, et cela n'aboutirait qu'à la 
constatation de la stérilité et de la ruine de cette science 7>. Une 
voix isolée avait cependant essayé de réagir : le moine Roger 
Bacon, avec sa grande et trop méconnue intelligence, s'était 
rendu compte de toute l'inanité de cette méthode et de son 
influence néfaste: «On commente Aristote, délaissant le point 
de départ de toute srience qui est l'observation, dit-il. Si j'en 
avais le pouvoir, je ferais brûler tous les livres d'Âristote, car les 
étudier, c'est perdre son temps, et ils m) servent qu'à propager 
l'erreur et l'ignorance ^). Ce langage révolutionnaire n'eut pas 
d'écho, et en médecine on continua à ergoter en d'oiseux com- 
mentaires sur Galien et les arabes. 

Pour la chirurgie, il fallut concilier la maxime de l'Eglise 
Ecclesia abhorre t a sanguine, avec les nécessités de la pratique. 
Le concile de Latran interdisant, en 1215^ les opérations de chi- 
rurgie aux prêtres, diacres et sous-diacres, la chirurgie fut reléguée 
entre les mains des clercs, c'esl-à-dire des moins instruits. 

» Pierre, fils de Julien, avait étudié à Paris et pris ses grades dans presque 
toutes les Universités ; il remplit à Rome les fonctions de premier médecin, 
archialro, de Grégoire X, qui le lit cardinal deFrascati. Il fut élu pape en 1276, 
et mourut d'un accident un an après. 

2 llirsch ; loc, cil, 

•* t Si haberem poteslatem super libras Aristotelis, ego facerem omnes cremari, 
quia non est nisi temporos a missio studere in illis, et causa erroris, et multipli- 
caiio ignorautiae. Opus Majus ». 



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— 16 — 

Une autre entrave plus sérieuse aux progrès de la chirurgie, 
c'était la brièveté des études d'anatooiie : les médecius romaios 
du i'" siècle, et Celse les en blâme *, vivisectaieot leurs esclaves 
ou des condamnés, sans aucun profil d'ailleurs pour la science ; 
au moyen âge, on tomba dans Texcès opposé. A Salerne, l'aoa- 
tomie est démontrée une fois par an sur des cochons, à défaut de 
singes. Boniface VIII, vers 1296, menace d'anathème quiconque 
fera bouillir des cadavres pour en faire des squelettes. 

On ne commence à disséquer, à Montpellier^ qu'au xiv* siècle; 
les statuts de 1340 disent qu'on fera Tanatomie tous les deux ans, 
et, en 1376, les médecins obtiennent du duc d'Anjou que les 
magistrats de la ville livrent, une fois l'an, le cadavre d'un cri- 
minel pour faire des démonstrations analomiques. Cent ans plus 
tard, à Paris, on disséquait de trois à cinq fois par an: c'était 
une fête qui durait sept jours; elle durait quatre jours à 
Bologne. 

Ajoutez à cela quMl n'y avait pas d'enseignement de la chirur- 
gie : à Paris, on faisait bien un cours aux barbiers, mais les 
règlements obligeaient à faire les cours en latin, qu'ils ne com- 
prenaient pas ; le maître en était réduit à leur lire Guy de Chau- 
liac, qu'il commentait ensuite en français ; c'est ce qui nous valut 
la première .traduction française de l'œuvre de Guy. Aussi Bou- 
lay ^ avoue-t-il qu'en 1506, à Paris, il y avait une telle pénurie 
de chirurgiens, qu'on en aurait à peine trouvé trois ou quatre qui 
puissent prétendre au grade de maître en chirurgie. 

L'étude de la médecine, au moyen âge, était plus répandue 

* Ils (ceux qui professeat la médeciae rationnelle) estimenl qu'Hérophile et 
Erasistrate ont été on ne peut mieux inspirés, en ouvrant tout vivants les crimi- 
nels et examinant, pendant qu'ils respiraient encore, la disposition des 

organes. 

Ce qui me reste à dire est cruel, à savoir : d*ouvrir le ventre et la poitrine 

à des personnes vivantes, et de transformer ainsi Tart de conserver la santé en un 
fléau des plus horribles. Celse» édilion de Vedrenes, Massoo, 1876, pag. 27 et 31. 

^ Boulay vel Bulaeus ; Hisloria universilatis parisiensis^ tom. VI, pag. 36, 
Parisiis, 1665. 



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— 17 — 

qu'aujourd'hui, parce que tout leliré, saus poui cela se destiner 
à celte profession, faisait de la médecine savante. 

Tel Roger Bacon, qui, dans sa perspective, nous donne Tana- 
tomie de l'œil, d'après ses recherches personnelles: il a disséqué 
des yeux et des tètes do bœuf, et a constaté, chez ces grands 
mammifères, Tenlrecroisement complet des nerfs optiques, décou- 
verte qu'il croit applicable à l'homme * . A cette époque, tout 
savant était médecin ; mais la réciproque était très rarement vraie. 

Notons également qu'au moyen âge, surtout en Italie, les 
femmes exerçaient la médecine, et fort stupidement, dit Guy de 
Chauliac. Avicenne cite même uue femme qui cultivait Toculis- 
tique. Quand les femmes perdirent le titre de médecin, elles n'en 
conservèrent pas moins les fonctioos etThabitude de pratiquer. 
Les matrones grossirent le nombre des empiriques. 

A ce sujet, Bienvenu nous raconte que les femmes sarrazines 
traitaient les granulations en renversant la paupière supérieure, et 
en la frictionnant avec une feuille de ûguier jusqu'à ce qu'elle 
devint sanguinolente. 

La pratique de la médecine par les femmes se perpétua, et 
Branthome dut la conservation de sa vue à semblable empirique ; 
il raconte, en efifet, que, blessé à Portoflno, près de Gènes, d'un 
accident d'arquebusade au visage, qui le rendit aveugle durant 
6 jours, il fut guéri promptement et gracieusement par une belle 
génoise qui celui jetait dans les yeux du laict de ses beaux et blancs 
tetins, car elle n'avait que 30 ans, et de ses blanches mains lui 
oignait le visage de quelque graisse composée par elleD. 

Ce qui parait certain, c'est que, jusque vers la Qn du xiii* siècle, 
exerçait et enseignait la médecine à peu près qui voulait. Ainsi, 
Guilbem VIII, seigneur de Montpellier, dans une déclaration de 
janvier 1180, autorise le premier venu à enseigner la médecine 
dans sa ville seigneuriale, avec pleine et entière latitude. 

> I Le nerf qui naii à droite va à gauche el le nerf qui natt à gauche va à 
l'œil droit 1. Perspectiva, disiinclio II, caput primum : de origine nervorum 
qui ad oculum e^iguuntur. 



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— 18 — 

Gel enseigoemenl libre paraît êlre à ce moment la consécration 
momentanée des mœurs des siècles précédents, où toute la science 
s'était réfugiée dans les monastères, «et où les prêtres avaient 
concentré de nouveau entre leurs mains l'exercice exclusif de la 
médecine (Lival, loc cit.) ». Dans les monastères existaient, dès 
le vil' siècle, des écoles où l'on enseignait les sept arts libéraux et 
la médecine. 

Mais, à mesure que renseignement s'étendit un peu, ce libre 
exercice produisit des abus inévitables, et bientôt apparurent les 
réglementations des pouvoirs publics tendant à les réprimer. 

Nous trouvons alors : en 1297, une lettre de Charles d'Anjou 
mandant aux sénéchaux de Provence que les médecins ne puis- 
sent pratiquer saus être au préalable examinés par le conseil et la 
cour royale. 

Philippe IV, par lettres de novembre 1311, «fait défense 
d'exercer Part de la chirurgie dans Paris, si ce n'est après exa- 
men fait par les maîtres chirurgiens jurés qui seront nommés par 
le chirurgien juré du roy au Ghastelet » . 

Jean P", par ordonnance de décembre 1352 a faicle à la suppli- 
cation du doyen et de la Faculté de médecine, défend ili toutes per- 
sonnes d'exercer la médecine à Paris, à moins qu'il ne soit doc- 
teur ou licencié à Paris ou ailleurs » . 

En 1397, à Paris, le 13 octobre, lettres de Charles VI «par 
lesquelles il est défendu à toutes personnes non graduées eu 
médecine, de l'exercer dans la ville ou le faubourg de Nismes, 
nonobstant toutes lettres subreptrices qui seraient contraires d. 

Ainsi que le montre l'ordonnance de Philippe IV, après l'insti- 
tution des universités où l'on n'enseignait pas la chirurgie, il y 
avait cependant des jurys spéciaux pour examiner ceux qui vou- 
laient la pratiquer. 

A côté des médecins et des chirurgiens, il y avait une troisième 
catégorie de praticiens dont Guy de Chauliac déplore l'existence : 
les spécialistes, les medicatores aurium, dentium, oculorum, etc. 

La spécialisation existait au moyen âge comme aujourd'hui, 



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— 19 — 

mais, géûéralement nomades, les spécialistes allaient de contrée 
en contrée, offrant le secours de leur art. L'honnêteté ne parais- 
sait pas être leur vertu dominante. Guy de Chauliac les honnit, 
et les appelle des «coureurs». Il s*élève contre l'habitude qu'ont 
les chirurgiens de leur laisser les opérations des yeux, des dents, 
des hernies, des hydropisies, delà pierre. 

Il avait peut-être raison, surtout en ce que la plupart de ces 
spécialistes ambulants étaient non seulement dépourvus de 
tout grade universitaire, ce qui n*eùtpasélé un grand mal, mais 
encore de toute notion médicale : les charlatans ont pullulé et 
prospéré de tout temps, et le moyen âge, avec sa facile et naïve 
crédulité, devait être une époque singulièrement favorable à leurs 
exploits. 

Les oc'jlistes, comme les autres spécialistes, allaient eux aussi 
de ville en ville : quand leurs cures ne réussissaient pas, ou qu'ils 
avaient volé leurs malades d'une façon trop manifeste, ils échap- 
paient par la fuite à la vindicte publique. Car leur situation, près 
des grands surtout, n'était pas exempte de dangers : témoin ce 
médecin français que le roi Jean de Bohème fit coudre dans un 
sac et jeter dans TOder, ainsi qu'il le lui avait promis, parce qu'il 
n'avait pu le guérir de sa cécité. C'est pour ce même roi que Guy 
de Chauliac avait écrit son régime de la cataracte, aujourd'hui 
perdu. 

Gomme Guy de Chauliac, Bienvenu se plaint de l'ignorance de 
ses confrères en oculistique : « Est iceluy art et médecine es mains 
7> de médecins ignorants et non saichants, qui seentre-mêlentdu 
» dit art sans cognoissance des dictes maladies des yeulx. Pour- 
2> quoy ils estoient cause àegaster les yeulx de tous pacients eo 
» quoy ils faisoyent opéracion » . 

Au point de vue chirurgical, la plupart des oculistes se bor- 
naient à l'opération do la cataracte par abaissement, et à l'opéra- 
tion de la fistule lacrymale (lisez dacryocystite suppurée), qu'ils 
traitaient, ainsi que nous l'apprend Bienvenu, en perforant les 
chairs et l'os avec un fer rouge jusqu'à arriver dans le nez: 



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^ 



— 20 — 

inventé par les Arabes, ce procédé fui plus lard remis en hon- 
neur par Woolhouse. 

C'était surtout la médecine ou plutôt la pharmacie qui devait 
être pour eux une source de bénéâces : ils avaieut leurs poudres, 
leurs collyres, leurs électuaires, leurs pilules, qui étaient plus 
ou moins chers et variaient selon les clients. C'est ainsi que 
Bienvenu, après nous avoir indiqué les poudres faites de pierres 
précieuses pour le trailement des nubecula et des pannicules, 
nous dit de les employer quand nous aurons à traiter nobles 
hommes; pour les vilains, les poudres de gommes seront suffi- 
santes et plus à la portée de leurs bourses. 

Marcel, Tempirique médecin ou pharmacope bordelais du iv* 

; siècle, nous donnant certaines formules pour les maux d'yeux, 

raconte qu'il a eu beaucoup de peine à les obtenir, leurs auteurs 

ne voulant pas se dessaisir du secret de leurs préparations. Au 

moyen âge, cette coutume persistait encore. Bienvenu cependant 

ne peut être, à cet égard, Tobjet de nos reproches : comme les 

autres, il a ses collyres, ses pilules hiérosolimitanes, mais il en 

donne généreusement les formules. 

\ Toutefois, il n'a pas été toujours aussi prodigue de ses secrets : 

j a Très certainement, nous dit-il, il a plu à Dieu que jeicompose 

! ce hvre ; aussi, je ne veux plus vous cacher la composition des 

remèdes que j'avais tenus secrets jusqu'ici d \ 

Admirons cependant sa fameuse poudre de Nabet, sa <l méde- 
cine dicte vertu donnée de Dieu, mais surtout son oignemenl de 
alabaustrum, bon pour les yeux, l'estomac, les reins, la migraine, 
et les femmes atleinles de douleur à la maire »; à moins que nous 
ne préférions son merveilleux électuaire « qui clarifie la lumière 
des yeux, cure la paralysie, et ceux aussi qui sont empeschés en 
leur parler ». 

Pour lui rendre justice, il faut cependant reconnaître que nous 
ne trouvons pas dans Bienvenu toutes ces idées superstitieuses, 

» « Gerlissime Deo placuit quod hune ^go librum compoaerem ; nolo ea abs- 
condere quae anlea ia secrelo tenebam • . 



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— 21 — 

celle foi en Taslrologie et aux talismaos que Guy de Ghauliac n'a 
pas toujours évitée, et dont est remplie l'œuvre de Bernard de 
Gordon. Une seule fois, dans son traité, nous trouvons men- 
tionnée rinûuence planétaire ; c'est quand il nous explique pour- 
quoi dans l'opération de la cataracte il préfère l'aiguille d'or à 
l'aiguille d'argent: (tl'ordesoy clariffie plus largement que Tar- 
j> gent pour la puissance de sa planecte qui est le souleil cbault et 
D humist ». 

Parmi les oculistes coureurs^ tous n'étaient pas comme Bien- 
venu et beaucoup exerçaient sans titre. Certains de ces spécia- 
listes non patentés arrivant dans une ville demandaient aux auto- 
rités licence d'exercer. C'est ainsi qu'Alberlotli cite un nommé 
Drogo Salva, auquel un décret du conseil de Venise de 1330 
donne licence de traiter les maladies des yeux. 

Nous avons trouvé encore ces licences au xviii** i>iècle : dans 
les œuvres inédiles de Pierre-François Bénézet PamarJ, l'inven- 
teur de la pique, il est parlé d*un charlatan qui, après avoir 
obtenu licence des autorités, opéra de la cataracte dans les envi- 
rons d'Avignon. Ces licences devaient correspondre à ce qu'on 
appelle aujourd'hui : par permission spéciale de M. le Maire. 

Bienvenu fulmine à chaque instant contre ces ambulants peu 
scrupuleux, «ces fols mèges, ignorants de leur art, qui font la pire 
des cures D. Et leur façon de faire est peu honnête, témoins ces 
malades, atteints do renversement de la piupière, à qui ils 
demandaient pour les guérir beaucoup d'argent. 

Certes, il n'est pas défendu au praticien do demander la juste 
rémunération de ses services, mais il ne doit pas en exagérer le 
prix, (c Le chirurgien, dit Guy de Chauliac, doit être non extor- 
sionnaire d'argent, ainsi qu'il reçoive modérément salaire.» 

Bienvenu nous enseigne la même modération : il raconte qu'en 
Sicile il a gagné beaucoup d'argent (multas pecunias lucrati 
sumus) en enlevant à des malades des corps étrangers de l'œil ; 
vous ferez de même, ajoute-t-il, mais ayez toujours grand pitié 

2 



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— 22 — 

des pauvres, afin que Dieu vous donne la grâce de bien opérer 
(sed semper habeatis misericordiam pauperum, ad boc ut deus 
det vobis gratiam bene operandi). 

Mais, malgré cela, il ne faut pas négliger la question des bono- 
raires ; Bienvenu ne nous cache pas qu'il fait ses conditions à 
l'avance : oc Ego vero facto primo paclo cum eis,accipi6bam unum 
rasorium » il ne prend Tinslrument en main qu'une fois le prix 
débattu. Il nous apprend aussi que sa poudre bénédicle lui a 
rapporté de jolis bénéfices : c( et proplerea in pecunia bene flet 
nobis 3). 

Au moyen âge, les médecins paraissent avoir taxé leurs visites 
à un prix assez élevé : En 1348, à Avignon, Dulceline de Sade 
est soignée par trois médecins, dont deux juifs et un chrétien, qui 
touchent chacun 1/2 florin par visite. Bayle, à qui nous emprun- 
tons ces détails, calcule que cela faisait 8 fr., 17 de notre monnaie. 

Au point de vue pharmaceutique, le médecin poussait à la 
consommation, car trop souvent il partageait avec Tépicier. Aussi, 
en 1242, voyons-nous dans les statuts d'Avignon intervenir cette 
disposition légale (Art. 130) : Que les épiciers ne fassent point 
d'association avec les médecins : 

a Nous ordonnons que les épiciers feront serment.. . de ne point 
se concerlor et s'associer avec les médecins ou avec Tun d'eux, 
de ne leur rendre aucun service, de ne leur faire aucun présent ni 
aucune promesse pour les engager à faire vendre leurs remèdes. 

]> • . . Et tous les médecins ou épiciers ou élèves en médecine 
ou en épicerie qui auront conclu entre eux des pactes pour que 
les médecins fassent vendre des remèJes aux épiciers moyenant 
des promesses ou des présents faits aux médecins par leurs épi- 
ciers ou leurs élèves, seront punis d'une amende de cent sols au 
profit de la cour temporelle \d 

Le pharmacien n'existait pas encore, et la même balance pesait 
les épices et les médicaments. 

« Bayle el Laval ; loc. cit. 



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— 23 — 



IV. 



Bienveou a parcouru surtout Tltalie ; il dous racoate qu'il a 
pratiqué eu Calabre, en Toscaoe, dans los Marches; dans les îles 
de la Méditerraaée, Sirdaigne, Sicile etc. Mais iadubitablemenl 
il a dû veuir en Provence et à Montpellier. Le litre même du 
manuscrit de Paris a composé et compillé et ordonné à Montpel- 
lier 2> semblerait indiquer que Touvrage y a été écrit : mais ce 
manuscrit parait plutôt uue traduction faite sur le manuscrit 
latin. 

Le manuscrit de Monaco porte en dernièro page : Isle liber 
constat in Monfepessidano VI coronas. Ceci nous indique l'origine 
montpelliéraine de ce manuscrit. 

Le manuscrit provençal deBâle doit avoir la même provenance, 
et nous serions tentés d'y voir une version faite à Montpellier, 
dans la langue de l'époque, par un étudiant que les hasards de la 
vie ont fait émigrer. 

Une habitude courante au moyen âge consistait à étudier et 
prendre ses titres successivement dans diverses facultés ^ Bien- 
venu H étudié à Salerne, il nous dit être allé à Bologne. Salerne 
déclinait tandis que la répulalion de Montpellier allait grandissant, 
il n'est pas inadmissible que Grassus, attiré par ce renom, soit 
venu jusqu'à Montpellier. 

Il ne faut pas se dissimuler que les chirurgiens comme les ocu- 
listes (Ksaichants leur artj» étaient rares ; témoin la plainte qui 
s'échappe au xv'' siècle de la plume d'Alexandre Benedetti : 
aCelte partie de la science médicale (l'oculislique) n'est plus dans 
notre domaine, et a passé entre les mains de mercenaires, d'ar- 

' Peut-ôtre cela veoait-il de ce que certaines Facultés jouissaieal d'une renom- 
mée plus ou moins grande, et dislribuaienl facilement les titres. C'est à cela que 
fait allusion cette mauvaise langue de Guy Pitin, quand il dit que, dans certaines 
Universités, il se fait fort, pour un peu d'ar(|;ent de faire couronner docteur un âne. 



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— 24 — 

tisans et de rustres. .. Eu Asie, en Syrie, en Médie, on trouve 
encore aujourd'hui do très brillants oiédecins oculistes. Chez les 
autres nations et en Italie, ils sont au contraire très rares S. 

Il neseraU aussi pas impossible que ce soit la renommée de 
Bienvenu qui Tait fait attirer à Montpellier, et qu'il y ail été 
appelé pour y enseigner. 

Le grand argument, c*esl que Bernard de Gordon ne le connaît 
ni ne le cite. Nous croyons non seulement que Bernard de Gordon 
connaissait Bienvenu, mais aussi qu'il fut l'auteur de la traduction 
française de son traité. 

En effet, dans le manuscrit qui contient le compendil de 
Bienvenu, plus nous comparons les différents traités qu'on y 
trouve, comme la compillacion de médecine de Bernard de 
Gordon et le régime des dames, sans nom d'auteur; plus il nous 
semble que ces différents traités sont de la même époque et du 
même auteur, c'est-à-dire de Bernard de Gordon. 

Pour le compendil, dans la traduction française, une partie a 
été ajoutée par le traducteur : c'est le commencement ampoulé de 
la préface : ^ En considérant par notre rédempteur et souverain 
Seigneur.. .x>,jusqu'àaudilores audianl. Ce style déclamatoire nous 
rappelle fort le ton un peu emphatique du lilium medicinœ. 

Aux folios 3 et 4 de la compillacion de médecine, comme au 
folio 100 du régime des dames, nous trouvons pour les maladies 
des yeux des formules qui se ressemblent fort. 

Ce mot mége^ qui revient souvent, nous indiquerait, quand 
bien même le titre ne le porterait pas, que cette traduction a été 
faite dans le midi (lou mége, le médecin, est un mot encoro 
employé dans notre provençal). 

Sans en avoir la certitude absolue, nous croyons donc qu'on 
peut attribuer à Bernard de Gordon la traduction française de 
Tœuvre latine que Bienvenu aurait enseignée à Montpellier. 

1 Bencdotti ; ilumani corporis analome, lib. V, cap. XXXI. Basil., 1549. Cité 
par Uirscb. 



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25 - 



V. 



Los ouvrages d'oculistique des anciens qui nous sonl connus 
sont peu nombreux. En effet, abslraclion faile des notions que 
nous trouvons dans les traités généraux, tels que ceux de Gelse, 
Oribase, Aelius, Paul d'Egyne, et dans les volumineux ouvrages 
des arabes, voici la courte liste des traités spéciaux qui nous sont 
parvenus : 

I*" siècle. Demosthènb le marseillais avait écrit un traité en 
trois livres sur les maladies des yeux, dont nous n'avons que de 
courts fragments. 

Il* siècle. Galien. De oculis. Considéré comme apocryphe. 

X* siècle. Jésus Hali. De cognitione infinnifatum oculorum \ 
et curatione eorum. Imprimé à Venise en 1499 avec la chirurgie 
de Guy de Chauliac. Traité beaucoup plus important que les deux 
suivants : 

XP siècle. Alcanamosali ou Canamosali. De passionibus ocv^ 
lorum liber. Publié ibùiem. 

XIP siècle. Alkoatim, dont le traité sur les affections oculaires 
vient d'être réédité en Allemagne. 

De tous ces traités celui de Bienvenu est le plus complet. Il 
nous donn*} un aperçu de la science do Toculistique au moyen âge; 
sa lecture est indispensable à quiconque ve'Jt se rendre compte 
de l'histoire et des progrès de l'ophtalmologie à travers les âges. 



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CY APRES STNSUIT 

LE GOMPENDIL QUI A ESTÉ ORDONNÉ PAR BIENVENU GRAFFE 

MAISTRE ET DOCTEUR EN MEDECINE 

QUI A ESTÉ COMPOSÉ ET COM PILLÉ ET ORDONNÉ 

A MONTPELLIER 

POUR LA DOULEUR ET MALADIE DES YEULX 

SUR CESTE FORME. 



I. 



En considérant par noslre Rédempteur et souverain Seigneur 
la petit fragilité des corps des créatures humaines, qui seufiFrent 
pluseurs passions, douleurs, et angoisses, et autres grandes mala- 
dies, tant en tout le corps, comme en pluseurs membres particu- 
liers et chascun par soit, ou corps des créatures humaines et en 
toutes les parties d'ycelle qui leur peulvent subvenir en pluseurs 
et diverses matières, tant dedans le corps comme dehors, et en 
toutes les circonstances et deppendences, tant chauldes comme 
froides, et selon les influances des quatre complections et les 
humeurs naturelles : ainsi comme sont ceste assavoir sanguin, 
colérique, Qeumalique et aussi mélancolique, tant simples comme 
composés ; pour lesquelles choses il lui a pieu ordonner sur la 
terre pluseurs beaux remèdes, de grande quantité de nobles et 
belles médecines pour avoir salut. Lesquelles ont esté ordonnées 
par grant nombre de très beaux et excellents docteurs en méde- 
cine, noz anciens prédécesseurs maistres lesquels avccques graûd 
cures, peines et labeur y ont travaillé, fait compillé haultement 
avec grande industrie et Iraveil, tant que à pluseurs pour leurs 



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•- 28 - 

beaux faiz et grand compUlacion la rennomée fleurit après leur 
mort. 

Pour laquelle chose, moy Bienvenu Graffe, humble docteur en 
médecine en mon temps, me suis delicté à esludier, veoir, et 
visiter les beaux faiz, compillacions et euvres de nos dicls 
excellans maislres et docteurs : ay considéré leurs beaux volumes 
et euvres. J'ay veu et advisé que je ne veoye nul art complet sur 
le faic des douleurs et maladies des yeulx, à quoy on se peust 
présantement arrcsterpour en avoir salut, santé et guérison. Par 
quoy moy, meu de pitié pour ce que je veoye pluseurs qui de 
ladite maladie et infirmité estoient bien grandement, et en souf- 
froient pluseurs douleurs et angoisses, et parcoj'ay voulu f^iire 
une compillacion, petite ouvre, à ce de donner alogement à cculx 
qui en estoient malades et douloureux ; et me suis fondé en par- 
lant sur la forme et manière qui s'ensuit. Âuditores audiant. 



II. 



Vous qui voulez escouter et aprendre, et qui vous delictez de 
avoir sçi»voir et aprendre nouvelle science et de acquérir famé et 
rennomée en estudiant et en escoutant cesle très prounée science 
etarl des maladies et douleurs des yeulx, que j'ay composée et 
ordonnëjO selon ledit et ordonnance des anciens philozophcs, et 
aussi pour la grande exercitc et expérience que j'ay eue par lon- 
gue espace de temps en alant et venant par pluseurs et diverses 
parties du monde, et en usant et pratiquant, tant de médecine 
comme surgie \ tant en froides régions comme en cbauldes, 
esqucUes parties et régions j'ay fait pluseurs convalescences et 
belles opéracions et cures de choses touchant les douleurs et 
maladies des yeulx et de leur nuysance. Mais à tous et cbascun 
les cujsances et les douleurs de yeulx sont mécogneuz et non 
expertes ne ouvertes, ni leurs noms déclarés en médecine. Mais 

1 Surgie pour chirurgie. 



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— 29 — /A 

toulefifois, mon inlencîon esl de rédigez et déclarez pjir escripl, et 
noclaDt toujours, et rémanent en mémoire jusqu'à ce que ayt eu 
la pleine verilé de toutes et chascunes les maladies et douleurs et 
occupacions des youlx tant de causes accidentelles quelz survien- 
nent par les dictes maladies, comme de toutes autres nécessitez 
qui se peuvent curer par poudres, emplaslres, uncions et pillules, 
et aussi abstinence de soy garder des choses contraires cl user 
par bon régime de bonnes viandes. 

El avec ce ay mis et imposé nom par soy à chacune inffirmitô, 
cl les ay rcmenées et reductes toutes ensemble cl mis en nom 
Jésus. El luy voulus ainsi nommer et appeller pourtant que il soit 
plus à plain prouvé et expert en médecine. 

El ce est la cause pourquoy je l'ay \oulu faire compiller estant 
ce que j'ay veu qu'il estait nécessité à humaine nature pour ce 
que les anciens docteurs et auteurs, en leurs beaux livres et 
voulums et les grandes ouvres qu'ils ont compilées n'ont traité 
aucunement plainement ni formellement du dit art qui enlumine 
ainsi tout le corps humain, ainsi comme ils ont fait de pluseurs 
autres médecines qu'ils ont traiclees et pour sauver et guérir tou-, 
tes autres maladies. El certainement en tout mon temps je n'ay 
veu nul praticien qui ay bien ni certainement exercé le dit art et 
pratiquer de ladit maladie des yeulx entre tous les chrétiens là 
où j*ay fréquenté, ne eu cognaissance de pratiquer. Nonobstant 
que le dit art et pratique en médecine esl plus uliUe et plus prof- 
fltable à nous autres contre la dicte maladie des yeuix parce qu'il 
enlumine tout le corps que nulle autre science qu'il soit prénuse 
pour nulle autre maladie qui soit dessus le corps humain. 

El est le icelluy art et médecine es mains et par les mains des 
médecins ignorants et non séchants qui se entremettoient du dit 
art sans avoir cognoissance de nulles des dictes maladies des 
yeulx. 

Pourquoy ilz estoient cause de confondre et de gaster les yeulx 
de tous paciens en quoy ils faisoient oppération par grant erreur. 



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CHAPITRE PREMIER, 

Le premier chapitre est ordonné pour la anathomie des yeulx 
et de toutes ses tuniques. 



I. DÉFINITION ET COONOISSANCE DE L*UEIL. 

Les yeulx sont instrumeols qui soûl concaves et sont plains de 
aue, qui sont composez au front de la teste de la personne à ce 
qu'ils puissent ayder à Tadeministracion du corps par le oioyen 
de Tesperit visible de donner au corps parfaicte lumière. Et est 
ung instrument précyeulx qui est ainsi ordonné que en la partie 
du nerf, c'est-à-dire par dessus la concavité et dessus le moyeut 
de Tueil, est charnu. Mais de la partie des paupières, il est très 
parfdiclement cler, et par le milieu de la dicte clarté appert la 
paupière ou pupille par lequel l'espérit visible qui vient par le 
nerf concave par son exciture, c'est assavoir les caves et tuniques, 
lesquelles tuniques Johannicj nombre et extime à VII, et les 
nomme par la manière qui s'ensuit. La première est appellée 
retinam ; la seconde, secundinam; la tierce est dicte scliros; la 
quarte est appellée araneam ; la Vme est nommée uveam ; la 
Vlme est appelée corneam ; la Vllme et derrier est dicte conjonc- 
livam. Il dit aussi que la couleur des yeulx sont IV : c'est assa- 
voir, noirs, soubs blancs, vairs, et claudus ou clautus. 

II. — Des tuniques des yeulx. 

Et moy Bienvenu GrafTe dy ainsi que les tuniques des yeulx 
sont deux tant seulement. A quoy je me arreste selon mon advis, 
et tienne que la expérience est bonne, lesquelles j ay eues par 



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— 31 — 

grant exercice, les ay longuement expérimentées^ et grand pra- 
tique, et mesmement par anatbomie. Et je mis nom à la première 
tunique, et Tay appellée sanatellam pour tant qu'elle sauve et 
garde tout l'ueil, et retient les humeurs qu'ilz ne descouvrent pas 
Tueil. Se ainsi estait que ieelles humeurs descourussent par 
Tueil, se seroit assez pour perdre la vue. Et semblablement j'ay 
appelle la seconde discoloratam, quia non est color in ea. C'est 
à dire pour ce qu'il n'y a point de couleurs en elle. 

Et pourtant je dis que l'ueil n a point de couleurs, mais se 
devise à l'occasion des humeurs ainsi comme il est par le moyen 
de la clarté de la humeur cristelline, qui est une parfaicto et 
clère humeur ainsi comme nous avons veu et expérimentez par 
pluseurs fois. Car quand la humeur cristalline est près des tuni- 
ques, les yeulx se monstrenl eslre en une couleur, et quant la 
humeur est ou milieu, elle se démonslre estre de une autre cou- 
leur ] et quant la humeur est au parfont, elle se démonslre 
d'une aulre. Pourquoy les humeurs se varient Tune de l'autre 
pour les scilualions là où elles sont assises. 

Et par ainsi je dis que ceulx qui ont les yeulx parfont, et les 
yeulx forment, visibles, el voyenl bien grandement après ce qu'ilz 
sont en l'aage de XXX ans. Et ceulx qui ont la humeur cristelline 
au milieu, ceulx cy voient bien et clèrement en leur jeunesse, 
et leur entretiendra la veue en leur vieillesse : et se démonstrent 
les yeulx de telles personnes moyennement noirs ; mais que en 
pluseurs de ceulx cy souvent vient grandement et surhabonde 
optalimie, et une autre maladie dicte pains, ce qu'il ne fait pas 
aux autres. Et semblablement ceux qui ont les humeurs près de 
la tunique, ou les yeulx vers, et pendent sur la blancheur, et 
telles personnes ne voient pas bien ne en jeunesse ne en vieil- 
lesse, car en eux surviennent souvent reumes et larmes en telz 
yeulx vers, plus que aux autres, et si ont tousiors les paupières 
rouges. Et pour ce je dis qu'ilz ne voyent pas bien, car Tespérit 
visible qui vient par les nerfs concaves et en passent trouve et 
rencontre les humeurs près des tuniques là où ils se espendent 



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— 32 — 

par dehors, par quoy l'espérit visible perl son effort et vertuz. 
Et puis que dous avons dit de ceulx à qui apparent les yeulx 
vers, et qui pendent et condescendent en blancheur, qui est 
proprement la cause pourquoy plusieur diceulx ne voyent pas 
bien. 

El de présent il e<l expédient que je vous die de ceulx qui ont 
les yeulx moyennement noirs, et pourquoy c'est que plus lon- 
guement dure en eulx la veue quelle ne fait pas aux aulres. Et 
la cause si est, car la humeur crestalline demeure au milieu de 
Tueil et l'espérit visible qui vient p:ir les nerfs concaves faic illec 
résidence pour raison de la lunique concavée vitrea, qui se tient 
es yeulx, est là qui la retient; par<|uoi il ne se peust silost 
espendre au lieu. 

Nous \ous avons narré de ceulx qui ont les humeurs au milieu 
des yeulx, cl pourquoy c'est que la veue leur dure plus quelle ne 
fait aux autres compleclions. El de présent nous voulons dire et 
conclure de ceulx qui ont les humeurs en la parfondité de la teste 
et apperent leurs yeulx noirs, et voyent plus grandement que les 
autres, mais que à pluseurs il no dure pas jusques au temps de 
vieillesse. Et dit ainsi que la veue est milleur et plus parfaicte 
pour la profondite de la humeurs crestelline, pource que Tespérit 
visible trouve plus grand espace au parfonl, el si remplit plus à 
son aise toutes les concavités des yeulx devant ce quelle pisse 
devant lu humeur do la lunique viliée. Et voulez savoir pourquoy 
la veuo n'est pas donnée à pluseurs de ceulx cy jusques à vieilles, 
pourceque les fumosilcs et calh.iractez surviennent plus grande- 
ment en ceulx cy que aux autres, que leur donne empeschement 
en la veue. 

Nous vous avons narré des tuniques des yeulx, selon Johanni- 
cius qui sont VII, et selon moy ne sont que deux, et aussi vous 
avons déclaré plainement de la diversité, et comment il n'y a 
de couleurs es yeulx, et comme la cause est pour scituacion des 
humeurs et diceulx. Et aussi comment une manière varie de 



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— 33 — 

Tautre, et pourquoy c'est que une créature voit moios que 
l'autre, et qui est cause et raison ne de quoy cest. 

Et de présent en continuant à notre euvre et pratique, nous 
voulons procéder sur les humeurs des yeulx, et donnerons à 
entendre et déclarerons les noms et surnoms de toutes les mala- 
dies et espèces des yeulx selon qu'il apporra plus à plain en 
leurs propres chappitres. 



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CHAPITRE IL 

Ce deux chapitre est des humeurs des yeulx et seurnoms de leurs 
maladies et espèces selon qui s'ensuit. 

De présent il convient de dire des humeurs des yeulx . Je dis 
doncques preoiiérftinenl que les humeurs des yeulx sont trois en 
nombre: desquelles la première est appelée albugineus, la 
seconde est appelée cristallinus, et la tierce vitreus. La albugi- 
neusest ainsi dicte pour ce qu'elle est semblable à album d'œufl; 
et la cristallinus est ainsi dicte pour ce qu'elle est semblable 
à cristal ; et la vitreus est ainsi dicte et nommée pour ce qu'elle 
est semblable à voirre. 

Et pour le présent nous voulons narrer et démouslrer comment 
Tueil est composé dedans le cbief de la créature avecques les 
humeurs ; mais selon la anathomie que nous avons aprouvé et 
nous trouvé que il y a aucune concavité en la sommité ou hau- 
lesse du nerf optique; et est ceste concavité plaine d'eaue glau- 
couse qui est divisée en III cas en espèce de nom, en touchement, 
et en figure. Dont la première espèce en touchement et est lalou- 
chement semblable à album d'œuf. La IP est ainsi comme 
gomme fresche, et la tierce est telle comme est le lart du port 
quand il estcuyt. Et toutes trois sont en une mesme substance 
et ne sont point séparez en une figure, et ont difi'érence tant à 
latouchement comme au nom. Et est la première celle que Joan- 
nicius appelle albugineus ; et la seconde cristallinus ; et tierce 
vitreus. 

Nous vous avons dit les humeurs des yeulx et aussi les non s 
comme elles ont. Or pour le présent nous pouvons dire les con- 
dicions de la première humour qui est dicte albugineus, laquelle 



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— 35 — 

est dicle froide et humide. Et la seconde qui est dicte cristalline 
est froide et seiche. Et la tierce qui est vitreus est semblablement 
froide et seiche; mais touteffois elle est mains que la cristalline, 
car la froideur e3l bien actrempée pour la chaleur du sang qui 
est es paupières, car il se approche plus de luy que des autres. 
Et avons dit que les humeurs vilrée et cristalline sont norries de 
lagénéracion des nerfs, et albugineus est nourrie de la généra- 
cion du cervel. 

Nous avons ja dit comment Tueil est composé ou chief, et 
comment il est concave et rempli de trois humeurs et de leurs 
conjuction, et des divisions de la concavation, el comment ilz 
sont remplis, et aussi de leurs noms, et de leur substance de 
quoy ils sont norris. 



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CHAPITRE III. 

Le tiers chapitre de ce livre est ordonné pour les catharactes. 

« 
I. — Des sept espèces de catharactes. 

Or de présent nous procéderons es maladies de choses froides 
qui surviennent es yeulx, el de leurs cures à ce nécessaires. El 
premièrement nous parlerons des catharactes. 

Je diz donc que ilz sont VII espèces de catharactes. C'est assa- 
voir IV curables et III incurables, car parle certain l'on cognoist 
le nom certain. La première espèce curable est une à laquelle est 
blanche ainsi comme est chaulx qui est purii&ée parfaiclement. 
La seconde est blanche, ainsi comme celle estoit de couleur 
célestine. La IIP est blanche, et est ainsi comme couleur de 
scendre. Et la quarte est citrine, et de ceste cy s'en treuve bien 
petit. 

Doncques la première espèce est blanche ainsi comme chaulx, 
qui survient par percussion en quelque manière que Tueil aye 
esté frappé, dehors ou dedans, avecques baston, ou d'une pierre, 
ou du point, ou de leurs semblables. 

La seconde espèce est blanche qui ressemble couleur céles- 
tine qui précède de Testomac et survient à l'occasion de mau- 
vaises viandes, lesquelles viandes résolvent et engendre le fumo- 
sitez qui monte au cerveil, et le cerveil les envoyé es yeulx. 

La tierce espèce est blanche, et est en manière de couleur de 
cendre, et ceste espèce survient à Toccasion de trop grant dou- 
leur du chief, ainsi comme est migraine, ou aultremont par trop 
giant froidure, ou par trop grant angoisse, ou douleur de trop 



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— 37 — 

grande aboodence de larmes, ou pour trop veiller, et leur sem- 
blables. 

La IV* espèce est de couleur citrine et ceste survient pour 
trop boire^ ou pour trop menger, ou pour trop grant peina et 
labeur avoir, et que à pluseurs elle se engendre des huaeurs 
mélencoliques. 

II. — De la cure des catharactbs. 

Nous avons dit la cause et les aclydens de càtharactes cura- 
bles, et de présent nous vous dirons la cure d'icelle. 

Et vous disons que toutes les espèces dessus dites ne se pevent 
parfaictement curer jusques à ce qu'elles soyent bien complectes 
et formés : et le signe qu'elles soyent bien complectes est quant le 
pacient ne voit point, si non tant seulement la clarté du souleil ou 
la lumière de la chandelle de nuyl. Et pluseurs fols meges les 
ont cuyder curer et s'en sont efforcés par purgicions et par poul- 
dres; et (out ce n'a esté que fallaces. Car catharacles ne peut 
estre curée avecques médecine laxative, pouldres, electuairez, ne 
avecques coUires ; car elles sont dedans toutes les tuniques des 
yeulx; et si sont engendrées de humeurs des yeulx, c'est assa- 
voir de albuginée, car l'occasion des dis actidents la humeur 
albuginée se dissolve et en partie se porrist, et ceste pulréfac* 
lion est ainsi comme eaue coagulée, et se met devant la lumière 
des yeulx entre les tuniques de la humeur cristalline. Et pour 
ceste cause les sarrasains et ceulx de arable appellent icelle 
catharacte illincosarar \ c'est ili dire porrye eaue, et nous autres 
lactins l'appelons catharacte, pourquoy icelle eaue putriflée se 
peut mectre devant la lumière, c'est à dire devant la pupille entre 
les tuniques de la lumière des yeulx. Pourquoy elle ne se peut 
curer avec pouldres, collires, ne avecques autre médecine, se ce 
n'est avecques ceste médecine qui s'ensuit. 

Notre cure est telle : premièrement tu dois scavoir qu'il fait 

* Linzaret) daos le texte latio. 



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— 38 — 

purger le cerveil avec nos pillules dictes Ieraclis\ qui oot esté 
par nous trouvés et sont celles qui s'ensuiveol : R. lurbich, aloos 
epatici il. s.i. roacis, cubèbe, maslicis, croci il. s. j. '. 

Incorporez toutes ces choses ensemble et les conûs avec suc 
de rosez et en fait masse de laquelle tu formeras pillules^ et en 
donne au pacient devers le soir V ou VII. 

Ili. — La opéracion de la catharacte. 

Et le jour d'après la purgacion, à heure de tierce, faiz seoir le 
pacient face à face devant toy, et que il aye les yeulx clos et puis 
encommance la opéracion ou nom de Dieu. 

Et avecques ta main senestro, tu eslièvoras la paupière de 
dessus^ et avecques la main ùoslvo tu tiendras ton aguiile d'ar- 
gent, et mectras ladite aguillodo la partie moindre lacrimable, et 
pertuisesTueil avecques la dicte aguillo on tirant et boutant illec- 
quesjusques à tant que tu touches avecques elle jusques à la 
dicte eaueputrifiée, et encommance dessoubz jusques à la pointe 
de ladicte aguiile, et este ladicte eaue de dessus où elle se lient 
qui Qst devant la pupille, et la faiz descendre au bas, et la tiens 
par telle manière et par telle espace de temps que Ton pourroit 
mectre à dire IV ou V fois le paler noster. Et puis que tu estes 

* leraclis, abreviatioa de Hierosolimilaae. 

^ Voici la sigaiOcation de ces vieux signes employés daus les formules. 

H; ou qc, ou P, au commencement de îa formule signifie : Recipe; Prends. 

1b = une livre ou XII 8, ou 500 gr. 

3 = une once ou VIII S , ou 30 gr. 

3 =: un gros ou drachme, ou III 3 ou 4 gr. 

3 = un scrupule ou XX S ou 1 gr. 274. 

IS ou G H = un grain ou 0,05 centigr. 

Le signe fl après le signe d'un poids signifie semissùponderis, la moitié do co 
poids : par exemple 3 • ^ . voudra dire une demi-once. 

Le nombre des poids s'écrit, avant ou après le signe, en chifTres romains majus 
cules ou minuscules : VI. 3 . ou vi. 3 . ou vj, 3 , lisez six drachmes. 

Pour les substances sèches: m ou M =. manipulum, poignée, m. j. = une 
poignée. 



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— 39 — 

tout doulcemeal la dicte aguille de dessus, et s'il advenoil que 
elle retournai dessus, ramène la à la moindre partie lacrimable, 
c'est assavoir devers les aureilles. Et noctez bien que depuis que 
lu auras Taguille dedans Tueil, tu ne la dois point tirer dehors 
jusques à tant que la catbaracte aye collé en partie ainsi coo-me 
il est dit devant. Et puiz après, tire Taguille ainsi comme tu luy 
as mise^ tout doulcement; et quant tu en auras ainsi tirer 
l'aguille, fait tenir Tueil du patient clos, et ayes du coton qui 
soit trempé en glaire d'euf, et le met dessus Tueil du pacienl, et 
fait coucher ledict pacienl à Tenvers jusques à IX jours, et qu'il 
aye toujiours les yeulx clos en telle manière que l'ueil ne se 
remue. El luy continue à meslre la glaire deuf dedans par trois 
fois le jour, et la nuyt autre fois jusques à la fin. Et le continue 
jusques à tant que ledt terme soit passé. Et que le lieu là où le 
pacienl couche soit obscur et trouble. Et sa diète soit qu'il 
mange durant iceulx IX jours de eufs fres avecques du pain ; et 
s'il est jeune, qu'il boyve de Teauo ; et s'il est vielz, qu'il boyve 
du vin bien trempé avec eaue. 

Hz sont pluseurs qui commandent que Ton donne à mangé à 
leurs paciens de cher fresche et gelines, et nous approuvons que 
ilz norrissent moult grandement. Pourquoi nous doublons que 
pour trop grand norrissomcnl en sang es yeulx, ce qui serait 
contraire à notre cure, et poi-r cesle cause nous le deffendons. 

Et quant les IX jours seront passés, faictoz au pacienl dessus 
l'ueil le signe de la croix, et puis qu'il luy lave de eaue fioide. 
El que le pacienl encommance de faire ses besoingnes. 

Et par cesle manière se curent toutes les calbaractez qui sont 
curables. El se il y a aucun médecin qui autrement les vueille 
curer, nous disons qu'il ignore la dicte cure et la cause dicelle. 
Cesle cure cy je l'appelle actuaire *, pour ce quelle se fait avec 
aguille d'argent ou d'or. 

Nous deffendons expressément de non user d\iguillo de fer, 

* Acluaû^e pour acuaire, de acus, aiguille. 



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— 40 — 

porlanl que par elle peut venir trois manières de nuysance. La 
première manière est pour ce que le fer est dur, el à roccasion 
de sa durté il dissoult partout ce qu'il actaint. La seconde est 
que secatharacleestdure eu la séparacion devant sa lumière, la 
pointe de Faguille se pourroit rompre et demeurer en l'ueil ; et 
se ainsi estoit quelle y demourast, elle consumroit toute la subs- 
tance de Tueil. La tierce manière est pour ce que à l'occasion de 
la douleur qui seroit en l'ueil par le moyen de la pointe de l'aguille 
rompue, tout le temps il gecteroit larmes, car toujiours le pacient 
sentiroit plus grant douleur pour la dnrté de ladile aguille de 
fer; laquelle chose no adviendroit pas se elle n'estoit d'argent 
ou d'or. 

Je dis donc que les deux aguilles d'or et d'argent sont tou- 
jiours bonne pour la durté et mollesse qui est en elles. Mais l'or 
de soy clarifie plus largement que l'argent pour la puissance de 
saplanecte qui est le souleil cbault et bumist. 

IV. — De la PREMlàRE ESPÈCE DE CATHARACTE. 

Vous avez oy par nous les causes, espèces, actideniset les cures 
de catbaractes qui sont curables. Et de présent nous devons dire 
et déclarer la division qui est ordonnée entre l'un et l'autre, et de 
la restauration de la lumière à ce que le pacient puisse mieulx 
veoir après la cure parfaicte. 

La catharacte qui est blancbe ainsi comme cbaulx, qui survient 
pour la percussion accidentelle qui ce fait en l'ueil, est de difiQ- 
cile cure, et par ainsi le pacient ne peut pas bien veoir pour la 
percussion que les yeulx ont sustenus, car les humeurs albuginéOi 
cristeline et vitrée sont dissolvées en partie, ainsi comme les 
autres humeurs de toutes les autres parties du corps qai se dis- 
solvent quant elles sont frappées, batues et mutilées de baston, 
de pierre, ou de cousteau, ou d'autre chose semblable. 



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MMM 



— 41 — 

V. — De la seconde catharacte. 

De présent nous encommonceroas à dire de la seconde catha- 
racte qui est blanche et se tourne en couleur célestine. 

Je dis doncques de ceste catharacte cy, que ce le pacient est 
bien curer avecques raguille, ainsi comme il est dit dessus, que 
H verra clèrement, et luy sera tournée sa lumière ainsi comment 
ilesloit par devant. Et ce vous voulez savoir vrayment pourquoy 
ce leur advient, c'est pour la variété et sciluacion des humeurs 
et habondence d'esperil visible qui est dedans Tueil. Pourquoy 
vous devez sravoir véritablement que tous ceulx qui ont souSert 
et souffrent de cette seconde espèce sont mieulx curés et voyent 
mieulx que de nulle de autres espèces devant dictes. 

VI. — De la tierce catharacte. 

De la tierce catharacte, qui est ainsi comme comparée à cou- 
leur de cendre, je dis que depuis qu'elle est curée ainsi comme 
il est dit dessus, et le pacient a recouvert lumière, elle ne luy 
iemeure pas longuement en cest estât, se on ne luy aide avecques 
autres médecines. 

C'est assavoir cum dyaolibano noslro, et que le patient le 
praigne souvant, et est ainsi fait : R. olibani, gariosili, nucis 
muscate, nucis indice, croci, il. s^. fi. boni castorei, S. i. Vous 
prandrez toutes les choses dessus dictes ensemble, et en faictes 
pouldre, et la passez par ung sedas ; et après vous prandrez de 
bon miel et le mectez sur le feu, et Tescumes 1res bien, et puis 
en confizé les choses dessus dictes ainsi mises en pouldre, et en 
faictes electuaires desquels le pacient prendra chacun jour de 
matin, ainsi comme il se lèvera du lit. El que il aye l'estomac 
jeung et en praigne à la quantité d*une châtaigne ou d'une cro- 
ville de nois ; et semblablement que il en praigne devers le soir, 
quant il s'en ira coucher, en semblable quantité, et se garde de 
toutes viandes qui soyent de malle digestion ; et use de celles 



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— 42 — 

qui sont de bon ne digestion : c'est assavoir cbauldes et humides 
qui engenâreol boo sang; et qu'il se garde tout temps de viandes 
froides et seiches et ncutrez, comme sont cher de boc, d'aignel, 
de feignOi de porc, et de cèbes crus, car ce leur nuyt grande- 
ment. 

Et si avons toujiours esté expers à ce, car toujiours pluseurs 
sont venus à nous four esire curés de calharactez lesquelles n'es- 
toient pas bien parfaiclez, et nous leur donnions à menger de 
cebes affin que plustost je se complissenl et se conformassent. El 
que le pacient boyve toujiours vin chaull, ouquel Ion mecte sauge 
et rue, et que on se garde co temps pendant de atouchement de 
femme lant comme le pacient pourra, et que il ne entre au baing 
ne en estuve. Touteffbis que il se baigne en une tigno en sa 
maison avecques eaue de la dccoccion de camomille, et que il 
tienne toute la teste dehors la tino à co que la fumée ne nuyso 
point es yeulx . l 

Et Doctez que la olecluaire devant dît vaùlt moult à reslraindre 
les larmes ; et si assoulaîge la douleur de la migraine qui se fait 
de fleume. 

VH. — De la quarte espèce de catuaracte. 

De la quarte espèce qui est à catbaracte ainsi comme cytrine, jo 
dis que entre les austrcs elle est dure et ronde ; et quant lu la 
vouldras ouvrir avecques l'aguille, au commancement lu ne.la 
dois pas mectre par enbas, car elle ny pourroit pas entrer pour 
raison de la rotondité et de la duresso qui est en elle, mais lu la 
mectras de la partie moindre lacrimable et flche Taguille, et puis 
après quant tu la tireras dehors, met la main de la partie du nefz, 
el puis tire bien Ion aguille en tordanl et retordant avecques les 
dois doulcement, ainsi comme lu l'as en la cure précédent. 

Pource je dis que tous ceulx qui ont souffert et souffrent les 
inBrmités des calharactes qui sont curables, sinon de celles qui 
sont de couleur de cendre, il ne leur est point de meslier de avoir 



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— 43 — 

ne de tenir abstinence de viandes, car nous sommes assez expers 
à ce que nulle viande ne leur donne nuysance, mais leur est de 
nécessité de avoir aucun confort ou norrissement, à ce que les 
nerfz soyent réconfortés par lesquels Tesperit visible resplendisse 
es yeulx. 

VIII. — De la première espèce incurable. 

Et que ainsi est que nous avons acomplir le traicté de catba- 
raclez curables, maintenant nous retournons à déclarer des trois 
espèces incurables. 

Pourquoy je dis que la première espèce incurable et celle que 
les médecins de Salerne appellent goûte serène, et trouveras les 
signes de la cognoistre telz : caria pupille est noire et claire comme 
se au lieu ny avoit nulle macule. Et dedans la concavité d'eulx 
appert ainsi comme de couleur serène, et les yeulx se mènent 
mémement tousiours sans cesser avecques les paupières comme 
se ilz estoient plains d'argent vif. 

Et en notre temps nous en avons veu pluseurs qui avoient la 
dite infirmité. Et nous disons ainsi en jugent, que telle maladie 
procède et vient à TenSfant ou pacient du ventre de sa mère, dau- 
cune infirmité corrompue qui a audit lieu dominacion, qui est la 
cause pourquoy il naist sans lumière. Et nous nous sommes par- 
forcez de les curer avecques médecines variables en pluseurs et 
diverses manièits. Mais nous ny avons peu trouver nul remède ; 
et saicbes que oncques nous ne vysmes et oysmes dire que ils se 
puissent curer en manière qui soit. N.éantmoins aucuns de ceulx 
cy voient la clarté du jour, et vont par les chemins les yeulx ou- 
verts comme se ils visse bien ; et sont ainsi pluseurs de ceulx 
cy qui voyent la stature des hommes et leurs somiaiges ou aucune 
autre chose. 

Et en aucuns demeure ce petit de lumière jusques à la fin de 
leur vie. Et aultres sont è qui il ne dure point, ne ils ne voyent 
goûte en plus que s*ils n'avoienl nuls yeulx. 



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— 44 — 

El touteffois vous povez croire que se ung chacun de ceulx cy 
avoient tout Tor du nionde, el le vouloient donner, et tous ceulx 
du monde fussent médecins, si ne leur pourroit donner aucun 
remède se Dieu ne le faisoit. Et pourquoy car les nerfz optiques 
sont tant oppiliéz et morliffié, car nulle ayde qu'il appartienne à 
médecine ne leur pourroit aider. 

El appelions icelle catharacte ainsi comme celle qui est engen- 
drée par le moyen de aucune corrupcion du cerveil, qui est dicte 
goûte aigouse, qui descend tout aigueusement et subtilement ou 
subitement qu'elle corrompt et dissolve de leur lieux toutes les 
humeurs des yeulx, en telle manière que des icelle heure ensui- 
vant les ners optiques oppillent, ainsi comme dit est dessus. 

IX. — De la seconde espèce incurable. 

La seconde espèce qui est incurable, est celle qui appert dedans 
les yeulx comme couleur verde ainsi comme lipie, qui est en 
aucuns en plusieurs lieux. 

Et saischez bravement que ceste espèce ne vient pas de loin 
de petit à petit, mais vient soubdainement, et haslivement des- 
cent à si grant haste, car des celle heure quelle est descendue, le 
pacient n'y voit goutte emplus ne que s'il n'avoit nuls yeulx. 

Pourquoy je dis que de toutes les autres espèces ceste cy est la 
plus mauvaise. Et ceste espèce survient es yeulx pour trop grande 
froidure du cerveil et grande multitude de larmes et plénitudes, 
et trop grande angoisse des yeulx et de vigilles ou de vielles, et 
par trop grande timeur et verbéracion, ou bastre la teste, ou par 
trop jeûner, et leurs semblables. 

X. — De LA TIERCE ESPÈCE INCURABLE. 

La tierce espèce incurable est quand toute la pupille appert en 
manière que Ton ne voit point aux lieus nuls cercles ne tuniques 
aux yeulx, mais toutes les lumières, après ce quelle est dilatée, 



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— 45 — 

appert ou noire ou blanche. Pourquôy après ce que la pupille est 
ainsi dilatée^ on n'y peut avoir ny trouvé aucun rennède qui 
appartienne à médecine, de quoy en se puisse aydier; et se 
aucun croit et se efforce de leur vouloir aidier, il travaille et 
labeure en van. 



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J 



CHAPITRE IV. 

Le quart chappitre est de la passion des yeulx qui procède de 
la eomplection du sang. 

I. De LA PRUniTUDE DES YEULX ET BU BEN VERSEMENT DES 

PAUPIÈRES POUR LA MULTITUDE OU TROP GRANDE HABONDENCE 
DE SANG. 

Ou nom de noslre Seigneur et Rédempteur Ibesuscrist, de 
présent nous commancerons à déclarer les aclidens de pluseurs 
maladies sanguines qui surviennent es yeulx pour raison et à loc- 
casion des IV humeurs ; c'est assavoir : sanguin, colorique, fleu- 
matique, et mélancolique. 

Et premièrement nous parlerons de la eomplection sanguine; 
car je vous dis ainsi que pour raison de la multitude et de la 
grande habondance du sang, aucunefTois il monte es yeulx aucune 
rougeur qui art. Et ceste rogeur et ardeur ce converlist en pruri- 
tude, pourquoy il deseiche les paupières en telle manière que il 
ne demeure en lueil nulz poilz. Et se ceste infirmité ou maladie 
demeure par ung an sans estre curée, elle fait renverser les pau- 
pières. 

Et pour ceste cause avant que le pacient vienne en cesl estât il 
se doit ayder avecques notre coMire dit de Illilacion qui est 
ainsi fait : R. thnlie alexendrine 3- I. et deux quartons de Ires- 
bon vin blanc. Et dedans un mortier avecques ung piilon chault 
tu pilleras Iresbien la tulhie, et puis met tout ensemble en une 
ille neufve, et y adiouste : S- I. rosarum siccarum; et fait tout 
boillir ensemble en telle manière dessus petit feu, jusques à tant 



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— 47 — 

que le vin soit à la moitié consummé \ Et puis tu le colleras^ 
parmy ung drap de liu, et le réserve et garde eo une ampolle de 
verre, et en lave le pacient deux fois. Et tous les pacieos que tu 
.en laveras, dedans une seproaine ilz seront garis. 

Et saiches que avecques ceste collire cy nous avons curer inu- 
mérables créature dicelle maladie. 

Mais louleffoûf gardes bien que devant ce, vous user de ladicte 
médecine sur aucun pacient se il est jeune, que vous le faictes 
flobolbomer ou saigner de la voyne médiane du front ; et se le 
pacient est viel, lu lui purgeras le cerveil avecques nos pillulles 
qui sont faictes contre la putrilude des yeulx, et se font par cesie 
manière : R. aloe epatici, sandalli rubei, esule, reubarbi "s*». 3* 
û. turbich, minoris catbapucia, agarici 's.'S 3. I. Incorporez 
bien tout ensemble, et les faictes conQre avecques arlbimise, et 
en faictes masse de laquelle vous ferez pillulles, desquelles vous 
ferez prandre au pacient selon la puissance qu'il aura de les 
recevoir. 

El dit ainsi que non tant seulement lesdictes pillulles valent pour 
le pruritu et douleur des yeulx, mais aussi à tout pruritut du 
corps et rongne de humeurs quelconque elles sont bonnes et 
prouffitables. 

Et appelons icelles pillulles composées, elles avons ordonnées 
et les povez donner, car après que vous les aurez prises, vous en 
remercyerez Dieu pour le bien que vous aurez receu délies. 

II. — De obthalimie. 

Ils sont aussi autres inQrmités et maladies procédantes à l'oc- 
casion delà humeur sanguine, qui se naissent et surviennent es 

« C'esl le collyre lerosolimitan du texte provençal et latin. Guy de Chaullac 
l'appelle collyre de Bienvenu et en donue la formule suivante. 

P. tuthie d'Alexandrie, et sucre, de chacun 12 onces; roses sèches mises en 
poudre, 1 once. Soient cuits à petit fou en deux livres de bon vin, jusques à con- 
somption de la moitié, puis coulez, et gardez-le pour user. 

2 Tu le colleras, du latin coiare, flllrer. 



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— 48 — 

yeulx, qui babondent plus depuis la an d'aoust jusques à la fin 
de septembre que elles ne sont en nul autre temps. Et ad vien- 
nent icelles inQrmités et maladies pour la mutacion de Tayr et de 
la diversité des fruis que Ton menge en icelle saison. Et les- 
autres surviennent pour la mutacion de Tair tant seulement, car 
en icelluy temps pluseurs obtalimies, les panniculez se engen- 
drent. 

Pourquoy je vueil icy démostrer que c'est que obtbalmie : 
obtbalimia est sang qui est corrompu et est engendré de humeur 
cbauldo, laquelle se met dessus la blancheur desyeulx avecques 
grant fumositez ardent, et avecques grande babondance de hu- 
meurs ; et incontinent fait grand timeur et douleur es yeulx, et 
le pacient ne peult reposer ne dormir, car il luy semble soyent 
plains dearenne, d'espines ou de fumée. 

La cure tant des viez commodes jeunes, est telle : R. anteram 
album * et sarcacoUa y i . selon que tu voudras faire de poul- 
dre; et la pulvérise très bien, et de ladicte pouldre tu mectras 
dedans les yeulx ; et y en met si bonne quantité que tu en amples 
les yeulx, et fait coucher le pacient a l'en vers quand lu y voul- 
dras meclre ladicle médecine. Et puis si prent estoupes de lin, 
et les baignes bien en cave froide, et les comprimes fort, et les 
met dessus Tueil: et de ceste heure en avant lu verras merveilles, 
car le pacient qui ne povait durer ne repouser tantost» dormira 
et sera en repos ^ El avecques ceste pouldre cy nous en avons 

* lie texte provençal dit angelot ; le texte de Breslau, azarum album; Tincu- 
noble, oz arnec. Le texte de Paris porto exact emeni auteram album. Pour le sens 
du root antera, voir le glossaire. 

^ Kmcunable de Ferrare dit on plus : 

Et providi roedici salera itani vocant obtalimiam secuadum Ypocratem et Galie- 
num, mirabiles atque numerabiles medicos. Nos vocamus ipsam torturam tene- 
brosam, quia quando descendit in oculis, cum tam magna descendit tortura quod 
oculi tenobranlur. Et medicinam predictam vocamus pulverem benedictum, quia 
cum mittitur in oculis ab il la hora inantea paciens habet requiem, et recipit sani- 
tatem. Et cum ista cura sine dormitione et purgatione, innumerabiles homines 
liberavirous ; et propterea in pecunia bene fiet nobis. 



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— 49 — 

curez inumérables : pourquoy nous l'avons nommée el appelle 
pouldre bénédicte ou alexandrine. 

Et si veulx aussi dire et déclarer de diverses généracions et 
maladies de infirmité qui adviennenl os yeulx pour raison de 
ladicte maladie de obtalimie, et c'est pour ce qu'ils nont este2 
curez au commancement. Et sjischez que par deffault de soy 
garder de celle maie cure, pluseurs folz médecins ouvrent igno- 
ramment en icelle, et commeclent grant erreur en prenant la 
substance des médecines, et font adjoindre au lieu nouvelle dou^ 
leur, à l'occasion de laquelle les yeulx se blanchissent, en telle 
manière que en beaucop de pacient la santé qu'ilz avoient es 
yeulx perdevant ne leur sera jamais rendue, ne retournée au 
premier estât, pourtant que aucunes humeurs des yeulx se dis- 
solvent pour la douleur qui monte par les médecines cxinlraires ' 

III . — D'une perturbation qui survient aux yeulx pour raison 

DE LA dicte obtalimie *. 

Et derechief encores disons nous que a occasion de ladicte 
obtalimie il y a pluseurs pacient qui sont perturbés es yeulx> et 
ne voient pas bien por raison de ce qu'ilz ont les yeulx plains 
ainsi comme de fumosité ou d'autre nuysance. Car ce leur sur- 
vient par mauvaise garde, pourcequ'ilz usent et maingent aucun 
contraire de pluseurs et maies viandes, quant leur dite maladie 
leur rengne, et souffrent la douleur es yeulx et leurs vices: c'est 
assavoir que leurs yeulx leur larmoyent. 

Et se ainsi e.'^toil que telz pacient vausissent vostre cure : pre- 
mièrement que tu leur purge le cervueil avecques les pillulcs qui 

I Propler quod aliquando oculi liquéfiant et exeunt cum Iota coacavitale exlra 
palpœbros : el asli taies ioQrmi nuaquam videal. Unde de istis dicimus, quod 
postquam ad lalem stalum perveaeruat, nulla mediciua potest eis prodesse, eo 
quod oculus est commotus et separalus a suis membris, et est mortiûcatus cum 
tola sua substantia, 

- De quadam iiiQrmitate qua) generalur in oculis propter obtalmiam : videlicet 
de caligiao, et obscuritate oculorum. 



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— 50 — 

s'eDSuivent : R. polipodii quercioi, esule, mirdbolans citri, Reu- 
barbi "Si. 3. i. El mesles tout ensemble et loscoofls cum lacté 
sicoDQorum ', et en formes pillules desquelles tu donras au pacient 
selon la possibilité de sa puissance pour les recevoir. Et quant la 
purgacion sera faicle, donne luy devers le soir dyaolibani Irssi- 
tario. Et dedans les yeulx vous mectrez de pouldre de alixandre 
jusques à ce qu'il soit plaiuement curer ; et que il se garde bien 
de viandes contraires ^. 

IV. — Des Panniculez. 

Et maintenant nous commencerons de parler des panniculez 
qui se engendrent es yeulx par habondance de sang. Doncques je 
dis que les panniculez se engendrent en pluseurs et diverses 
manières : et premièrement pour raison de maie garde ; secon- 
dement pour pluseurs douleurs qui pevent survenir ou cbief, 
parle moyen desquelles douleurs la mygraine advient et descenl 
es temples et en surcilz, et fait soner les voines, et pour raison 
dicelle pulsacion les yeulx geclent larmes, et par le moyen de ce, 
les pannicules qui sont engendrées apparent es yeulx de diverses 
manières. 

Et dit ainsi que le premier panaicule appert es yeulx ainsi 
comme grains de milet dessus la luniquo ; et do pluseurs est 
appellée gratarici, et d'autres est appelée pictalele, et à Naplez 
est appelée canlure, cl dise bien car à l'occasion de la grant dou- 
leur qui vient desuperfluile de sang, elle concave '. 

1 Nous avons adoplô sicomorum au lieu de cilomorum que portait le texte. Le 
manuscrit provençal porte : iact de succaniors : le texte de Breslau : lac sicomo- 
rum. 

^ Complevi vobis tractatum de cura obtalmia). ol aliarum divcrsarum iuûrmi- 
lalum quED in oculo remaiicul propter oblalmiam, et curam eliam probatam a 
quitlihnt illarum inl^rmiljilum de per se,sccundum quod ars nostra vobis démons- 
Irriviu 

^ lu mullia ÏQùh vucaiiliir gutatici, iu aliquibus aliis pidatelle vel pictacolle, in 
iwirtibîts Ajtpulifle vo<^nntiir carrature ; et omnes in hoc bene dixerunt, propter 
^uoîl muto iujMjrUuLîatCii ^nguinis consurgunt in oculis cum magoo dolore. 




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— 51 — 

La seconde pannicule est qui appert dessus la tunique en 
manière descaille de poisson * . 

La tierce pannicule appert de li partie de uvea de Tueil, ainsi 
comme se estoit ung Qoc de nege qui se feust assemblé 
ensemble. 

Le quart pannicule est quant il apport aucuneffois tout le blanc, 
et que nulle tache de noir ne appert au lieu ne à la tunique, ne à 
la lumière. 

V. Du PREMIER PANNICULE ET DE SA CURE. 

Je dis doncques que quant tu verras le signe es yeulx, c'est 
assavoir un grain de mil concave, garde que tu ne mecles nulles 
médecines dedans les yeulz ne (loliors, pourceque ceste maladie 
ou inSrmilé ne peust estre curée avecques médecine laxative, ne 
avecques poudre, ne collyres, ne cautaires; car toutes ces cho- 
ses nuisent es yeulx. 

Mais fait ceste cure moult glorieuse que cy après sensuit qui 
est ainsi faite: R. XL. cymaz rubri et sint lenere et pista eas ad 
modum sale, et deux ib de bon vin blanc, et ai i de rude, et 
§. IIII de flour de camomille qui soit seiche ou verde, et de la 
pierre qui est dicte alabauslrum tb. h^ semeu feni % . I, olei rosa- 
rum tb, L, cere 3. L El puis incorpore bien toutes ces choses 
ensemble, hors la camomille et la cère, et pillez bien tout 
ensemble : et puis après tu meclras toutes ces choses ensem- 
ble et les pilles bien et puis tu les mectras en une oie neufve 
dessus petit feu, et bouille tant et si longuement que tout le vin 
soit consummé tant qui le semble que tout frise. Et puis après 
fay que tu ayes VI albums d'enfz, et les mesles avecques les 
choses dessusdicles, jusques à tant quMlz soient bien conformés, 
et puis les colle par ung drap de lin. Et se qui en fauldra est un 
oignement précieulx qui est nommé vulgairement alabaustrum, 

iSecundus paaniculus ul superius dixi, est qui apparet supor tuaicam ad 
modum caliginis, vel lentiginis, ad simililudiaem unius squamœ pisci.?. 



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— 5-2 ^ 

car a'msi nous Tavons appelle et nommé pource qu'il n'y a son 
prix au monde à qui le puisse comparer. 

El avecques lodict oignement lu oindras le front du pacient el 
les temples jusqu es au surcilz : et celle onction curera et garirera 
toute la douleur *. 

Kt te dis que non tant seulemenl elle vault aux paniculez, mais 
aussi en quelconque lieu où il aye douleur, aussi ou cbief, el 
aussi en tout le corps, ainsi comme sont les piez, les mains, et 
les autres membres ; car ce ainsi est que le pacient se oigne 
dudict oignement, lantosl de la douleur qu'il aura il sera garir 
de toutes maladies qui! lui pevent advenir. Et aussi nos avons 
trouvé plusieurs femmes qui avoient grande douleur do pluseurs 
maux qui surviennent à la maire, auxquelles donnons à menger 
et user decesluy oignement en forme et maoière ainsi comme ce 
esloitclectuaire, et aussilost qu'elles en avoient usé, elles estoient 
délivrées do toutes leurs maladies el douleurs, sans que jamais 
elles faussent plus tormenlées de ladicle maladie. 

Et semblublement nous eu avons veu pluseurs tant bommes 
come femmes^ qui avoient grande douleur et maladie à reste- 
mac, et nous luy en faisions oindre ledicl estomac et les rains 
dudict oignement, et incontinent ils estoient gariz et délivrés de 
ladicle maladie. Et certainement il vault aussi à toute douleur 
de migraine, el à toute maladie des yeulx, quant on en froute 
et oing ou le fronc, fort et souvent, et aussi les temples et les 
snperScillia ou surcilz. 

VI. — Du SECOND PANNICULE. 

Le second panniculo est celluy qui appert dessus la tunique 
des yeulx, ainsi comme en manière d'escaille de poisson. 
Pourquoy je dis que se tel pannicule n'est curé au commance- 

1 Cerlissimo ex quo Deo placuit quod hune ego librum componerein, nolo ea 
abscondere quae antea in secrelo tenebam. Propler quod vobis dico per Deum 
veruoi quod UQgeatum allabastri virlules habel iafinitas. 



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— 53 — 

ment de la maladie avecques les cures que nous avons à dire, 
jamais il ne pourra pleinement estre curé en manière qu'il puisse 
bien veoir. El se lu ne lascez eslever avecques la ungccion, et 
tu la tranches avecques le rasor, tu ne la sauras si subtilement 
trancher ne fendce, que tu ne mectes à distruction toute la sub« 
stance deTueil. 

Et par ainsi je vous conseille que vous ne soyes point convoi- 
teux de prandre et recevoir telle cures, quant elles ne sont fres- 
ches,et que elles sont endurcies, car jamais vous n'y pourres avoir 
honneur. 

Et doncques nous avons dit que icelle pannicule, au comman- 
cément se peult curer quant il se encharne dessus la tunique 
sanalelle, maiz devant ce quelle s'endurcisse ; sa cure est telle qui 
sensuit : tu feras ton cautère aux temples, du cautère ront, car 
ce que le feu actrait il dissoult et consume, et le permet bien 
curer entièrement car il consume et clarifie du tout Tueil. Et 
quant tu auras fait tout cautaire, tu mectras dedans Tueil de la 
poudre nabatis. Et dautre part tu prendras quatre pommes, et 
les feras cuyre bien dessoubz la cendre ; et ce fait, quant elles 
seront bien cuytes, tu les nectoyeras Iresbien des escorces, puis 
tu prandras la moelle dicelles et la pilleras fort en ung mortier 
d*arin ou de loton ; et avecques ladicte moelle, tu mesleras la 
glaire d'un euf^ et incorporez bien tout ensemble jusques à tant 
qu'il soit bien meslé, et soit fait en manière de oignement duquel 
tu mectras dessus estoupes, et le emplaslieras dessus l'ueil : mais 
tu feras quil soit clos et serré, et puis le lye dune bande^ et fay de 
cestuy appareil II fois le jour ; et par ceste manière tu cureras 
ceste pannicule. 

VIK Du TIERS PANNICULE* 

Et du tiers pannicule* tu feras la mesme cure qui esl déclarée 
dessus du second pannicule, mais tu adjousleras avec la poudre 

* Gomplevimus vobis de primo et secundo paaaiculis, et diximus vobis causas, 
sigaa, accideotia et curas. Nuao volo vobis dicere de tertio panoiculo qui apparet 
8ub tunica oculi ad modum unius llochi aivis quaodo niogit. 

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— 54 — 

Dabalis cesle médecine qui vault coDtre très graot blancheur des 
yeulx, car elle donne couleur noire à la tunique, et difforme la 
macule en ungjour. 

Il sensuit la cure : R. tertiam parlem l. i. boni ligni aloes, et 
habeas scubellam novam quam impleas carbonibus vivis, et pone 
lignum super carbones. El que ayes ung bacin à barbier ou one 
bassine bien necle : et couvre tellement le bassin que toute la 
fournée soit réservée dedans le bacin ; et quant toute la fumé sera 
ainsi réservée, comme dit est, tu prandras 3. î. de pulvis* 
nabetis, et la mesles avecques la fumée qui est audit bassin, et le 
incorpores bien ensemble. Etdîcelle pouldrebien meslée tu mec- 
tras dedans les yeulx, et puis par-dessus tu mectrasTemplastrede 
pommes, ainsi comme devant est dit. 

Et noclez que la poudre nabjtis ce fait de sucre nabet, ou de 
sucre candy, ou de sucre dalixandre^ qui est toute une mesme 
chose, et de pouldre faicte de ancheram, qui est jaune, de la rose 
blanche ; et les incorpores bien tout ensemble, et dicelle pouldre 
tu pourras user en pluseurs et diverses manières, et est merveil- 
leuse contre la panniculo des yeulx: premièrement, car il moUi&e 
lez pains des yeulx; secondement, car elle mitigue la douleur; 
tiercement, car il dcstruit toute la rougeur des yeux ; quarlement, 
car il corrode le pin et toute la macule des yeulx ; quinctement, 
pour ce qu'il conforte les yeulx, et si aguise la veue ; la YId, car 
elle constrint les termes scelles sont de humeurs froide. 

Et est cesle pouldre tant seure que elle proffite à toute inflr- 

> La poudre nabatiae, laquelle Bieaveou fnit de sucre candy, on cassoonade, 
esl en cecy précieuse, car elle ramolli et neUoye saos douleur; et pour ce elle est 
appelt^e eclaircissanle. El quand ou y mêle de la fumée de k>oi8 d'alces, elle est 
fort coo/ortalive (Guy de Ghaaliac, pa^;. 480). 

Poudre de Bienvenu (qui est aussi la mienoe) pour toutes taches : PR. sucre 
Tandy une once^ tuihie préparée deroy ouce, soient pulvérisez et |wiitris avec de 
l'eau 1 ose ; puis espandu dans un bassin. L^ bassin soit renfermé sur la Aimée 
du bois d'aloea et d'encens S,>it desséché et subtilement pulvérisé. Cette poudre 
soit conservée en une bouetle d'airain. On en metlra aux yeux avec uue esprou- 
\elie d ar^^eut. (Guy de Cbanliac. Ed. de Nicaiàe, pag. 001}. 



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^ 55 — 

mile des yeulx et ne fail nuysance à nulle chose. Et diz première- 
ment que elle moliffle pour raison de sa grant humidité. La IP 
est quelle mictigne pour raison de sa grant doulceur et suavité. 
Tiercement, elle destruit toute la rougeur des yeulx po'jr raison 
de sa qualité bien purifQé. Quartement, elle corrode par sa grant 
duresse, car devant ce quelle dissolve en la puissance de son 
accetousité, elle corrode lepannicule. Quinclemenl.elle conforte 
car se aucune chaleur ou ardeur est es yeulx, elle la purifûe et 
clarifQe la veue, et si vivifie lesperil visible. La VI" est car elle 
constrint les lermes, se elles sont de humeurs froides, car pour 
raison de sa chaleur elle actrempe celte fumosilé. 

VIII. Du QUART PANNICULE. 

Le quart est quant les yeulx appèrenl tout blanc, et ne voit on 
aucunement ou lieu nulle chose noire ne dessus la tunique, ne 
ouUe lumière apparent en TueiLEtse advient pour raison de une 
très grant douleur qui descent par le mylicu de la leste avecques 
grant fureur, et environne Tueil tout alentour, et à loccasion de 
ladicte douleur Tueil se blanchist ainsi etappert quasi ainsi luysant 
comme albastre. Et le pacienl des ceste heure là en avant ne voit 
point, maiz dit quil luy semble quil voit tout le monde blanc, et 
porrait discerner ni diviser une chose de lautre. Et les yeulx 
lacriment, et plorent tousiours, et toute la naturelle blancheur de 
Tueil se appert toute rouge à lenviron la tunique blanche. 

Vous avez oyr les causes, accidents et signes du quart panni- 
num et de présent il nous convient veoir la cure dicelle qui est 
telle* : R. XII albumina ovorum, et pone ipsas in sculella nova 
et ab aliquo stipile duca eas usquequo revertantur in spumam, 
post dimicte aliquanlulum residere et post prohiciatur spuma. Et 
puiz tu auras du coton et le moilleras dedans la glaire demourOe 

( Fiat primo cauterium ia summiiate capilis la loco ubi coojuagitur commissura 
sagitalis cum coronali, secuadum quod videbitis ubi de cauleriis Iractabimus ; 
Aicto caal6rio..« 



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_ 56 — 

et nesloyéd Tescume demeurée, et le emplastre dessus Tueil qui 
soit clos et serrer. El fay ce préparatoire par chacun jour X foiz, 
et la Duigt autant; et fay ce par si long espace de temps que le 
pacient parviengne à santé. 

Et avecques ceste médecine cy tu cureras le quart paninum et 
non pas en aulre médecine; pourquoy je vous admoneste et 
eoorte que vous procédissiez selon cest art cautement. 

Et vous gardes que dessus le pannis nulles autres médecines 
vous ne présumies de mectre, sinon que celle que nous avons dit 
cy dessus ; car ces pannis ou pains ne se doivent point curer avec- 
ques médecines corrosivez, car en ce faisant, vous y dcnnrez plus 
grant douleur que vous ne feriez de cure. 



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CHAPITRE V. 

Le Vb« chapitre est des mala4ies des yenlx qui procèdent 
à roccasion de flenme. 

I. — De la première infirmité qui survient dans l'ueil par 

RAISON DES LERMES. 

Les maladies qui survienoeot es yeulx à roccasion de fleumes 
procèdent en pluseurs oiaoières, car par fleume à pluseurs pro- 
cèdent et surviennent les termes es yeulx, desquelles lermes se 
engendrent trois grisves et diverses maladies. 

Pource je vous dis que pour trop grand cource et influence 
de lermes à plusieurs personnes les paupières souverayne tanlost 
se mollifient, et dedans la partie inlérieuse naissent aucuns poilz, 
et iceulx poignent la pupille de Tueil. Et à loccasion de celle 
poincture les yeulx sont conturbéz et pleurent à grosses lermes, 
tellement que les yeulx font tant de douleur au pacient, quM ne 
les puet ouvrir jusques à ce que tous iceulx poilz soient arrachés 
avecques les pincetes. Et quant ils sont une fois ostéz et arra- 
chez, ilz renaissent de nouvel ; pourquoy le pacient retourne à 
plus mauvais estât qu'il n'estoit par devant. 

Et la raison est, car quant les poilz se arrachent, il en naist et 
en croit de plus gros, et pour ung que on en arrache il en croist 
quatre qui poignent et tormentent les yeulx pluffort que devant, 
ainsi comme s'il estoient poilz de porceau. 

Et à loccasion de celle poincture les yeulx sont si grandement 
perturbés et rougissent tellement, que le pacient ne peull ouvrir 
les yeulx. Et pluseurs à Toccasion de celle poincture et à l'occasion 
àe ce en perdent la veue. 



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w,glJ.W> " JUJ- ' > 



— 58 — 

La cure esl lelle : prent deux aguilles qui soient longues à la 
mesure du petit doy, et par le pertuis d'elles tu enfilleras du filet 
lequel tu joindras ensemble tant comme tu pourras ; et puis tu 
lèveras la paupière dessus avecques ton doit, et avecques les 
aguilles, lu prendras la pel avec la conjuction de la paupière ; et 
puis lye Taguille tellement que le pacieut puisse ouvrir et fermer 
Tueil. Et en cesle manière tu lesseras les aguilles ainsi fermement 
liées ausdils poilz/ jusques à ce ils cheant et tombent par eulx 
raesmes en la conjunclure de la paupière. Et après ce que les 
aguilles seront tombées, ne met point de médecine en la cicatrice 
que Taguillea faicte que par soy mesme elle cherra et se garira. 

TouleÊFois se aucuns pannis se engendroit os yeulx pour raison 
de la pulsacion des poilz, médecine la avecques la poudre nabatis 
deux fois le jour, et fait tant jusques à ce que les yeulx lui soyent 
parfaictement clarifBéz : car en cesle manière nous curons et 
avons pluseurs foiz curer lesdites maladies dessusdict. Et avons 
plus trouvé de celles maladies en Calabrequeen nul autre lieu ne 
pais, et signe plus lesdiles infirmitéz es femmes que es hommes. 

II. — De LA II® INFIRMITÉ QUI SURVIENT EN l'UEIL PAR RAISON 

DES LERMES. 

La 11* infirmité, qui survient par raison des lormes qui sur- 
viennent par fleume \ et celle qui advient quant les yeulx appa- 
rent troubles et plains de vaynes et de pains, et le pacienl ne voit 
pas bien. 

Toutefi'ois quant telle maladie survient au pacient, la cure est 
telle : Premièrement fay luy rèzé tout le chief, et puis luy fays 
un cautère rond à la partie molle de la teste, et es temples fait 
ung autre cautare du cautère long. Et quant tu auras fait les cau- 
laires, tu luy meclras dedans les yeulx de notre poudre de alixan- 

^ El vocalur ista inflrmilas pannus vilreatus ; et hœc sunt signa et accidcnlia 
secundse inflrmitalis, quœ procedil seu goneralur propter abundantiam lacbrima- 
rum iû oculis, et propter causam llegmatis. Modo pooimus curam ejus. 



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— 59 — 

dre ou nabalis chacun jour une foiz, jusques à ce qu'il aye 
recouvrer sa luœière ; et aussi que chacun mois il soil purgé 
avec nos pillulles irslitam., et quant il vouidra entrer ou lit, 
qu'il preigne de notre dyaolibano qui est dessusdictdeclairé. 

El avecques les choses dessusdictes vous curerez bien et par- 
faiclement tous paciens de ladicte maladie * . 

III. — De la tierce infirmité qui survient en l'ueil pour 

RAISON DE LERMES. 

La tierce inQrmité est quant tout rucil se monstre cbarneux ou 
plain de cher; et ce icelle cbaineusilé est tousiours cilrine par 
l'espace d'un an ou de deux, et est endurcie. 

Quant tu verras et cognoislras ladicte malalie, il ne les le 
fault point curer avec pouldre no collires^ car ce ny proffileroit 
riens, mais premièrement faicles luy rèzé le chief, et puis faictes 
les cautaires ainsi comme je vous ay enseigné en la seconde infîr- 
milé et cure. Et quant vos cauleires seront faiz, vous ouvrerez 
Tueil du pacient avecques votre doy, et toute la charnosité de 
dedans vous couperez et osteres si très subtilement et en telle 
manière que la tunique sanatelle vous enccommencés à tailler 
petit à petit entre la blancheur et la noirdeur, jusques à ce que 
entièrement vous ayez eslevé toute la charnosité. Et quant vous 
aurez bien nectoyer Tueil de celle charnosité, vous prandres de 
la pouldre de alixandre devant dicte, et tout Tueil sans aucun 
moyen ne contradicion vous le amplirez dicelle pouldre, et que 
le pacient ferme bien Tueil'; et par dessus vous prandres du coton 
que vous baignerez en glaire d'euf,et le mectres dessus Tueil. Et 
ceste em piastre vous feres chacun jour deux foiz le jour, et le 
continues en le renouvellant jusques à XV jours. 

1 Gum enim isto modo curse sanabitis secundam iofirmitatem qua) in oculis 
goreratur propter abundanliam lachrymarum ex causa flegmalis ; eo quoi cum 
isto modo curas mullos homines jam saaavimus. et plures ex islis inflrmilatibus 
iaveoimus in partibus Tuscisc et Marchlse quam in aiiqua alia provincia. 



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— 60 — 

El quant ledict terme sera passé, vous laisseras à mectre ledict 
amplastre, et avec ceste très sainte herbe que nous appelons car- 
delain» et les sarrazins cuffusam^et les gréez zuccam, et les appu- 
lians carducellam benedictam, et ceux de Cirterne lactucam, et les 
romains crispam, et ceux de Tuse chicerbitam, car Dieu a ordonné 
cesteberbedelaquelleil se fait moult belles cures,prenM.i.diceUe 
herbe et la pille bien en ung mortier ; et puis adjousle dedans une 
glaire d'euf, et après la met dessus colon ou dessus esloupes, et 
puis la emplastre dessus Tueil, et ladicte emplaslre tu feras deux 
foiz le jour, le matin et le soir. Et puis vous userez des pouldres 
qui sensuivent, et les meclres en Tueil du pacienl jusques à ce qu'il 
soit venu à santé et à son premier estai. Et puis tu mectras en 
Tueil de la poudre dalixandre et au soir de la pouldre nabatis. 

Mais» louteffois, garde soy celluy ou ceulx qui sont entachez 
de cette maladie de vrandes contraires, ainsi comme beuf, an- 
guilles, de^boc, de.chiévre, de aignel, de porc, de cher salée, et 
semblablement de fromages et de cèbes crues, d'aulx, de por- 
reaux, et de toutes autres choses froides : cocombres et leurs 
semblables. Et ceux qui ont été entaché delà dicte maladie nous 
en avons plus trouvé et plus grande quantité en Sardaigne que 
autre pari. 

IV. — De la quarte infirmité qui advient pour trop grande 

HABONDANCE DE FLEUME SALSE. 

La IV^ infirmité de la maladie des yeulx est quant les yeulx 
deviennent enflex et apparant gros, elle pacienl ne peut pas bien 
ouvrir les yeulx pour la pondérosilé des paupières souveraines 
des yeulx qui les chargent trop, pourquoy ils ne pevent pas bien 
veoir. 

Parquoy je dis que si vous voulez eslre bien purgez ne garis 
de ceste maladie, renverses la paupière haulte avecqnes le doy, 
et vous la verres ainsi comme toute grâce : et s'il appert 
ladicte grosse pleine de grains ainsi comme se estoient grains 



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— Gi- 
de miletS sachiez que cecy advient par grande babondance de 
fleuoie salse. 

Et quand vous verrez ladicte inQrmité qui sera survenue au 
pacient, vous deves incontinent purger le chief du pacient avec 
nos pillulles qui sont faictes par cesle manière : R. turbicb, aloen 
epalici, reubarbari an S. fi. succi ebuli ib. i. et dissolvatur cum 
preditis et post dimictalur sic per unam noctem. Et devers le 
naatin tu le colleras, et puis en donneras au pacienl user de cette 
colladure. 

Et au soir dapres tu mectras la main en Tueil du pacient, et 
lui renverseras la paupière avecques ton doy, et puis cope celle 
cbarnosité qui est dedans avecques ung rasoir, et fait tint que tu 
lièves et oste toute icelle gresse entièrement qui appert plaine de 
grains sur la paupière, et quant lu aurns bien tout levé et bien 
nectoyer, tu prendras du coton que tu tremperas avecques glaire 
d'euf et le emplastreras dessus Tueil, et continue II fois le jour 
jusques à IX jours, et semblablement mectez en dedans Tueil. Et 
après les IX jours tu mectras le coUire qui restraint, jusques à ce 
que le pacient soit parfaictement curé. 

Et avecques ceste cure nous en avons curer iunumérables ; et 
de ladicle maladie nous en avons trouvé plus grande quantité ou 
pays de Barbassa ^ les sarrazins que autre part ^. 

Et de présent je vous vueil enseigner ung très merveilleux 
électuairo que j'ay composé pour les lermès des yeulx qui empes- 
chent à Toccasion de la fleume qui il survient. El se fait ainsi : 

< Et haoc iatirmiiatem arabes et saraceoi vocaat Laraf miaor, quae dicilur sca- 
bies oculorum. 

* la partibus Barbariae infra saracenos. 

2 Dum enim essemus in portibus illis, multas iaveaimus mulieres saracenas 
qufo istum modum curae operabantur in hune mo'Ium: nam accipiebaat folia 
ficus, et inversabaat palpebras superiores et fricabant eas cum illis foliis, donec 
palpebrad efQciebaatur sauguinolentas. Multos eoim saaabaDt dictae mulieres cum 
illo modo cura). Sed non remanebant diu in illo statu. Multietiam aiii accipiebant 
zucliarum, et fricabant eum super illam granulositalem, propter quod aliqualiter 
convalescebant ; sed infra paucos dies ad statum primum revertebanlur, eo quod 
non curaU fuerant secundum arlem uostram probatam. 



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— 62 — 

R olibani, boni castorei, oucis muscale, nucis indice, gariofoli, 
croci,cârdomonii "Si. s* i* Ainsi foIiorumlauriySpiGenardi.nepi- 
telle succe, pullegiiysopii, semen rutho, "str. 3. qartatn * ; semen 
jusquiami, papaverisalbi,musti, camphoro 'S'3. ii. j.Meslezbien 
tout ensemble, et les pillez fort ; mectez les ensemble, mais pre- 
mièrement vous devez faire boulir le olibanum avecques bon miel 
qui soit bien escumé et liquéfié avecques ledit olibano, et puis les 
meclez bors du feu, et mectes dedans une escuelle ledict olibano 
et miel ; et puis vous prandres les espicez dessusdict, et les incor- 
pores avecques le miel, et puis en faictes de bien petis magda- 
leous à la grosseur d'une cbaslaigne. 

Et noclez bien que cestuyélectuaire est moult merveilleux pour 
les lermes restraindre, et si reslrainl la fleume et escbauffe le 
cervuel, et boute bors la douleur de la migraine, et ouvre les 
yeulx, et esliève les surcielz, et clariffie la lumière, et cure para- 
lisie, et si cure aussi iceulx qui sont empeschez en leur parler 
qu'il ne pevent former leur paroUe. El de toutes les choses des- 
sus dicte nous en avons curez innuroérables en notre temps en 
pluseurs et divers pays et contrée. 

1 Quartam partem unciœ. Le quart d'uae once. 



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CHAPITRE VI. 

Le VI ">e chapitre est de la passion des yeulx faicte ponr raison 

de collére. 

I. De LA l« INFIRMITÉ DES YEUX POUR TROP GRANDE IIABONDENCE 
DE HUMEUR DE COLLERE. 

 Taidô de Dieu lout puissant^ en continuant doresenavant 
notre petite euvre et pratique, nous voulons parler des infirrailez 
et maladies qui surviennent aux yeulx pour raison de la complec- 
lion de collère qui babonde en grande quantité de humeur de 
collère ou corps de la créature. 

Dont la première maladie survient de la fumosité de la collère 
qui est en Testomac, et icelle fumosité en résolvent monte jus- 
ques au cervel avecques grant sueur et ardeur, et à Toccasion 
dicelle douleur les yeulx sont fort couturbéz, tant qu'il appert 
entre les yeulx du pacient ainsi comme umbre, nonobstant que 
les yeulx demeurent clers et apparant beaux, en telle manière 
quMl ne semble pas qu'il y aie aucune macule : pourquoy je vous 
dis que le vice ne appert point ne procède des yeulx, mais de 
l'estomac et du cervel. Pourquoy esse que les yeulx sont clers et 
dehors nulle pouldre ne collire ne proffiteront nullement aux 
pacient qui ont cesle maladie pource quelle corroderoyenl toute 
la tunique; et se elle estoit corrodée, elle desseicheroit moult la 
ruine par tout le chief. 

Dont la cure de ceste infirmité est telle : tout premièrement 
tu purgeras le cervel et l'estomac des humeurs dont vient la 
obombration, car, en cessant la cause, les actidens cessent ; et 
feras ladicte cure avecques le syrop qui s'ensuit : R. reubarbi, 
esule minoris^ sandalli rubei, mirobolans citri il. 3 . i. agarici i . 



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— 64 — 

qnarlam ; speragii, petro apii, cicoree, cappilli veneris an. M. i. 
Meslez toutes ces choses eosemble, el les fait boulir en eaue. Et 
avec eux lu adjousteras j. IL polipodii quercini, et tu les fais 
boulir si longuement queTeaue se desseicbejusquesà lamoilié. 
Et après lu le colleras, et dedans la colladure tu adjousteras les 
espices dessusdictes bien pulvérisiés, et tb. ii. de bon sucre; et 
en soit fait syrop laxatif. Mais je vous dis bien que quand les 
espices dessusdictes seront mises aveeques le sucre, vous deves le 
faire boulir ung petit peu ensemble^ car aultrement il perdroit sa 
force ; et quant elles auront ung petit boulir, vous les collerez 
autre foys parmi Testamine. Et de ce vous donrez à votre pacient 
à boire chacune sepmaine deux fois, et semblablement tu luy 
donras dicte, qu'il se garde de mangé viandes contraires et aigres, 
ainsi comme sont grosses chers qui engendrent fumositéz, et 
aussi de viandes qui sont de dure digcscicn. 

Et d'autre part après lu luy feras ung cautère près des aureilles. 
Car par telles manières nous avons curer ceste maladie par plu- 
seurs foys en pluseurs et diverses régions, car il n'est autre plus 
seure cure pour ledit cas. 

II. De la II* INFIRMITÉ QUI SURVIENT A l'oCCASION 
DE LA COLLE RE. 

La seconde infirmité et maladie qui survient es yeulx à l'occa- 
sion de la collere, est celle qui appert dessus la tunique des yeulx, 
devant la lumière, ainsi comme neble espèce en l'air cler. Pour- 
quoy saichez que icelle infirmité ne empesche sinon ceulx à qui 
coUere donne quant le patient a Qevres, car quant la fièvre cesse, 
icelluy vice y demeure pour raison de ce que le pacient n'a pas 
bien esté curer au commencement de ladicte maladie. Et si ?c 
doit aussi garder de contraires, ainsi comme avons dit en la 
précédente infirmité en ce mesme chappitre. 

La cure de cette seconde infirmité est telle qui sensuit : R. 
lapidem quemdam sapbirus et tere ipsum subtiliter in morlario 
ereo, et la pouldre tu résolveras en ung vaceau de voirre, et 



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— 65 - 

dicelle pouidre tu meclras dedans Tueil du pacient une foys le 
jour : et dedans brief temps il sera plainement délivrer et garir 
de ladicte maladie. 

Item ; une autre à ce me»me : R folia taxi, et sica, et in pul- 
veram reducatur.El dicelle pouidre tu mectras en Tueil du pacient, 
et il sera délivré de ceste maladie. 

Item; autre pouidre ordonnée pour ceste mesme maladie : R. 
gommi feniculi S. IV et très partes minus S pulveris nabalis; et 
quant tu vouldras faire ladite pouidre, premièrement, tu pulvé- 
riseras la gomme, et après que celle sera bien pulvérisée, tu 
incorporeras dedans la pouidre nabatis, et adjousteras tout ensem- 
ble. Et dicelle mixtion tu mectras dedans les yeulx. 

Et saicbez que cesle pouidre a les vertuz belles et bonnes pro- 
priétés qui cy après sensuit : et premièrement, elle corrode le 
panninum ; secondement| elle moilliQe Tueil et le garde; tier- 
cemenl, elle le clariffie; et quarlemenl elle conserve Tueil jus- 
ques à la fin de la vie. 

Pourquoyje vous dis que certainement que dessus la gomme 
du fanoil, Ypocras et Gallien et tous les anciens médecins sont 
tous concordans ensemble^ et tiennent icelie gomme pour très 
bonne et baulte médecine pour les yeulx ^ Et vous dis que quant 
cesle cy est bien mise à point et bien explactée, elle fail une mer- 
veilleuse opperacion ; et dicelle nous avons fait de merveilleux 
effect en nostre temps. 

* £t non est mirandum si apposita in oculis facit oculos oplime videre quia, 
ipsi dixerunt quod si in manu teneatur deberet maaus videre. Ipsi enim non dice- 
baot de gumma, sed potius de feniculo, eo quod manifestare noiebant, ubi esset 
virtus vera. Nos vero manifestavimus vobis illud quod ipsi tenebant ocultum, eo 
quod solum modo laudabant vobis herbam et non gummam, scientes in quo erat 
vera virlus ipsius feniculi. Sed ex quo Deo placuit quod per nostrum exercilium et 
arlem nostram probalam ejus virlutem cognosceremus, ipsam vobis voluimus 
libère manifestare. Gum enim ista sanctissima gumma multos saoavimus ; vobis 
etiam et nobis manifestum est iilud quod multis homlnibus fuerat occultatum, et 
scripsimus vobis virtulem istius gumma) ut ipsam cum salule inûrmorum et animai 
vestrae possitis operare. 



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CHAPITRE VII 

Le VII<°« chapitre est des passions des yenlx qui surviennent ponr 
raison des hnmenrs mèlencoliqnes. 

I. De l'opillacion du nerf optique. 

Ou nom de Dieu et de la glorieuse Irinilé, nous voulons dire 
des maladies et inSrmitéz des yeulx qui surviennent pour raison 
de méleaeolie. 

Et dit ainsi que à cause de trop grande mélencolie et de l'abon- 
dance qui vient d'elles aucune, le cervel est trouble en manière 
que le nerf optique est en telle manière opillé et degasté, que 
Tesperit visible ne peut passer droictement à la pupille, et appert 
devant les yeulx du pacient au jour ainsi comme moiches qui 
voulent par Tair devant ces yeulx . Et quand il regarde ferme- 
ment, il luy semble de une chose que ce soyenl quatre, et ainsi 
des autres choses. 

Pourquoi saicbez que ceste maladie cy advient plus à ceulx qui 
naturellement sont mélencoliques, et mesmement quant ilz vien^- 
nentsurTaage d'encienneté qui ne font à ceulx des autre condi- 
cions. Et ce vous trouves telles maladies en aucuns paciens, gar- 
des bien que vous ne présumes à mectre en Tueil aucune chose^ 
mais que vous fassez ce électuaire qui soit restaurans et humec- 
tatif, à co que les nerfs qui sont ditz concavez, qui sont opillés, 
puissent estre augmentez et ouvers pourtant que l'esperit visible 
puisse tosl et legièrement passé. 

Lequel électuaire est fait en ceste manière : R. succi liquiricie 
tb* fi* semen ruthe, basiliconis, urtice vera marine vel sicciliane, 
semen feni alexandrini id est macedonici, apii, carvi, granorum 



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— 67 — 

rase cilODiorom et pomorum, eufrasie, sileris monlani, ii. j. 
II. masticis,garioSli, cubebe domcsticis, nucis muscate, et amyg- 
galarum dulcium, gommi arabici, gomtni serazorum,dragagaDti, 
gommi pioi, cynamomi, trtr. j.i.Et puis iacorpore toutes ces 
choses ensemble et les pilles bien en ung mortier, et eo faictes 
pouldre subtile laquelle vous coaQres après avecques bon miel 
escumé, ou avecques sucre, et en soit fait élecluaire. Et d'icelluy 
vousdonrez user au pacient matin et soir quant il aura dormir, 
car en la continuant il te réservera la lumière que tu désires. 

Et non tant seulement ledit électuaire proffite à la dite maladie, 
mais aussi à ceulx qui ne voyent point cler et qui ont ainsi 
comme chassie es yeulx ; et vault aussi à ceulx qui souffrent 
passion et lermes des yeulx par force de douleurs et de jeûner 
et defatigacion du cuer, et aussi par extorcion de foyeet leurs 
semblables. Et s'apelle ce élecluaire cy proprement déclaracion 
des yeulx, car de soy il clariffîe la lumière des yeulx, et aussi 
vivifle Tesperit visible. 

II. — Dk la II* INFIRMITÉ QUI SURVIENT POUR RAISON 
DE MELANCOLIE. 

Nous disons aussi que aucuneffois monte douleur inlollérable 
aux yeulx pour raison de douleur mélencolique, laquelle douleur 
vient si subitement et soubdainement, que il semble au pacient 
que les yeulx saillent dehors la concavité et de la fontaine d'iceulx, 
et appèrent les yeulx ainsi comme enflés outre mesure. Et plu- 
seurs par ceste occasion perdent la vue totalement, et aucuns 
autres cy voient, mais c'est bien petit. 

Mais vous devez savoir que telz pacients pevent eslre curez, au 
commancement de la maladie par la manière qui sensuit : et pre- 
mièrement, il convient purger fortement Teslomac du pacient 
avec nos pillulles dont la forme sensuit : R. aloe epalici, mira- 
bolans citri, turbicb, sanlalli albi, reubarbi, croci, balsami, 
mirre, masticis, ligni aloes, olibani albi, nucis indice, succi 



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r- 68 — 

jiquiricie, semenapii, lacluce, cicoroe, basilicono 'Si. S. i. Mes- 
lez loutes les choses dessus dites ensemble, et en feres pouldre 
eo uDg mortier qui soit bioa sublille, et puis vous la coûQres 
avecques zus de roses seiches, et dicelle pulvere lu donneras au 
pacient selon que te sera advis qu'il aura puissance de les prandre. 

Et quant vous aurez purgé Testomac et le cerveil bien habon- 
damment, vous mectrez dessus Tueil de ceste emplastre qui est 
bien louable dont la forme est telle : R. unum pommum acerbum 
et sub cinere calido cocatur. Et la fait si bien cuyre quelle soit 
bien grandement moUiffié, et puis tu la nectoyeras bien des 
grains et de la pellure et des tous autres immondicités, et la mec- 
tras en ung mortier, et la pille bien ; et quant elle sera treâ bien 
pillée, tu y adjousleras de Taubumen d'un euf, et les broyés et 
incorpore toutensemble dedans le mortier, qui soit fait en manière 
de oigueint, et dicelluy oigueint vous mectrez et emplaslrerez 
dessus les yeulx; mais il faut qu'ilz soient clos et serrez, et 
Templastro dessus esloupes deux fois le jour, c'est assavoir de 
matin et de soir ; et le continuez: car avecques cet emplastre cy 
vous curerez toutes passions au commancement de ladicte 
maladie. 

Et vous dis bien que certainement que ledict oigueint a les vertuz 
et propriétés qui sensuit : tout premièrement, il oste la douleur 
et tumeur des yeulx ; secondement, il colloque et met Tueil en 
son dit lieu; tiercement, il mictigne la douleur et recrée la veue 
et toute la lumière des yeulx. 

111. — De la tierce infirmité dicte ungulk. 

Je dis aussi que à Toccasion des douleurs mélencoliques et 
des humeurs qui y surviennent, ilz se engendre dedans les yeulx 
cestes maladies dictes ungule ou ungle, et encommancent à la 
partie dicte lacrimaleetleur décourent toujiours devers la pupille. 
El quant elles montent jusques à la pupille des yeulx, elles ne 
se départent point jusques à ce quelles aient occuppé toute la 
pupille, et deffendent la lumière de veo.r, et puis après à bien 



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— 69 — 

grande difficulté on les peut curer ainsi comme l'on peusl bien 
faire au commancement avant ce que la pupille soit coverte. 

El aucunefois naist une ungula ou ungle en la partie de la 
grant lacrimale, et se conjoignent ensemble, et occupent tout 
Tueil, et deffende toute la lumière et la veue du paciont. 

Et si dit aussi que toutes les maladies sont curables ainsi comme 
dessus sont dictes, mais touteffols c'est avec grande discrétion 
et habileté de la main quil soit convenablement aperte : cy après 
sonsuit la cure qui est telle : R. acum argenti, et avecques icelle 
aguille tu prandras la ungulam ou ungle, et sublièveras toute 
la tunique. Et ce fait que tu la Iranche toute jusques à lacrlmale 
dont elle a sa naissance. El la tranche bien entièrement, et ce 
fait lu mectras une emplastre de coton qu'il soit baignée en 
glaire d'euf, et la assiez dessus Tueil par l'espace de X jours ; cl 
quant ledit terme sera passé, tu laveras Tueil avec eaue 
chaude, et après vous mectrez au malin et au soir de la pouldre 
nabatis jusques à ce que Tueil soit bien clarifûé. El aussi que ce 
temps durant, que le pacieni se garde de viandes contraires ; et 
vous gardez que vous ne mectez point de médecine dedans Tueil 
autres que celles qui sont devant dites et declairées. 

IV. De LA DESSICACION DES PAUPIÈRES. 

Je dis que aucuneffois le sang^ qui est mélencolique, habonde 
au cerveil et encommance à avoir son cours par les yeulx, et si 
fait disseicher les paupières^ lesquelles dissicacioa fait venir 
douleur et prurion es yeulx pource que le patient n'est pas pur- 
ger^ ne il &e garde point de \ landes contraires, et en a usé au 
commancement de la maladie. 

Parquoy se ainsi est que telz pacient vienne entre vos mains, 
se ilz sont jeunes, faites les soigner de la voyne médienne du front, 
et quant la muncion sera faicte, médecine le pacient avecques 
le coUire rouge dont la forme est telle : R. decem cymas rubri 
teneras * et pista eas sicut sale et cum eis misce ^ II boni vini albi 

1 L'incunable porte : H. z. 1. pampaaos spiui teaerrimos. 



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— 70 — 

et tant diu bouliant in oUa nouva donec vinum reducatur ad 
mediclalem . El puis après tu le colleras, et le malin et soir lu 
en donneras au pacient et meclras en Tueil, et il sera parfaicle- 
ment curer. 

El de telles gens nous en avons plus trouvé à Rome et es par- 
lies d'environ que en nulle autre part là où nous avons fréquenté 
ne pratiquer. Et vous cerliffie que ce collire vault moult à toutes 
escbaudures, et à toutes rugeurs des yeulx et des paupières*. 

V. De LA QUARTE INFIRMITÉ DICTE MALLE HUMEUR 

Je dis aussi que de mélencolie procède pluseurs autres malos^ 
et diverses maladies et inôrmilez. Car aucunes fois il nait, entre 
le psilium et la paupière, une malle humeur qui tourmente la 
paupière et tout Tueil, et semblablemenl la moitié de la face^. Et 
ce sont les signes à quoy Ion cognoist que toute la paupière est 
endurcie et tumoreuse, et le pacient tient lousiours Tueil clos et 
serrer à Toccasion et par le moyen de la douleur, et tellement 
que il ne les peult ouvrir. 

Pourquoy regarde la vraye cure à ce, qui est faicle en ceste 
manière : R. medulam veleris frumenli' vitella ovorum mirra 
et crocum^ii. 3. i. Meslezet incorpores bien toutes ces choses 
ensemble et les pillez en ung mortier, et puis les destrempes et 
moUiffies avecques lait de femme, ei les mevez si longuement 

* Valet etiam mirabiliier hoc coliyrium ad omaem pruritum et super calerac-> 
tionem ia palpebris ; et vocamus eum ooUyrium de spinis, eo quod fit de pampanis 
spiai. 

3 Sed QOQ ofTeaditur oculus : quam iDÛrmitatetn Tusci vocaat humorem bene* 
dictum ; romani vocaot eam oascionem ; ciciliani et grœci papolam ; francigene 
vero et ultramontani vocant eam maledictam. Et isti verum dicuot, eo quod nas- 
citur cum dolore et tumore maximo. 

' Le texte porte : medulam frementi veteris fhimeati. 

Faut-il lire : medulam frumeaii veteris Irumenti (avec uu mot répété deux fols 
par le copiste), farine de lï'omeot vieux ; — ou bien : medulam fôrmenti veteris 
friunenti? Cette demiôre interprétation signifierait amidon, oomme le porte 
d'ailleurs le texte de V Incunable : R. medulam grani frumenti quse est amidum. 



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— 71 — 

jusques que vous en faciez oignement. Mais touteffois gardes bien 
qu'il ne soit trop liquide ne moU Et puis après lu en formeras ton 
emplastre que lu oiectras dessus les paupières. Mais sois pre- 
mièrement bien advisé que tu mectes sur la paupière ung drap 
de lin, et dessus le drap lu mectras ladite emplastre, ne qu'il 
n'entre pas dedans Tueil. 

Et dit ainsi que ce présent emplastre fait trois choses ; premiè- 
rement, que elle unye toutes les humeurs en ung lieu; seconde- 
ment, que elle mandure toute matière; et tiercement, que elle 
aclrait et mictigne la douleur. 

Et avecques ceste emplastre cy nous en avons pluseurs déli- 
vrez de ladicte maladie, et plus règne icelle maladie aux jeunes 
gens quelle ne fait es viez ; et de tels pacieos il y en a plus grande 
quantité et en avons plus trouvé es partie de Tussie que en nulle 
autre part. 

Item, ad ce mesme est moult profBlables une autre emplastre 
dont la forme esl ainsi faicte : R» radicem lilii et poma acerba et 
sub cynere calida coquantur donec moUificentur. Et quant elles 
seront bien cuytes vous les purgerez et nettoyerez très bien, et 
autant de l'un que de l'autre et broyez tout ensemble on ung 
mortier, et puis y adjoustez d'un album d'euf tant qu'il souffise, 
et incorporez bien tout ensemble, et en fait ton oignement. 
Duquel tu emplastreras dessus les paupières, et le explccteras 
ainsi comme dessus est dit en recepte et emplislre précédent, car 
dudit emplastre nous avons fait plusieurs belles cures en notre 
temps à pluseurs personnes et en pluseurs pays et terres : par* 
quoy ayes partout regart au cas dessusdits *. 

* Ici s'arrête le manuscrit de Paris. Ce qui va suivre a été traduit par nous du 
texte de V Incunable. 

Ce texte cootieat, en ouu*e, ce paragraphe par lequel se termine ce qui a trait à 
la malle humeur : 

Supra cicalricem quse remaoet post detumefactiouem poualur de uugueulo isto 
mullum subtili, quod fit ex aloe epalico, pinguediae galiuid, oieo aoiigdalarum 
amarum et cera aiba 11. 3. i. Et fiât ex eis uaguenlum quod subtiliabil et 
coQSolidablt cicatricem taliter quod ouaquam apparebit quod fuerit ibi macula, et 



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— 72 — 

VI. Du RENVERSEMENT DES PAUPIÈRES. 

De nombreux patieols, à la suite de rinQrmilô précédeote, 
viorent nous trouver les paupières renversées. Questionnés pour 
savoir comment cela leur était arrivé, ils nous disaient avoir eu 
rapostbème qui est appelé maie humeur, et n'en avoir pas été 
bien curés. Et pour guérir ce renversement les médecins leur 
demandaient beaucoup d'argent. 

Ayant fait au préalable mes conditions avec eux^ je prenais un 
rasoir, avec lequel je séparais la paupière d'avec le renversement, 
assez subtilement et adroitement pour qu'elle revienne en haut 
à son état antérieur. L'incision faite, je versais dans l'œil jusques 
au jour suivant du blanc d'œuf que je maintenais avec une bande- 
lelte. Je renouvellais le plumasseau chaque jour jusques au XV*. 
Ce temps écoulé^ je modiûais ma cure ainsi qu'il suit: Je com- 
posais un onguent avec de la graisse de poule et de la cire, et 
j'en oignais les paupières au lieu et place du blanc d*œuf : ensuite 
je remettais le plumasseau. Et je faisais ainsi jusqu'à ce que la 
paupière soit raffermie en la bonne position qu'elle gardait ensuite. 
Mais deux fois par semaine, je mettais de l'éponge au lieu du 
plumasseau, pour consumer l'exubérance qui engendre celte 
infirmité. L'éponge marine agit en effet de trois façons : premiè- 
rement, elle consume la cbarnosité cause de l'infirmité; deuxiè- 
mement, elleactrait et vivifie Tesprit et le sang; troisièmement, 
elle raffermit la blessure en sorte qu'il n'en reste plus trace. 

Ainsi nous avons guéri ceux atteints de renversements des pau- 
pières, quelles que fussent les causes ou accidents qui les avaient 

sanabitur inûrmus sine dolore. Et semper habeatis vobiscum de uoguento ala- 
bastro quaudo curalis aliquem ex isUs inQrmilatibus : siat catharaclas, seu emigra- 
ne», seu inûrmitales aliae qucecumque sint. Et uogatis semei videlicel de sero 
omni die tempera, froatem, supercilia^ eo quod multum confert et coadjuvat 
mediciaam omnem, nam dolores mitigat, humores descendere facit ad locum dolo- 
ris, et facit inûrmum die ac nocte quiescere ac si nullam baberet infirmitatem. 



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— 73 — 

eogeDclrés; assavoir : une trop exubérante charnosité, ouïe prurit 
des paupières. 

Chez ceux qui, souffrant d'une trop grande abondance de sang 
aux yeux, restent plus d'une année sans être curés, les paupières 
se renversent, aiïisi que nous Tavons enseigné au quatrième 
chapitre. Notez que chez tels patients, vous ne devez pas faire 
votre incision à Ta^gle extérieur de l'œil, mais qu'il vous faut 
avec le rasoir excise^ toule cette charnosité à l'angle intérieur, 
prenant grand soin de ne point couper le bord de la paupière où 
sont les cils. Cela fait, vous avez des plumasseaux, et pansez 
ainsi que je vous l'ai enseigné pour l'incision de l'angle extérieur, 
changeant le plumasseau deux fois par jour, assavoir soir et 
malin. Et Dieu aidant, votre patient sera ainsi guéri. 

Vous avez ouï les causes, signes, accidents et cures de cette 
infirmité, et notre enseignement est fondé sur l'expérience et 
noire connaissance éprouvée des infirmités des yeux. Vous trai- 
terez donc ces infirmités ainsi que nous venons de vous le dire. 
Et de ces infirmités, nous en avons trouvé en Toscane et à 
Bologne plus que parlout ailleurs. 

VII. — De la meure ou fungus. 

Je vous dirai encore que l'humeur mélancolique peut engen- 
drer entre le nez et l'œil une infirmité consistant en une charno- 
sité:. en beaucoup d'endroits on l'appelle meure ^, d'aucuns la 
nomment cisus et d*autres fungus. 

Quand vous rencontrerez celle infirmité, vous la traiterez de 
la façon qui s'ensuit : Premièrement, avec un rasoir coupez-la 
jusques en ses racines; ensuite avec le fer rouge cautérisez 
l'endroit où était la tumeur, mais assez adroitement et discrète- 
ment pour ne pas léser l'œil. Ayez enfin du coton trempé dans 
du blanc d'œuf que vous appliquez sur l'œil, et le renouveliez 

* Mora ; meure ou mûre. 



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— 74 — 

deux fois par jour jusques au dessècbeaient de l'affeclioa et sa 
cicalrisatioQ complète. 

Nous avons dit les signes, les accidents, la cure de l'inârmité 
dite meure ou fungus^ pour que, quand vous la rencontrerez, 
vous la traitiez par ce moyen qui nous a permis d'en guérir un 
très grand nombre. 

Mais je veux encore vous apprendre à reconnaître cette infirmité 
par les signes suivants ; la meure se montre sous la forme d'une 
substance semblable au poumon ; elle est granuleuse, et d'elle 
découle comme une pourriture ; elle envahit toute la paupière 
supérieure et inférieure. Quand vous voulez la saisir avec le 
crocbet ou avec le rasoir en cette partie où elle prend naissance, 
c'est-à-dire entre le nez et le grand lacrymal, elle ne résiste pas 
et se déchire à cause de la friabilité de sa substance: elle est, 
en effet, friable à cause de sa nature gommeuse ; elle est granu- 
leuse à cause de sa frigidité, car elle tire son origine des humeurs 
froides et corrompues. 

Nous avons achevé le traité des IV humeurs, assavoir: san- 
guine, colérique, flegmatique et mélancolique. Nous vous avons 
enseigné le mode d'apparition dans les yeux des différentes 
affections pour ce qu'elles procèdent des humeurs. Nous vous 
avons montré les causes, signes, accidents et cures selon l'expé- 
rience éclairée et le savoir que nous. Bienvenu Graffe, nous avons 
acquis en celte très prônée science. 

Je vais maintenant traiter des playes des yeux de quelque 
manière qu'elles arrivent. 



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CHAPITRE VIII. 

I e VJII* chapitre traite des infirmités qui adviennent aux yeux 

par percnssion* 

I. — Des plaies des yeux. 

J*ai achevé de traiter des iofirmilés qui advienooDl aux yeux 
pour des causes iolérieures provenant de rabondance ou la cor- 
ruption de quelqu'une des quatre humeurs; nous allons maintenant 
traiter des infirmités qui adviennent aux yeux pour cause exté- 
rieure comme percussion, ou si quelque chose y est entré dedans. 

Et d'abord, je vous dirai que lorsque quelqu'un est frappé 
sur l'œil, d'uo bâton, d'une pierre, du poing, ou d'un roseau, 
comme cela arrive aux enfants jouant par les rues, ou de toute 
autre façoo, vous devez aussitôt remédier avec du blanc d'œuf 
que vous déposerez sur l'œil promptement avant que versent les 
humeurs : assavoir, la vitrée, la cristalline et Talbuginée. La 
grande douleur pourrait, en effet, èlre cause que Tœil s'ouvre et 
que les humeurs soient détruites. 

Et aie grand soin de ne mettre autre médecine en l'œil que le 
blanc d'œuf préparé de la façon qui s'eusuit : agite bien le blanc 
d*œof avec un large stylet en bois en forme de spatule jusques 
à formation d'écume; tu trempes du coton dans ce blanc d'œuf, 
et l'appliques sur l'œil fermé, le renouvellant quatre fois par 
jour et deux fois par nuit jusques au XV* jour. 

Si le cas se présentait où la tunique de l'œil fut détruite ou 
déchirée, vous appliqueriez votre médecine dite vertu donnée de 
Dieu. Elle se compose de germes d'œuf comme je vous Texpli- 
querai tantôt. En même temps, vous appliquez, mais seulement 
sur l'œil fermé, du cotun iaibibé de blanc d'œuf, jusques au 



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— 76 — 

terme déjà indiqué. Mais rappelez- vous d'oindre aussi fréquem^ 
ment les sourcils, le front el les tempes de notre onguent d*ala- 
bastrum, pourcequ'il conforte, vivifie l'esprit, et enlève merveil- 
leusement la douleur. 

Notez que si ces patients ne sont curés de celte manière, dès le 
commencement, avant que rœil ne vienne à se tuméfier ou se pu- 
tréfier, ils ne pourront jamais dans la suite être parfaitement curés. 

Je vais vous exposer là vertu et puissance divine qui est dans 
le blanc d'œuf spécialement contre les percussions de rœil. Le 
blanc d'œuf, dans les yeux blessés, a les trois actions qui s'ensui- 
vent: premièrement, il mitigé la douleur; deuxièmement, il 
constraint les humeurs des yeux et le^ purifie; troisièmement, 
il empêche tout excès des autres humeurs, et toute exilure de 
l'esprit visible. Les anciens l'avaient dignement et à juste titre 
appelé albumen ou glaire, parceque mis dans l'œil il mitigé la 
douleur que produit la percussion par la suavité de sa douceur ; 
et on rappelle suave quand il guérit la douleur. Les anciens 
l'appelèrent aussi clère, parcequ'il clarifie et conforte l'œil. 

II. — Des vertus de la médecine dite vertu donnée de Dieu. 

Vous avez ouï la vertu et puissance de Talbumine d'œuf; 
maintenant je veux vous parler de la vertu d'une aulre médecine 
qui est dite vertu donnée de Dieu, et qui agit quand la tunique des 
yeux est déchirée par quelque cause que ce soit. 

El je vous dis que, quand vous verrez des patienls qui ont eu la 
tunique des yeux déchirée, vous leur porterez secours, avant que 
les humeurs des yeux aient versé, avec cette médecine : Prends 
œufs frais de poule blanche, et en extrais les germes qui soient 
jusques au nombre de XII. Aie ensuite un mortier de métal bien 
lavé, el dépose dans le morlier ces macules d'œuf dites germes ; 
malaxe les bien dans le mortier pour en faire un onguent que tu 
renfermes dans un vase de verre ou dans un vase vitrifié. De 
cet onguent vous mettrez deuA fois par jour dans l'œil, jusqu'à 
ce que la lunique salvalelle soit parfaitement consolidée. 



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— 77 — 

Notez que de même que les onguents consolidants consolident 
et puriSent les plaies, ainsi cette médecioe consolide et purifie les 
tuniques des yeux de souillure et repercussion, et est appelée pour 
ce vertu donnée de Dieu, par la grâce duquel nous avons pu la 
trouver. 

Avec celte médecine nous avons guéri beaucoup de patients 
atteints de percussions aux yeux : entr'autres, à Messine, nous 
trouvâmes un enfant qui avait été frappé de telle sorte que Tœil 
était coupé par le milieu ; par cette ouverture on pouvait aisé- 
ment voir le vitré et les autres humeurs. Il me fut amené par 
son père, et je commençai la cure ainsi que je vous Tai enseigné 
en ce chapitre, en lui appliquant sur l'œil de la vertu donnée de 
Dieu. Ensuite, les paupières closes, je posai par dessus du coton 
trempé dans du blanc d'œuf, et je fis ainsi jusqu'au XV* jour en 
appliquant chaque jour deux fois de la vertu donnée de Dieu, et 
de l'albumine d'œuf trois fois dans le jour, et une fois dans la nuit. 
Par ce moyen l'enfant recouvra l'œil mais non la vue, pource- 
que l'œil était cataracte selon ce que nous avons dit au traité des 
cataractes curables de la première espèce qui surviennent par 
percussion de l'œil. Or, sachez que, en quelque manière que ces 
yeux aient été frappés, il advient cataracte, et après que ces yeux 
auront été curés de la percussion selon noire mode de traitement, 
ils resteront clairs, mais le patient n'y verra jamais. 

N'ayez cependant nulle crainte si ces patients restent sans vue: 
renvoyez-les jusqu'au IV mois. Ce terme arrivé, opérez-les avec 
l'aiguille ainsi que je vous l'ai enseigné au chapitre de la cure 
des cataractes. 

Nous fîmes ainsi avec l'enfant dont nous venons de parler, et 
beaucoup d'autres encore. 

Vous ferez selon ce que je vous ai dil, et n'imiterez pas ces 
fols méges, ignorants en notre art et en la manière de guérir, 
qui, lorsqu'ils ont un œil atteint de percussion, prennent de la 
cire, du cumin pulvérisé, et les incorporent en forme d'emplâtre, 
qu'ils appliquent sur l'œil. 



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— 78 — 

Et si vous voulez savoir quels maux ils causent, je vous dirai 
que si la lunique est déchirée, cet emplâtre actrait toute la sub- 
stance deTœil, et en consume toutes les humeurs parce que la 
cire actrait et consume ; le cumin est un dissolvant et un humec- 
tant à cause de sa chaleur. Donc, ce sont trois actions nuisibles 
parce que en actrayant, consumant et dissolvant, toute la sub- 
stance de l'œil se détruit, en sorte que Tœil reste difforme. Mais 
si la tunique n'est pas déchirée, cet emplâtre attire les humeurs 
par qui sont surtout engendrées les douleurs des yeux, et qui 
sont cause qu'ensuite l'œil est tout entier en sa substance dissous 
et consumé. 

Nous avons renconlré beaucoup de patients qui, à la suite d'une 
percussion, avaient perdu toute la substance de Tœil ; interrogés 
comment ils avaient perdu la vue, ils nous disaient avoir été 
frappés en l'œil, et à la suite de celte percussion être restés avec 
un peu de vision. Mais, dans la suite, ayant été traités par la cire, 
et le cumin, ils avaient, dès cette heure, par l'effet de celte méde- 
cine, perdu complètement la vue, pour ce que, peu à peu, dans 
un larmoiement continuel, avec une douleur vive, toute la sub- 
stance de l'œil était sortie. 

Aussi voulons-UDus vous enseigner que, de quelque façon que 
Tœilsoit frappé, on dedans ou en dehors, vous le curiez toujours 
avec du blanc d'œuf ainsi que nous vous l'avons dit, parce que 
tout semblable est conservé par son semblable ; car Tœil est de 
complexion froide, et pour sa cure demande Oes médecines froi- 
des, aQn que les humeurs des yeux ne se dissolvent point par 
l'effet de la percussion qu'a soufferte l'œil. 

D'aucuns perdirent aussi Tœil à la suite d'application d'emplâ- 
tres d'absynthe et d'encens incorporés à d'autres médecines 
chaudes. 

Vous avez ouï les modes de cure coniraires que font de fols 
mégesen les yeux atteints de percussion; nous vous avonseusei- 
gné notre très experte et éprouvée cure, selon notre expérience 
et science des inQrmités des yeux ; nous vous avons aussi traité 



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— 79 — 

des infirmités qui provieDoeDt de percussion en TcBil ; mainle- 
nanl je vous veux dire comnaent on cure les percussions qui 
atteignent le tour de rœil, assavoir les sourcils, les tempes, ou 
les os contigus à la lacrymale au dehors et en dedans de la pau- 
pière inférieure. 

III. — De la perte de la vue par opillation du nerf 

OPTIQUE. 

El premièrement, je vous dirai de la première percussion qui 
advient sur les sourciis. 

Il arrive qu'un homme soit blessé ou frappé à l'œil en telle 
sor'.e que la paupière supérieure et l'inférieure sont blessées et 
frappées sans que rœil lui-même le soit ; aussi, apparaît- il par- 
faitement clair, et cependant à cause de cette percussion l'œil perd 
la vue. 

Et je dis que cela est par cause de Topillation qui se fait dans 
le nerf optique, parce que l'esprit visible ne peut plus parvenir 
jusqu'à Tœil. 

Cela arrive encore quand la percussion a eu lieu sur la tempe, 
parce que les humeurs des yeux sont conturbées au point que le 
patient ne peut plus voir clair. Et si cela arrive à la paupière 
inférieure, semblublement je dis que le patient n'y voit point 
quoique l'œil apparaisse clair. 

Aussi, vous dirai-je que tous ceux qui sont frappés en cet 
endroit, assavoir autour de l'œil, ainsi que je vous Tai enseigné, 
pour la plupart, n'y voient plus. 

Quand vous voudrez être assurés si tels patients y voient ou 
non, notez si en Tœil la pupille apparaît dilatée et plus grande 
que l'autre : je vous dis que ceux-là n'y voient point. Si les 
patients disent y voir, notez si la pupille s'agrandit et se resserre, 
car, si elle s'agrandit et se resserre, il faut croire qu'ils y voient, 
parce que l'esprit visible venant parle neif concave à son exiture, 
fait resserrer ou dilater la pupille. 



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^ 80 - 

S'il en est ainsi dans quelque œil sain, quoiqu'il apparaisse 
clair et sain, je vous dis de ne faire nulle cure à cet œil, parce 
que le nerf optique est opillé au point que Tesprit visible ne peut 
plus parvenir à l'œil. 

Je veux vous dire de quelles manières s'oppillent les nerfs opti- 
ques : je dis premièrement qu'ils s'opillent par trop grand jeune 
et veille; deuxièmement, par trop grand angoisse et multitude 
de larmes et ombration de la tèle. Â d'autres, l'opillation advient 
par trop grand travail de corps et Tacte vénérien, ou par trop 
lire et écrire. Les yeux s'opillent aussi par mélancolie, et plus 
qu'aux autres chez ceux qui ont été frappés en l'œil. 

Nous avons enseigné les signes delà percussion qui advient en 
dehors de l'œil, assavoir aux paupières, ainsi que les causes pour 
lesquelles les nerfs optiques s'opillent, et comment par suite de 
ladite opillation l'esprit visible ne peut plus parvenir à l'œil. 

IV. — De la fistule lacrymale selon quelques-uns 

ET SELON NOUS DES LARMES CORROMPUES. 

Dans ce chapitre, mon intention est de traiter de certaine autre 
infirmité qui est engendrée quelquefois en Tœil par percussion. 

Je dis donc que quelquefois bien des hommes sont blessés ou 
frappés au front entre les deux sourcils, assavoir à la racine du 
nez. A cause de ce, il se rassemble certaine humeur corrompue 
à l'œil vers la partie lacrymale à côté du nez, en matière de 
larmes, et les médecins ont appelé cette infirmité fistule lacry- 
male. Il en sort comme une eau putréfiée mêlée aux larmes ; 
l'écoulement s'en fait continuel sortant de Tœil du grand lacry- 
mal, aussi les yeux apparaissent toujours larmoyants. 

Quand vous verrez tels yeux larmoyants et voudrez être cer- 
tains si c'est seulement humeur corrompue ou fistule, ou seule- 
ment larmes claires, posez votre doigt index entre le nez et le 
lacrymal» et vous verrez sortir la pourriture dans l'angle lacrymal 
vers le nez. 



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— 81 — 

C'est pour cela que nombre de fols mèges igoorants le lieu 
d'où vient celle pourriture, et croyaot qu'elle sort du milieu du 
lacrymal, près du nez, entre l'une et Taulre paupière, font la 
pire et la plus contraire des cures ; ils prennent un fer rouge et 
perforent le nez par le milieu du lacrymal, entre la paupière 
supérieure et inférieure, et détruisent cet endroit croyant dessé- 
cher le mal avec leur cautère. Et il advient que, pour cette 
application de caulère, nombre de patients ont perdu la vue parce 
que les nerfs optiques cheminent à côté du nez, et sont dessé- 
chés, atteints par la chaleur du feu que porte le cautère. 

Nous vous avons montré les causes, signes, accidents des fis- 
tules des youx ; nous avons dit en quelle erreur tombent de fols 
mèges ignorants notre art et les causes do l'infirmité; pour le 
présent je vous en veux enseigner la cure. 

Je dis que d'abord vous devez curer Testomac avec nos pilules 
lerosolimilanes. Celle purgation faite, incisez avec la pointe du 
rasoir entre la paupière inférieure et le nez, ainsi que vous le 
trouvez désigné, assez discrètement cependant pour ne pas loucher 
la paupière ou la substance de l'œil. Faites donc votre incision 
pi es du nez selon sa longueur, et faites-la petite, et n'incisez que 
la peau. Cela fait, mettez dans la plaie un pois-chiche, ensuite 
par dessus placez un plumasseau de toile de lin que vous fixez 
avec une bandelette de façon que le pois-chiche ne tombe pas 
jusqu'au lendemain. A partir de ce jour, vous mettez dans le 
trou de notre poudre corrosive et mortificative selon que nous 
vous indiquerons à la an de notre livre, laquelle est bonne contre 
les fistules de toutes les parties du corps. 

Quand vous aurez mis la poudre, placez autour de l'œil fermé 
du coton trempé dans du blanc d'œuf de façon que la poudre ne 
puisse entrer dans l'œil. Ensuite avec une bandelette de lin liez 
le tout jusquesau lendemain. Â partir de ce jour, oignez avec de 
la graisse de porc jusqu'à ce que cette chair mortifiée tombe avec 
la poudre, et la blessure reste ouverte. Vous verrez alors le lieu 
d'où la fistule et la pourriture ont leur origine, et alors se dessè- 



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— 82 — 

cfaera celle pourriture qui avait son cours parle lacrymal de l'œil. 
Eosuito prenez de Téponge marine gros comme un pois-cbicbe, 
et meltez-la dans le trou ouvert, par dessus placez do la poudre 
susdite jusqu'à ce que cet endroit soit bien nettoyé et desséché; 
et pour ce, l'éponge marine fait deux choses : elle ouvre et con- 
sume en actrayanl. Elle ouvre pour ce qu'elle se gonfle conti- 
nuellement tandis qu'elle est dans la plaie. Une fois celle-ci 
desséchée, enlevez l'éponge, et, pour le reste, la plaie sera curée 
avec des fils de lin, et sera ainsi consolidée sans autre onguent. 
Le patient sera guéri sans danger comme s'il n'avait jamais eu 
cette inQrmité. Mais n'oubliez pas chaque soir, quand le patient 
ira au lit, de lui donner de notre eloctuaire admirable, gros 
comme une châtaigne, et le malin de même. 

Nous vous avons enseigné la cure très éprouvée de larmes 
corrompues, selon nous, et fistule lacrimale selon d'autres. 

V. — Des larmes et d'où elles procèdent. 

Dans ce chapitre je vous veux traiter des larmes naturelles et 
aussi corrompues, d'où elles prennent naissance, et par où elles 
s'écoulent. Beaucoup croyent que les larmes naissent des yeux, 
et en ce, ils errent. D'autres croyent qu'elles viennent du cerveau 
et sortent par les yeux, et ils se trompent, mais non comme les 
premiers en ce que les larmes descendent bien du cerveau, mais 
n'entrent pas par les yeux. D'autres croyent que les larmes vien- 
nent par le milieu du grand lacrymal, en quoi ils errent. D'autreâ 
croyent que les larmes viennent par le milieu de Toeil au-dessus 
de la paupière et de la pupille. Tous errent en la connaissance de 
la vérité. 

Nous Bienvenu de Jérusalem, à qui le Christ source de toute 
science a donné la vraie expérience et connaissance de toutes les 
infirmités des yeux, de la substance et complexion des bumeurs, 
proclamant chacune d'elle en qui l'esprit visible opère surtout, 
nous disons que les larmes sortent par le point des paupières qui 



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— 83 - 

est à côté du nez. Lequel point est appelé lacrymal. Semblable* 
ment elles sortent de la paupière supérieure comme de l'inférieure, 
et il y a deux pertuis, assavoir un à chaque paupière. 

Si vous voulez vous en assurer et quitter Terreur des anciens, 
renversez les paupières et regardez en le grand lacrymal ainsi que 
je vous Tai dit, à l'extrémité poinlue de la paupière, là où unis- 
sent les cils, vous trouverez un pertuis d'où sortent les larmes. 
Un pertuis semblable existe h la paupière supérieure. De là s'écou- 
lent ces larmes putrides dont nous avons parlé au précédent 
chapitre. 

VI. — De la différence qui existe entre les larmes supé- 
rieures ET inférieures. 

Nous vous avons enseigné d'où les larmes ont leur cours, con- 
formément à noire science et connaissance éprouvée dos infir- 
mités des yeux. Adoncquesje veux vous dire quelle différence il 
y a entre les larmes supérieures et inférieures. 

Et je dis que les larmes qui sortent par la paupière inférieure 
viennent du cœur, quand quelqu'un a grande douleur, et leur flux 
ne dure pas, parce que quand la douleur se mitigé, les larmes 
cessent. 



h/ 



Celles qui viennent de la paupière Merieure procèdent du cer- 
veau, à cause de quelque corruption ou abondance des humeurs. 
Leur flux ng^cessejjue lorsque la matière est bien purgée à Taide ^uJL. C&jUiAd^ 
d'électuaire et de cautaire selon notre art. 

Vous avez ouï d'où procèdent les larmes, leurs causes et exi« 
lure, la différence qu'il y a entre elles ; maintenant je vous veux 
enseigner des différentes autres percussions qui adviennent aux 
yeux. 



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— 84 — 
VII. — De ceux en les yeux desquels entrent écailles de 

PIERRE OU DE FER. 

Il arrive surtout à ceux qui cassent des pierres avec la boue, 
aux meuniers, aux forgerons, et à ceux qui liment le fer, que 
des écailles de fer ou de pierre sont projetées dans leurs yeux, 
et s'enfoncent profondément autour de l'œil, causant une grande 
douleur. 

Et pour ce, les yeux pleurent continuellement, et le patient 
de par la sensation de cette écaille de fer ou de pierre ne peut 
ouvrir les yeux. De ceux-ci nous en avons trouvé beaucoup 
ayant celte écaille encbassée en dessus de la pupille, cbez queU 
ques-uns à côté, chez d'autres entre le blanc et le noir de l'œil. 

Je vous ai enseigné les causes, accidents de cetle infirmité, je 
vais maintenant vous en dire la cure. 

Faites allonger votre patient sur le dos, devant vous, placez sa 
tète entre vos genoux, et qu'il ferme l'œil sain et ouvre celui où 
est Técailie. Ensuite, avec une aiguille d'argent, séparez cette 
écaille blancbe de la tunique de Tœil, assez délicatement pour 
ne pas léser la tunique de l'œil avec l'aiguille. Pour cela, con- 
duisez l'aiguille sur la lunique comme en rasant, ainsi que font 
les barbiers avec leur rasoir. Et parce, vous séparerez l'écaillé 
de la tunique, et si le trou que laisse l'écaillé de fer ou de pierre, 
est assez grand, mettez dessus de la vertu donnée de Dieu, puis 
posez sur l'œil, du coton, trois fois par jour et une fois par nuit. 
Ainsi, en trois jours, sera délivré le patient. 

£t ce arrive plus aux meuniers et forgerons qu'aux autres 
hommes. Et s'ils ne sont pas curés, ainsi que je vous Tai ensei- 
gné, et que cette écaille de fer ou de pierre reste longtemps dans 
Tœil, toute la tunique blanchit et le patient perd la vue. 



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- 8& — 
Vllf. — De l\ m\niêi\e d'extraire les barbes d'épis oui 

ENTRENT DANS LES YEUX. 

Je VOUS veux encore onseigoer semblable cure pour les barbes 
d'épis, qui entrent dans les yeux. 

Et je dis qu'une fois, étant en Toscane dans la ville de Lucques, 
les gens de ce pnys m'amenèrent un patient ayant dans l'œil une 
barbe de grain, qui était entrée pendant qu'il moissonnait le blé; 
et celle barbe s'était mise en travers de l'œil entre l'une et l'autre 
tunique, de façon que ses extrémités n'apparaissent pas sur la 
tunique ; elle semblait comme une élevuro subungulaire entre 
l'ongle et la chair. Ce que voyant, j'incisai un peu en dessus de 
ladite tunique de Tœil, par l'endroit où était entrée la barbe de 
blé, assez dexlrement pour no pas léser la tunique. Ensuite, pre- 
nant deux aiguilles liées ensemble par un fil, en manière do 
tenailles, je passai la pointe d'une aiguille sous la barbe, l'autre 
par dessus; puis, je serrai les deux aiguilles en tordant, en 
manière de tenailles, et serrant avec les doigts jusqu'à ce que 
j'aie extrait la barbe de Tœil. Je pris ensuite do la vertu donnée 
de Dieu, et la mis sur l'œil, comme j'ai déjà dit, deux fois dans 
le jour, une fois dans la nuit, jusqu'à ce que la tunique soit bien 
consolidée. L'œil resta clair et inlact. 

Par ce moyen, nous en avons beaucoup guéris ; et de ces 
patients, en avons plus trouvés en Sicile que partout ailleurs, et 
avons ainsi gagné beaucoup d'argent. Vous ferez de même ; 
mais ayez toujours grand pilié des pauvres, aSn que Dieu vous 
donne la grâce de bien opérer. 

IX. — Des MORSURES en l'oeil par animal vénéneux. 

Parmi les autres cures de notre livre, je vous veux enseigner 
la plus glorieuse et sainte, éprouvée par nous entre toutes. 
 ceux mordus par un animal vénéneux, comme la guêpe ou 

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— 86 — 

Tabeille ou aulres semblables, ou bien par suite de corruption de 
l'air^ l'œil et toute la face se tuméfient, de façon que le patient 
ne peut ouvrir les yeux. Et à beaucoup d'entre eux survient une 
douleur tellement forte, qu'ils n'en peuvent dormir. 

Quand vous verrez quelqu'un de ces patients, secourez-le avec 
cette très sainte herbe que les arabes appellent tutella, les sici- 
liens cardella, ceux de Grèce et de Calabre zucba, ceux d'Apulie 
cardusbenedictus, ceux de Rome et des Âbruzzes et des Marches 
crispigna, ceux de Toscane et de Lombardie curebeda. Voici à 
quels signes vous la reconnaîtrez : elle a les feuilles déliées en 
certains endroits, larges ailleurs; mais les espèces sont d'une 
mémo complexion, ont le même goût et la même vertu et font 
une fleur citrine. 

Prenez de cette herbe une poignée, pilez-la bien dans un mor- 
tier, prenez égale quantité de blanc d'œuf, et mêlez ensemble en 
forme d'emplâtre que vous mettez sur l'œil du patient, sur l'œil 
cependant clos, avec du colon ou de l'étoupe, et vous liez avec 
une bandelette. Vous laissez ainsi tant qu'il vous semble bon, 
assavoir jusques à ce que cela se dessèche sur l'œil. Ensuite vous 
prenez du reste dudit emplâtre et vous en mettez sur l'œil jusques 
à tant qu'il se dégonfle. 

Vous voulez entendre les biens qu'opère cet emplâtre très 
glorieux dans l'œil tuméfié; il dégonfle l'œil, chasse la douleur, 
dissipe le sang, fait disparaître toute superfluité qui pourrait se 
trouver en Tœil, et détruii le venin. Et avec cet emplâtre, nous 
en avons curé innombrables. 

Nous disons semblablement que, lorsque les yeux rougissent 
subitement et fortement, et qu'il parait au patient comme s'il avait 
l'œil plein de toiles d'araignées, il sera délivré en un instant 
par ledit emplâtre, car il est très salutaire et a nombreuses vertus. 

Nous avons terminé le traité des percussions, nous en avons 
décrit les divers accidents, nous en avons enseigné les signes et 
cures selon notre art. 



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CHAPITRE IX. 
Des différentes poudres pour les pains et taches des yeux. 



Maiolenant nous vous enseignerons les différentes poudres 
pour les pains et taches des yeux, et celles choses desquelles vous 
saurez composer une espèce avec l'autre. Selon quoi nous avons 
prouvé et composé chacune comme il convient aux yeux selon 
notre désir et celui du patient. 

I. — Des poudres de pierres précieuses. 

Premièrement nous dirons des poudres qui se font de pierres 
précieuses. 

Nous disons au nom du Christ, prends des perles fines et broyé- 
les dans un mortier d'airain jusques à tant qu'elles soient réduites 
en poudre très subtile, et de cette susdite poudre tu mets dans 
l'œil. Et cela vaut surtout à ceux qui ont un pain très subtil sur 
la pupille comme nuage épars en Tair clair. 

Item. Contre les taches dessus dites: prends du cristal, et 
fais-en une poudre comme ci-dessus est dit. 

Item. Prends de la pierre qui est dite jaspe, fais en poudre 
comme ci-dessus; elle corrode le pain, et repousse le sang si 
Tœil était rouge et sanguinolent. 

Item. Pour ce même : le corail rouge réduit en poudre très 
subtile corrode les nébulosités, repousse le sang si l'œil est 
sanguinolent, et amplifie l'œil. 



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- 88 — 

Ilem. Prends du saphyr, el fais-en poudre très subtile qui cor- 
rode les nébulosités, ouvre le vitré, constraint la pupille, et cla- 
rifie tout Tœil. Et si vous voulez entendre sa vertu, sachez qu'une 
fois qu'elle a été mise dans l*œil, il ne peut plus soufirir aucune 
détérioration . 

Item. Prends de la pierre dite amadina, fais-en une poudre 
que tu mets dans Toeil pour les taches. 

Item. Prends de hyacinthe, saphir, talc, fais-en une poudre 
que tu mets dans Tœil : elle corrode le pain et conforte les 
humeurs des yeux : assavoir le vitré, la cristalline el Talbugi- 
née. 

Nous vous avons enseigné les poudres très précieuses contre 
les pains des yeux qui apparaissent en Tœil comme un nuage 
épars en l'air clair ; elles sont de pierres précieuses. Quand vous 
médicamenterez nobles hommes, vous devez les curer avec telles 
pierres et rendre louanges à Dieu qui vivifie leurs vertus en la 
cure de notre art très prôné des infirmités des yeux. 

Rappelez vous cependant que, en toute poudre semblable, 
vous devez ajouter de la poudre de sucre pour en atténuer la 
violence; car toutes les pierres précieuses réduites en poudres 
sont très violentes; aussi vous devez pour une partie de poudre 
en ajouter deux de sucre. £t la poudre ainsi faite, conservez-la 
dans un vase d'or ou d'argent, el elle sera employée le matin, 
el le soir aussi quand le malade va dormir. 

Et celles ont été éprouvées et expérimentées par nous, et en 
avons curés innombrables . 

II. — Des poudhes de gomme. 

Nous vous avons enseigné des poudres de pierres, pour le pré* 
sent suit des poudres de gomme. 

Nous vous enseignons d'autres poudres pour la même infir- 
mité, pour que vous médicamentiez vos patients, et si vous ne 
le pouvez avec une vous le ferez avec l'autre. 



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— 89 — 

Prends de la gomcne d'olives, et fais-en une poudre, el sem* 
blablement pose-la en l'œil sur le pannicule qui apparaît comme 
nuage épars en Tair clair; elle corrode le nuage et le pannicule, 
et clariâe lœil. 

Pour ce même, prends gopme de fenouil, et fais-en une pou- 
dre : elle corrode le pain, clarifle l'œil, et vivifie l'esprit visible 
comme il est en sa nature, le remet à son état primitif el le rend 
sain. 

Vous avez ouï des remèdes contre le pannicule, les nébulosités, 
contre la rougeur des paupières et leur gravelure ; traitez au 
nom de Christ, qui est notre salut et notre bénédiction '. 

Or ^, il est temps de faire fin de ce présent traîcté ; pourquoy 
je prye à tous les lisans que se ilz treuvent aucune chose qu'il no 
soit bonne, qu'ils me vueillont corrigier ; et se ils trevent bon 
remède, qu'ils vuoillent prier Dieu pour moy en telle manière 
que eulx el moy puissions avoir le royaulme de paradis. 

Explicit le pelil voulum de maislre Bienvenu Graffe, maistre 
en médecine. Deo gracias. 

1 Dans l'iacunable, entre le mot fiais et le nom de Timprimeur, se trouve la 
formule suivante : 

Collige jus XII herbarum scilicet: feniculi, rutse, berbensB, betouicœ, agrimoniad, 
benediclœ, gelamandri©, pimpiaellae, fra^'olae, eufragiee, et salviae. Et permisce 
tereado œqualiter, et infunde la urina pueri virginis adjuogeudo pdulatim, et milte 
in morlario cum granis piperis; et adde mellis attici, alias cocti, duo cochlearia, 
et diu tere ; et niisce cum urina pueri virginis, et tempera ut possis ungere. Quod 
serva in piside nova, et si exsiccabiiur. aide de urina. Hoc enim unguentum mi- 
rabiliter operatur ad omnia vitia oculorum et prœcipue ad albuginem, et omnem 
veterem eorum passionem ; el lumen resliluit. Sic experte credcndum est. 

3 Ces paroles terminaient le manuscrit de Paris ; nous les avons reportées à la 
un de notre édition. 



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Glossaire alphabétique des substances médicamenteuses 
employées par Bienvenu 



Absynthium. — Artemisia abiyntbium. 

Agaricum. — Agaric, champignon qui croît sur le Ironc du larix Euro- 
pœa: il est très conamun dans le levant ; l'espèce la plus estimée 
venait d'Agaria, contrée delà Sarmatie. 

Agrimonia. — Aigremoine, A. Eupatoria. 

Alabostrum. — Alabaslre, albâtre calcaire ou gypseux. 

Aloes EPATiGA. — La partie la plus pure du suc d'aloès, affectant une 
couleur hépatique. (Schroder) Aloes est de medicinis confortan- 
tibus visum (Barnabas de Reggio). 

Amygdal>b dulcbs. — Amandes douces. 

Amygdalarum amarum oleum. — Lait d'amande amëre. 

Anthera. — Extrait d'hyacinle (Ducange); semence qui est dans la rose, 
ou confection faite avec ses fleurs (Pline) . Anthère est ce jaune 
qui est au milieu de la rose (Guy de Ghauliac) . 

Apium. — Ache, apium graveolens . 

Arthimise. — Artemisia, armoise (P. des Composées). 

Balsamum. — Baume, résine qui s'écoule de plusieurs arbres du genre 
Myroxylum et Styrax. 

Basiligon. — Basilic : ocymum B. (Labiées) plante à odeur aromatique. 

Benedigta. — Benoiste, geum urbanum. 

Berbena. — Verbena, verveine. Extrensecus agit ad oculorum lippiludi- 
nes, imbecillitatem, etruborem (Schroder). 

Beryllus. — Béryl : espèce d'émeraude. Les émeraudes, comme géné- 
ralement d'ailleurs les corps de couleur verte, passaient pour avoir 
une action spéciale sur la vue : Smaragdus coutuentium exacuit 
aciem oculorum (Pline). 



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- 92 - 

Bétonica. — Béloine. B. ofiBcinalis. 

Gamphoha. — Camphre, extrait du Laurus campbora. 

Capilli veneris. — Âdiantum capillusveneris: capillaire. 

Cardamonum. — Oardamoine. 0. amomum. 

Cardela.— Bienvenu paraît vouloir désigner sous ce nom le Carduus 
Denediclus, chardon bénit (Cnicus benedictus). 

Carvum, — Carum carve, ombellifère. 

Castoreum. — Testicules du castor séchés à l'ombre (Scbroder) . 

Substance résineuse, brun rougeâtre, d'une odeur forte, sécré- 
tée par des glandes situées sous la peau de l'abdomen du castor. 

Cathapl'cia MiNOR. — Espurge. Euphorbia lalbyris. 

Cere. — Cire. 

OfCORBA. — Chicorée probablement licborium endiva. 

CiTONfORUM GRANA, pro citrouorum grana, grains de citron. 

CoRALUM RUBEUM. — Corail rouge. 

Cristallum. — Cristal de roche. Il se forme naturellement dans les cou- 
ches froides tper congelationem celeslis humoris, parvaeque nivis» 
(Pline). 

Cnocus. — Safran, très employé dans les anciens collyres. Abstergit visum 
et prohibet fluxum ad oculos, valet ad pannum (Avicenne). 

CuBÈBE. — Poivre de cubèbe. Fruit du piper cubeba. 

CuMiNUM. — Cumin. C. cyrainum. 

Oynamomum. — Cinnamome : extrait du laurus cinnam. 

Dicit Serapio quod ususcome8tioniscynamomiconfertobscuri- 
l tati visus, et maxime ejus qui accidit ex bumiditale (Barnabas de 
Y^^Nf^ftjuW- Reggio). 

Ebulus. — Sambucus humilis, hièble. 

EsuLE. — Esula, herbe au lait. Euphorbia esula. 

EuFRAsiE. — Eufragie vel euphrasia, euphrasie. L'E. officinale a été 
plus tard appelée casse-lunettes à cause de la réputation dont elle 
jouissait pour ses vertus ophtalmiques. 

F.ENICULUS. — Fenouil. Docet Joannes Mesue, auctoritate Demorreti, 
quod fœniculus oculum abstergit, visum clariGcat (Barnabas de 
Regio). 

Fragola. — Fragula, trifolium fragiferum, herbe des fraises. 

Galin^ pinguedo. — Graisse de poule .Bienvenu donne la préférence à 
la graisse de poule blanche. 

Gariofilus. — Garofolus, girofle. 

Gelamandria pour germandria, peut-être le teucrium chamœdris, petit 
chône. 



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— 93 - 

Ggmmi vel Gummi. Gomme, Grassus specificie: 

i"^ G. arabicum. Oomme arabique. 

2<» G. serazorum. Gomme de cerisiers. 

3"* G. dragaganle. Gomme adragante. 

4* G. pini. (iomme de pin, résine. 

5^ G. fœniculi. Suc ou extrait de fenouil. 

6" G. Olivarum. Gomme d'olivier? 
Iacynthus. — Hyacynte ; pierre précieuse. 
Jaspis. — Jaspe-agalhe. 

JusQDiAMi SEMEN. — Graines de jusquiame. Hyoscyamus. 
Lactuce. — Laitue. 

Lauri foiia. — Feuilles de laurier (Laurus nobilis). 
LiLif RADix. — Racine de lys: elle est maturative (Guy de Chauliac). 
LiQuiRiTiE succus. — Succus liquiritisB vel riquiliciœ, vel glycyrrhizae: 

suc de réglisse. 
Macis. — Enveloppe ou péricarpe de la nux moschula, noix muscade. 

Myrislica moscala. 
Margarita lapis. — Perle précieuse. Margaritaî visum confortant, nam 

ipsaBConforlanlcor secundum Avicennum (Barnabas de Reggio). 
Masticis. — Masliche ou mastic ; gomme résine du lentisque (Schroder) 

Pisleia lenlicus. Avicenne la recommande contre l'inversion des 

cils. 
MiRRB. — Myrrhe, gomme résine qu'on présume s'écouler d'un arbre du 

genre amyris ou de quelque autre térébinthacé. 
MusTus pro muscus : lichen, mousse. 
Myrabolans citrinus. — Myrabolan, sorte de noix aromatique. Celles 

de couleur citrine étaient plus estimées ; expellunt materias 

fluentes ad oculura (Avicenne) 
Joannes Mesue dicit quo^ myrabolani sunt ex rébus quse fa- 

ciuut utentes se juvenescerc. Item Serapio, auctoritate Alcbindi, 

dicit quod ipsi forlifîcant oculos levés id est débiles, et prohibent 

cursum humorum ad oculos (Barnabas de Reggio). 
Nepitelle. — Nepelella, herbe au chat (Labiée), â-^x ^Y^h ^ 
Nux iNDiGA. — Fruit d'un arbre pa/m«stmi/is (Dioscoride). Coc(jo8nucifera 
Oliban. — Xt^avo;, encens. 
OvuM. — Œuf: Taulbin tire à la froideur, et le moyeu à la chaleur avec 

sédation (Guy de Chauliac). 
Papayer album. — Pavot blanc. 

Petro apiium. — Petroselinum apium, persil de montagne. 
PiMPiNELLA. — Pimprenelle, sanguisorba ofiBcinalis. 



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— 94 — 

PoLiPODiuM QUERCiNUM. — Polypodc dc chônc ; fougère. 
PoMUS. — Pommier. 

Pomorum grana rase : pépins ou grains do pommes écrasées. 

Poma dtilcia^ pommes douces : sunt naturse calidioris. 

Poma acerba^ pommes aigres, sunt nalurae frigidis el astringenlis 
coda sub cinere, poma dulcia sedant oculorum dolorem 
(Schroder). 
PuLLEGiUM. — Pulegium, pouliol espèce de mente. 
Reubarbum. — Rhubarbarum, rhubarbe. 
RoSiE sicCiC. — Pétales de roses desséchées. Rosa et aqua ejus est visus 

confortativa secundum omnem modum administrationis ipsius 

(Barnabas de Reggio) . 
RosARUM OLEUM. — Huile de roses. 
RuBRUs pro RuBus, — Ronce. R. fructicosus. Cymas rubri: feuilles de 

ronces. 
RuTHESEMEN. — Scmcnce de rue. R. graveolens. Serapio dicit quod 

ruta per se à associata acuit visum ; inde solet dici quod ruta 

est herba, qudB lumina reddit acuta (Barnabas de Reggioj. 
Salvia. — Sauge, s. officinalis. 
Sandallum rubeum. — Santalum rubrum, santal rouge (Pterocarpus 

santalious). 
Saphyrus. — Saphyr : habet vim confortativam visus, et sordium oculorum 

sine gravamine purgativam, ut dicitur in Lapidario (Barnabas de 

Reggio). 
Sarcocolla. — Sarcocolle : Lacryma arboris in Perside nascenlis (Pios- 

coride). Prsstat ad oculorum albugines, nubeculas, cicatrices 

(arabici). Colle-chair, résine du Penœa Sarcocolla. 
SiLER MOTANUM. — Ombellifèro, sesseli de Marseille. Valet contra imbe- 

cillitatem visus (Schroder). 
Speragius. — Pro sparagus, asparagus (?) asperge. 
Spicenardi. — Spicanardi. Sp. celticum, lavande. 
HpiNi PAMPiNi TENERRiMi. — Bourgeons tendres d'aubépine. 
Sycouokum LA€. — Sycoraorus est Jactuosa arbor (Theophraste). Acer 

pseudoplatanus. 
Talhc. —Talc. 
Taxi folia. — Feuilles d'If. 
TmiciB ALEXANDRINS. — Tuthia, scu tutia, seu pompholix, seu spodium, 

tuibie blanche. Dépôt blanchâtre qui se dépose à la surface du 

cuivre eo fusion (Sciiroder) . 



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— 95 — 

TuRBiCH. — Turbitb^ racine de turbitb. 

Urina pubri virginis. — L'urina pueri virgiuis, vel loliuna pueri 
iDveBtis était, avec le lac mulieris, le melatticum et Taqua pluvia- 
tilis, les principaux excipients des collyres des anciens. 

Urtica. — Vera marina vel sicciliana : ortie ; uriica romana. 

YB0PIU8. — Hysoppus: bysope. Extriusecus adbibetur crebro ad sigil- 
latione oculoram (Scbroder). 



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Liste des différents médicameAts donnés par Bienvenu. 



Collyre de Illigitaciom ou Hybrosolimitanu^c. Collyre de Bienveou de 

Guy de Clmuliac. 
Collyre Rouge, collyriuin de Spinis. 
Dyaolibanum nostrum ou Electuarium hibrosolimifanum ou Irssi- 

TARIUM. 

Elecluaire merveilleux pour les lermes construiiidre. 

Blectuaire restaurans et bumectalif. 

Emplastre contre la malle humeur. 

Emplaslre de cère et cumin . 

Eoiplaslre de la Tues saincte herbe. 

Médecine Vertu donméb de dieu. 

Oignement de Alabaustrum. 

Pilules CONSOLATORIAB. 

Pilule Hieraclis ou Hierosoli&iitanes pour purger le cerveil. 

Pilules contre la prurilude des yeulx. 

Pilules pour pur^jer le cerveil. 

Pilules pour purgier le chef. 

Pouldre Bénédicte ou alexandrins. 

Pouldre contre le panninum. 

Pouldres de gomme. 

Pouldres de pierres précieuses. 

Pouldre Nabatine. Poudre de Bienvenu, d»5 Guy de Chauliac. 

Syrop pour purger le cerveil. 

Unguentum ceraeet pinguediuis gall. 

Unguentum subtile. 




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LA VERSION PROVENÇALE 



DU 



TRAITÉ D'OCULISTIQUE DE BENVENGUT DE SALERN 



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LA VERSION PROVENÇALE 



DU 



TRAITÉ D'OCULISTIQUE DE BENVENGUT DE SALERN 

Publiée par Henri TBULIË 



MM. Pansier et Lâborde ont dil do Bienvenu et de son œuvre 
tout ce qu'il paraissait possible d'en dire. Je n'ajouterai que 
quelques mois concernant la version provençale. 

Elle fait partie de Tensemble des traités de médecine ou de 
chirurgie contenus dans le manuscrit de Baie, côté D. II, 1 1 , dont 
elle occupe les folios 172-177. L'ouvrage est incomplet. A la an, 
se trouvent des feuillets de parchemin laissés en blanc ou recou- 
verts d'une écriture postérieure qui laissent supposer qu'on avait 
l'intention de le compléter. 

Le texte provençal n'est pas la traduction originale d'un ma- 
nuscrit soit latin, soit hébreu. C'est une copie directe ou indirecte 
de cette traduction. On rencontre, en effets pour un même mot, 
des formes différentes, et cette différence provient de ce que les 
unes sont plus anciennes que les autres ou de ce qu'elles n'appar- 
tiennent pas toutes au même dialecte. C'est sans doute un copiste 
ignorant et distrait qui, après avoir corrigé liueus, écrivait plus 
, loin uous. 

Il Je n'ai pas donné le texte tel quel. Âfln de faciliter la lecture, 
r î*ai ajouté la ponctuation que me paraissait exiger le sens et, dans 



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— 100 — ■ 

le mêin& bïilj j*ai transformé devant une voyelle v en v et i en ;\ 
Par conlre, je n'ai |>as cru devoir uaifur miser Li gcapliîe. 

En 188G, MM, Behger et AuHACHEft avaient déjà donné une 
édiliun diplomatique de ce texte. Grâ^e_à l'extrê me oblif^eance de 
M, le D' Bernoullt, bibliothécaire en chef de rUniversita de 
Baie, j'ai pu collationner de pouveao le manuscrit. Cette revrsioii 
m'a permis de corriger quelques fautes de lecture de mes devan- 
ci ers et de rétablir plusieurs passages împortanU omis par eux. 




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LLAS CURAS 



DE 



LAS ENFERMETATZ ET TOTAS MALAUTIAS DELS UELHS 

Faitas per BENVENGUT DE SALERN.j 



(1) SeDbors,aujatzmedesciaasprov[a]dasetespdrieDcias de las 
curas dels uels e de lolas malautias que podoa venir als uelhs 
failas per me, Beuvengut de Salern(2), las cals yeu ey provadas 
serlanament a femnas es ad homes joves e vielbs. 

[II. Las tunicas e las colors dels uelhs.] 

Develz saber que sel son las luoicas dels uelbs segon mayeslre 
Joban Micbi. 

La primeyra es apelbada Rethina. E la segonda es apelbada 
Segondina. E la lerssa: Escliros. E la quarta: Arania(3). E la 
quinta : Uvea. E la sexta : Comea. E la seplima : Conjunctiva (4). 

(1) F» 172 a. 

(2) L'auteur du Traité d'oculislique n*esl désigné dans le manuscrit provençal 
que sous le nom de Benvengut de Salem, Les autres manuscrits rappellent 
Bienvenu Baffe, Graffé, etc. Des Israélites m'assurent que Baffe provient d*un mot 
liébreu qui signifie médecin. Je serais heureux d'avoir sur ce sijget l'avis d'hé- 
braisants compétents. 

(3) Ou Âraina. 

(4) Ms. Conjutinia, 

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- 102 - 

Ë dilz que quatre son las colors dels uelhs : la prumeyra es 
negra; e la segonda es quais blanca ; e la tersa es vayra; e la 
quarla es quais rossa. 

Ë yeu, Benvengut, die : que non son mais doas tunicas de les 
uelhs que non an negUDa colhor, que yeu o ey esproatb ben. El 
aysso es per amor de la humor, la quai es secca, e per amor de 
la humer crislallina ; quar cant la humor cristallina secca es près 
de Ibas tunicas es apar d'una color ; e quant s'en deve que iotra 
preoot apar d'autra color. 

Don vos die ques aquels ques an la humor preonda de dintre 
aparon los uelhs nègres e veson mielhs que non fan los autres ; 
a cap de trenla (1) ans comenson a pejoyrar. Et aquels que an la 
humoral mielz delsuelhs, aquels voson ben de la puerisciaenlroa 
la vilesa. Et en questz ven una enfermetat als uelhs, que*n appelha 
hom obtalmia, et aquelha cobre los uels als alquns e non pas a totz. 

El aquels ques an las humors près de las tunicas et que son 
los uells vayrs aquels veson ben en la pueriscia e quant son vielhs 
non veson ben. Ë quant an als an los uelhs Iropas tunicas e 
iropas lagremas et an los palpelhs vermels pus quels autres e non 
veson trop ben. 

[III. De lâs humors okls uelhs.] 

Aras vos vuelh dire de las humors dels uelhs. £ die vos, per 
serlh, que son 1res : e la prumeyra es coma album d'uou, et la 
segonda es coma cristalhs, e la terssa es coma colhor de veyre. 

Als uelhs vos die qu*es un nervi forçat que va al servelh, et 
aquel nervi es cavalz, et a en si aquelha coucavitat bumor, quar 
es plena de (2) humor que es parlida en très maneyras : quar la 
uoa maoeyra res^mbla album d'uoui e la segonda maneyra es 
coma gomafresca, la terssa coma lart de porc. 

(1) F» 172 b, ' 

(2) Ils. du 



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- 103 — 



[IV. De las caractas que son en .VII. maneyras.] 

Aras vos velh dire de las eofermetalz dois uels e de las curas, 
E, prumey rament, de las caractas que son eu .VIL maneyras, e 
soD quatre que se (1) podon curar, e 1res que non. 

E la prumeyra es que (2) pot curar es coma caus pura, e aquesla 
ven entorn lo uelb, os am baston, o am vergua, os am lo poinb, 
am peyra, o am vent, os am semblaos causas* 

E la segonda es coma color celestina, e ven del eslomacb per 
manjar malas viandas, e la fumositat monta en la testa. 

E la terssa espessia es blanca coma senres, et aquesta enfer- 
metat ven als uelbs per tropa dolor de testa, coma es emigranea, 
per tropa frejor de testa, o per trop plorar, o per trop velbar, 
o per angozia. 

Ë la qunrta espessia es sitrioa ; es aquesta ven per grant mo- 
vement de motb manjar, e per gran trebalb e ven per bumor e 
per malencolia . 

Aras vos vuelb dire de las autras curas d'aquestas enfermetalz : 
e die vos ques aqueslas espescias non s*en podon ben curar entre 
que sian ben complidas e ben fermadas. Et aquest es lo senbalb 
en que conoyssiras cant ceran ben complidas : que lo malaute no 
pot [vezer] lo lum del solelb si non en lo dia (3), lo lum de la 
candelba si non de nuytz o de sera. 

Don vos fau saber que motz megges son que volon curar aques* 
las eiifermetatz am polveras, o am ayguas, o am colliris, o am 
modecioas laxalivas ; e son ne malvadament eogannalz, car totas 
aqucstas en-(4)-fermetatz son enge[n]ridas de sotas las tunicas, 
e son engenradas de las bumors secas e de la bumor que sembla 

(1) F» 17? c. 
{1) Gorr. e qtiô's. 

(3) Ms. en la via* Cf. le texte latia : Quia ab illa hora et antea parum nichil 
videt nisi claritatem solis in die et lumen luceme in nocte seu per noctem . 
4) Po 172 d. 



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— 104 — 

album d'uou, quar aquelha humor se disol e se poyriga coma 
ayga poyrida e coogelbad e ne met se eolre las tuoicas e la 
bumor cristalliDa. 

Et y eu, Benveogut, vos diray las curas que se devon far, las 
quais yeu per sert vos die que ey esprovadas lonc temps, per la 
gracia de Dieu. Prumeyrameot, vos purguaretz 1q servelb am 
noslras pillulas las quais nos avem faytas et an nom Jerosolimi^ 
tanas.lXecep: 3.1. turbit; aloesespaticum j.V; maslec, cubebas, 
safran. ^ •; e coBs lo'n am suc de rosas, e fassa purgar lo servelb ; 
e que fassa fum de las denaot ditas causas, e rescepia per lo nas 
lo fum, et en Taulre jorn segent lu faras lo pacient sezer de sobre 
.L banc e caulgue sobre lo banc ; e lo mayestre sega devant el, e 
fassa lui teuer los uelbs clauses et am la una man levé la palpelha 
del uelh de sobre, et am Taulra man tenga una agulba d'argent 
e trauque am Tagulba lo uelb de la pari blanqua deves Taurelba, 
e faras o torssen Taguiba, e quant seras près de la pupilla tu 
resclauras Tuelh am Tagulha e melras la caracla rasclan de sota 
Id pupilla de sobre ; e cant tu auras pauzada la caracta en son 
loc, non layses l'agulba lost, mais tem la*n per espasi de calre(l) 
pater nostres disons. Ë pueiS; osla Tagulba, e*l nom Dieu, 
en aquelba manèyra torsen que m la y mesist ; e pueis, tu faras 
aisso am los detz en torsen, e deves lu saber ques am la poneba 
de la dicba agulba tu deves oslar aquelba ayga poyrida, e cant 
auras fayl aysso, ajas de coton mulhatb am clara d'uou, et lu lo 
met de sobre Tuelb del malaule ; e fay lo*n jaser envers eu son 
leyt enlro ajapassalz .IX. dias e garda que-lh nos mude. Ecascun 
dia tu mudaras lo coton doas vegadas en lo jorn, et a la nuit, 
Qn al terme de. IX. jors. En lo loc on dormira sia ben escur; 
el malaute manje de bos bueus en la braza cueilz o en Tayga o 
e sian molbs, e manje pauc blanc. E si es joves beva ayga, e si 
es vielhs beva del vin ben lemprat. Garda que non manje de 
deguna carn, car noiririan trop et engenraria tropa sanc et séria 

(1) ¥o 173 a. 



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— 105 — 

contrasis a la cura. E quant aura complit los sobre dilz .IX. jorns 
levé se el oom Dieu e lave (1) s'en la cara ab ayga fregga e pauc 
a pauc fassa sas faseudas. 

Et eu aquesta maneyra se curon totas los caractas curablas las 
quais son decolor caulsioa, celestina, ciaeresa(2), cilrinaeteD 
autra no s'en devon curar. Ë deves saber que tu non deves meg- 
gar amb agulha de ferr ni de lalon car trop son duras, mais 
argent es bumiis o aur. 

(3) Volelz auzir la diferencia' d'aqueslas caraclas curablas. 
leu vos die ques aquelas que es de color calsina puss lost se cura; 
DQays elha fa pejor visla car ven al uelh per colp E Tautra celes- 
tina si ben es curada pus perfeytament borne ne vetz ed aquesta 
ven per grant abundantia e d'umor secca (4). E la terssa cura, 
qu'es colhor sinerisia, non pot curar Tuelb al prumer eslamen 
tornar si non s*ajuda d*aquesl coUiri o lecluari lo quai a nom 
Jerosolimitan, e que non manje sovéo. Pren : 5 .H. de jeroffle; 
(lo nolz muscada, e de noz d'india e de safra ailant de la un com 
del autre .V. 3 (5): e de bon castor J. 3. Totas aquesta[s] causas 
fay ben polverejar, passar per .1. crebeilador sublilh et am de bon 
melb Gscumalh de tôt eucemps tu faras .1. lectuari. E lo passieot 
prenda d'aguelh lotuari, a maneyra d'una caslanba, lo matin cant 
levara, e quant se colquara. Gardes s'en de cauzas contrariosas 
e fay Icn usar de viandas de bona degestion, caudas es humidas, 
e d'aquelbas que enge[n]ron bon sanc ; garda c'en (6) sempro 
mays do causas freggas e secas (7) e de carn de buou, e de boc 
e de cabra, e de anguilbas, o do als, e boletz, e cebas cruzas ; e 
sempre mai pren e beu vin caut en que aja salvia e ruda ; e 
garde s'en defemna pus que poyra ; e garde s'en de baynh si non 

(1) Ms. lave se lave sen. 
(î) Ms. cinere es. 

(3) F» 173 b. 

(4) Ms. dumors secca, 

(5) Après ce si^ne h'S mois : e polveriza o ont été raturés. 
(G) Ms. ten, 

\l) Ms. scecas. 



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— 106 — 

en una cornuda, es dedins met erbas caudas, so es camamilla et 
erbas flayrans ben ; o non tengua lo cap dedins lo bainh que lo 
fum del ayga li-n iaria mal en los uels. Aras vos avem dicb de 
la terssa. 

Aras vos voli dire* e nom de Dieu, de la quarta ques a color 
cilrina* Et yeu vos die ques es redonda e pus dura que las autras, 
e quant lu la*n tocàras am la agulba de l'argent lu Ia*n deves 
metre de sola ben ; so es de la part del nas deves lo blanc de la 
part de Taurelha lorsen am (1) los delz l'agulha, ayssi com vos 
ay dit de sobre ; es aquestz non cal trop gardar de viandas car 
nos si avem motas vegadas provat empero si li-n coven alcunas 
vegadas de causas conforlalivas per forssa. 



[V. De las .III. CARACTAS QUE NO S'EN PODON CURAR.] 

Aras vo vuelh dire de las caraclas que no s'en podon curar. Et 
yeu ey vos dicb que son très : la prumeyra es blanqua, e los 
megges de Salern la apelhon gota serena . Et aquestz son los sen- 
bals en que las pol hom conoycer. Car la pupilla es clara e negra, 
e dedins en la concavitat dois uelbs apar de color seren. Si non a 
en la pupilla deguna taca e los uels se movon tôt jorn quais tre- 
molon e las palpelbas coma si eran plenas d'argent viu. E nos 
avem ne vist Irops d'aquelha malautia et avem curatz assatz, per 
la grassia de Dieu, e gasanhalz de bos âoris. 

Es aquesla malautia si ven en lo ventre de la mayre per alcuna 
humor corompuda que es dintre,per so aytals bomsnayson sen-(3)- 
sa lum. E nos avem provalh guérir^ curar aquels e mais 
nos non podem negun curar e si aquels donavan tôt Taur del mon, 
non poyrian curar. E son alcus que veson la daretat del jorn 
pauc e van (3) am los uelbs ubertz coma si vesian. Eson alcus que 

(1) Après am on a raturé Vagulha, 

(2) F» 173 d, 

(3) euen, raturé. 



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— 107 — 

veson la ombra del home o d'autra causa. E sod alcus que oo 
vesoQ oient coma si non avian huelhs. E fam vos saber que avem 
d'aqueslz noû vai medecioa car jamays no s'en poyran curar, car 
los nervis son secatz dels uels ; car una humor ven del ce[r]velh 
degotan coma gola d'ayga e fa secar los nervis dels uels. 

Aras vos vuel dire la segonda maneyra ques es quais vertz e 
non se poib curar ; e ven soplament coma l'autra e los ueis son 
ciars e non potdon vezer coma si non avian uelhs. Et aquesta 
es pus mala de las autras et aquesta ven per (1) tropa frejor del 
servelh e per trop plorar dels uelhs e per trop velhar e per trops 
dejunis e per enflament del lest. 

Aras vos vuelh dire la lerssa maneyra que es quant la pupilla 
apar alargada es apar blanca o negra ; es [ajquesta non se pot curar 
am neguna medecina del mont. 



[VI. De las autras enfermetatz que venon als uels.] 

Aras vos vulh dire e nom de Dieu de las autres emfermetatz 

delhs uels diversas que venon o per tropa sanc o per car 

alcunas vegadas lo sanc monta als uels e ven gran ardor e 
son (2) mot vermels et aquelha ardor enerme lesacor(?) en las pal- 
pelbas en tal maneyra que alcunas vegadas no y layssan pelhetb. 
E si aquesta enfermelat non es tost curada fara las palpelhas 
reversegadas ; per so ajudaretz ior en aquesta maneyra a fa y 
colliri jerosolimitan. Recep de tutia alexaodrina S .1. am doas 
liuras de bon vin blanc, e pisa o ben coma sal, e mesclaben, e 
melh tôt en .1. ola nova, e mescla S .1. de rosas seccas, o fay 
toi bolhir al foc suau entre que sia lo vin consumalb a la mie- 
tat ; e pueis colha o tôt per .1. drap de lin, e garda aquel colliri 
per una senmana, e pueis meti lo*n en .1*. ampolba e uncha ne 
los uelhs del malaute io matin el vespre, b dedins una senmana 

(1) Ms. per per, 

(2) FO 174 a. 



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■ ^. <-.--•.- .. ^-iU4llii-J*^, "«f^ 



,r—^r =-5- 



— 108 — 

sera gueritz los malautes. El a nos recorda que pus de mil ma* 
lautes avem gueritz am aquest colliri bon. 

£ fau vos saber que enans que vos metatz d'aquesl colliri als 
uelhs vos los devetz far sancnar de Iha vena del front miggana 
si son joves ; o [si] son vielhs purgalz enans lo servelb am nos- 
Iras pillulas que son contra la malvestal dels uelbs. Âquesla re- 
copia: Receph, aloe epalico, scandali rubey, esuli, reubarbe ana 
j, .V., turbis minoris, catapucia agarici aoa S .1. Fay cofleg am 
suc de arlemisa. E disem vos per serlb que tan solamenl no val 
a la prusor dels uels, ans vos die, que val aquest enguent a la 
prusor del cors e a la rouha forlmeul de qualque bumor que sia. 
Dona pueyssas al malaule(l) segon que sera la malaulia (3) 
e lausa'n Dieus, nostre senbor, et yeu, Benvenguth, quar t'en ey 
amostrat tant gloriosa cura la quai te die per serlb que voz avcm 
proada motas vegadas. 

Eocaras le vuelh mai moslrar d'autras enfermelalz que venon 
per gran abundancia de sanc, et en quai temps ven mais e fa mal 
als ueibs. Don vos dizem qu'es abuodan pus en la fin d'aoslh e 
dura entre septembre. Et aquesla enfermelat ve per trop maujar 
toi (?) frucba diversa que maoja hom pus en aquel temps que en 
autre, e ve atressi per so que om muda d'ayre. E per so, en 
aquel temps ven pus obtalmia que no fa en autre temps, cl aquelh 
panniculi venon trop forlment aïs uelhs en aquel temps, e per so 
ieu vos vuelh dire que enfermelat es obtalmia. 

Obtalmia es una malaulia la quai s'engenra als uelhs per abun- 
dancia de sanc corrumpuda ; lo quai sanc c'engenra de las hu- 
mors caudas e met s'en aquel sanc corrumputh sobre lo blanc del 
uelh e monta als uelhs am gran furor et am gran ardor sobira- 
namenl am gran abundancia de lagremas, e soptameot los uels 
enflon e non romanon aqui ges de pelhs ; e*l malaute non pot 
dormire ni pauzar, et apar li sentir aïs uelbs arena et cspina [e] 
fum. 

(1) Ms. Malautes. 
(î) F» J7i h. 



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— 109 - 

Aras vod velh dire las malautias e las medessinas e las curas 
las (1) cals avem failas e provadas per mot de temps de la 
oblalmia, las quais se podon far ad homes joves et a viels. ^. 
angelot ^ .1.» e sia blanc, e sarcocolli ^ .!., e fay polvera ben en 
.1. mortier de coyre, e pueis met d'aquelha polvera als uelhs ben 
et ajas, pueis d'estopa mulbada en ayga fregga ; e*l malaute estia 
evers los uelhs clauses e, faita una ora, lo pacient si veyra mera- 
velhas, car el se repauzara ben e dormira ; e nos avem gueritdas 
motas gens amb aquesta polvera e gasanhat de bon argent, per 
la gralia de Dieu . 

[VII. De las enfbrmktatz que venon als uelhs per 

AQUESTA OBTALMIA]. 

Encaras vos vuelh ensenhar diversas enfermetatz que venon 
als uelhs per aquesta obtalmia ; quar alcus son megges que volon 
curar e no podon e son fols, car els meton alcunas medescinas 
que fan mai de mal que de ben, e per aquesta mala cura los uels 
tornan grosses e son fora de lor loc natural,et esta mal al malau- 
tes (2) et aquestz uelhs no c'en poyrian curar per lotas las medes- 
cinas del mon quar los uelbs son fora de lors locs nalurals el es 
mortiâcat. 

Encaras vos vulh mol dire es ensenhar de molas emfermetalz 
que venon per aquesla malautia ques a nom obtalmia : molz son 
que se trobon als uels et an los fort torbalz et an los clars e belhs 
e non veson res. Et aisso ven per mala garda, car els manjon 
viandas contrariosas quant an lo mal el aquest es lo senhal que 
hom a la mal[a]utia quar toljorn los uelhs lui lagremeggon. 
Et si tu voles guérir (3) d'aquest malh (4) fay aital maneyra : 
prumeyrament purga lo cervelh am las pillulas. ^. polipodii, 

(1) Fo 174 c. 

(2) Ms. vialautes. 

(3) Ms. guérit, 

(4) Fo 174 d. 



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— 110 — 

esuli, tnirabolis cilrioi« reubarbe aoa S. II., e fay coQmeot am 
lait de sucamors, e segon que sera lo malaule donna li de Ihas 
pillulas. £ cant lo cerveib sera purgatz, dona li a manjar malin 
e vespre del nostre lecloari ierosolimitano^ lo quai alrobaras en 
la terssa espessia de las caraclas, e cura las, e pois mete dinlre 
los uels de la polvera del an^^//io( sobre dit fin que sia ben 
gueritz. Aras vos avem complidas las enfermelatz de la obtalmia. 

[VIII. De las enfermetatz dels pans o dels panniculi.] 

Aras vos vuelb dire e nom Dieu, nostre senhor, de las enfer- 
metatz dels pans o dels panniculi que cobron los uelhs coma 
drap de lin subtil. Et engenron se per gran abundancia de sanc, 
et engenron se en motas maneyras : prumeyrament per mala 
garda, segondament per mota dolor de la testa. Don vos die que 
per aquesta gran dolor de la testa, ven una enfermetat en la tes- 
ta que a nom emigranea, que hom a gran dolor al front et als so- 
sobrescils e près de lae aurelbas, e fa batre las venas fort. E per 
aquel batement de las venas los uelhs lagremeggon e se torbon, 
e per so s*engenron als ulhs los panniculi, et apareysson aïs ulhs 
en diversas maneyras. Prumeyrament, se engenron als uelhs 
coma gran de mil de sota las tunicas ; e motz dison que es gota 
pan e ven als uelhs am gran (i) dolor. Lo segon apar sobre 
la tunica ques es a maneyra d'escata faita coma lentilha. Lo lors 
apar en la una part del uelh coma ftoc de neu. IjO quart es que 
cobre la pupilla et es blanc e non es nient* 

[IX. Del r PANNicuLO ques es en l'uelh coma gran de milii.] 

Aras vos avem dilb del panniculi en quai maneyra se engenron. 
Aras vos direm, en lo nom de Dieu, de las curas de cascun ; las 
buals nos vos dizem, per sert e per veritat, que nos avem provadas 
por lonc temps. 

(1) ?• 175 a. 



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— 111 - 

E prumeyrament (1) vos vuelh dire de la prumeyra ques e^ en 
Tuelh coma grao de milb. E die vos que (}uaDl vos aureU en 
Tuelh aquelh gran del milb, gardatz vos que neguna medescin i 
non n>etatz dedins lo uelh ni de foras, quar aquesta enfermelalz 
no c'en deu curaram medecinas, am (2) laxativas, ni am polveraSi 
ni am lecloaris, ni am cauleris, car totas aquestas cauzas li'n 
nozon per sert. Mais vos faretz aquesta cura la quai yeu vos 
[die] per sert que ela es gloriosa fort per aquest panniculi ques 
aparon coma gran de milb. Et aquesta es la cura e vos furetz .1. 
onguent lo quai non val tant solament en aquest pannicuii, ans 
per sert val a Iota dolor de cors en qualque part c'om Taja, et 
es onguent pus glorios que nos ajam encaras : vos die que non 
es pretz en el. Recep : «XL. tais (3) de romze, e piza los ben en 
maneyra de salsa, e d'autra part ajas doas liuras de bon vin 
blanc, e met o tôt encemps en una ola nova (4) sobre lo foc, 
e met i .1. plen poinb de ruia et .1111. S. de camamilla de la 
flor, verda o secca, e, si podes, met i del pois d'una peyra 
ques a nom alabauslro mieja liura» de semensa de fenolb 3 .V. , 
d'oli rosath. 1'. liura, de sera ^ .II. Totas aquestas cauzas, piza 
enans que tu las metas al vin, exceptât las Hors de la camamilba, 
se i (5) era, e fay o tôt bolhir al foc suau tant entre que 1 vi sia 
consumatz, que apareraque la ola vue Iha rompre, E pueis ajas 
.VI. albums d'uous, e mescla los ben am totas aquelhas causas 
fin que sian ben encorporatz e mesclalz amb aquelhas causas, e 
puis ajatz .1. drap de lin, e colbatz toi aisso^e gardatz pueis aquel 
onguent: e d'aquest onguent unchalz las templas e-l frontal 
malaute. Âmb aquest onguent vos guerirelz aquel panniculi que 
es coma gran de milb . 

(1) Ms. prtimeyramey rament. 

(2) Ms. am. 

(3) Les trois roots tais de romze sont en surdiarge d'une encre et d'une écriture 
diiïérentes du reste du manuscrit. On a raturé à la suite do ces mots : pus vermels 
que poyras trobar, ^ 

(4) F* 175 b. 

(5) Ms. sd. 



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— 112 — 

Ëncaras vos vuelh dire autras vertutz ques a aquest eoguent 
precios car el es aissi pressios que no*n a el mon Degun tant 
pressios que se puesca comparar ad aquest onguent. Car si lu 
t'en unchas am aquest onguent qualque dolor que tu ajas al cors, 
al pe, a la testa, o al estomac, o als roinhos, o a la camba ei 
guerilz encootenent. E fau te saber que nos n'avem donat n 
manjar motas vegadas a maneyra de lectoari a las femnas quel 
avian mal ni dolor en la mayre, e per lo sert nos las gueriaoi 
lost. E val encaras a dolor emigranea. et a tota dolor de uelhs 
es a malautia, sol que tu ne unchos lo front e las(l) cilas e las 
templas. 

[X. Del segon panniculo.] 

Aras vos vuel dir, e nom de Jesu Grist, del segon (2) panniculo 
que apar sobre la tnnica del uelh a maneyra d'escama de peis, 
coma es una lentilha. E die vos quo aquest panniculo si, al 
comensament cant el vonc, non es curalz am aquestas curas, 
que yeu te diray, jamais planament no s'en poyra curar ni entey- 
rament : per que se encarna e si torna dur. Et si tu lo*n volias 
curar am croc d'argent, e pueis lo*n osteces am lo razor, non se 
poyria far, que tu non ostcsses atressi las tunicas delh.uelh ; e si 
la tunica era ostada, la lunica del uelh séria destrucba. 

Donc vos [fau] assaber, amix meus e Qls, a totz que cant vos 
voyretz aquest panniculi eniurat e fermât que negun non rece- 
pialz en vostra cura, car per sert nol poyriatz guérir ni aver 
honor e vostra fama no sceria mermada, e per aquo anatz per la 
via de veritat e laissas falssas errors de mais megges e failz obras 
de piatat e Dieus cera am vos e lausatz Ion totz temps, car el vos 
a fayt venir a via de veritat. 

Doncas nos vos volem dire la medecina e la cura d'aquest 
segon panniculi, e die vos, que vos lo curetz al comenssament 

(t) Fo 175 c. 

(2) Après segon le copiste a écrit et raturé manda. 



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— 113 — 

quaol el se comensa ad encarnar sobre la tunica quar caol es 
endurât no i a concel sensa perilh ; e per so enans que sia dura 
tu faras un cauteri lo quai se fay am foc, lira e consuma coma 
nos avem mos-(l)-lral molas vegadas, car lo foc tira molas e 
consuma e disol e non lo layssa encarnar sobre la tunica per so 
car tira e disol e consuma per aquel loc cauteriat ; et aquel panni- 
culi se consuma per lo foc e lo uuelh esclaris [sj'eis e*l fa clar am 
aqueslas medecinas que tu li*n ajudaras. Tu penras quatre pomas 
e métras las sota las senres caudas, e quant ceran cuytas, monda 
las de la escorssa de foras, e pisza bon la subslancia en .1. mortier 
de eram, e met i una clara d'uou, e mescla tant entro que sia 
coma onguent o emplaustre, e met i d'estopa ; e pueis lu met 
dedins lo uelh de polvera de nabet. Fay aisso, met i d'eslopa 
sobre Tuelh claus^ e muda doas vegadas do dias al malin et al 
vespre, e ligua pueis amb una plecha o pausa de drap de lin en 
aquesta maneyra segura aquest segon panniculum. Ë d'aquosla 
gloriosa cura vos faitz gracias a Dieu pus que a mi. 

[XI. Del ters panniculo.1 

Aras vos vuelh dir de la tersa maneyra del panuiculo, e die 
vos que el se cura en aquelha maneyra que fa lo sogon. Empero 
ajustalz i aquesta medescina que val fort contra la blancor del 
uelL, car fa tornar uegra la (unica e gasla la macula blanca. 
Hecep : .IIII.3. de bon ligne aloes, etajas .1*. olanova,etompletz 
la*n de carbos vins, e meletz lo ligne aloes sobre los carbos, e 
pueissas ajas .1. bassi bel e nete cobri la olla en aquesta maneyra 
que lo bassi recopia lot lo fum; e pueis ajas ^. .1. de (2) pois de 
nabet e mescla lo'n am lo fum del bassin ben pislat am .1. pista- 
dor de coyre, e trissa ben entre que sia ben polverizat e mesclat 
am lo fum e, fay aisso, metd'aquesta polvera dedins (3) losuels, 

(1) F<» 175 d. 

(2) FO 176 a. 

(3) Après dedins on a écrit el defora, mais les trois syllabes e defo soat raturées. 



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— 114 — 

e pneis met de sobre lo uelh claus lo emplauslre de las pomas 
ayssi coma es dil de sobre e de Iha polvera atressl mudaras 
aylanlas vegadas ; es aquesta es la cura am la quai motas vegadas 
personas avem curadas. 

Ëûcaras vos vuelh dir las verlutz de la polvera del nabet ; e 
provensals lo apelhan succre candi d' Alissandria : e (1) prumeyra- 
menl molHQca lo pauniculo del uelh; segondament mitiga la dolor 
del uelh ; terssameot gasta e desiruis la rossor el vermelh del 
uelh ; quarlameol coros lo panniculo ; lo sinquen es quar con- 
forta Tuelh ; e lo sel, restreinh las lagremas si son de la humor 
fregga. Ëo aquesta maneyra vos die que a lotas las emfermelatz 
ajuda et en deguna oon nolz. 

[XII. Del quart panniculo.] 

Eacaras vos vuelh dire del quart panoiculo que es caot Tuelh 
apar lot blanc e deguna negror no y apar aqui ni de Iha tunica 
ni de la lulz, don vos fau saber que ven per gran dolor de la testa 
que dechen per mieg e va entom l'uelh, e per aquelha dolor 
venc aquelh blanc al uelh, et apar lo uelh lusent de color de 
lapasse ; e'I passient non pot pus vescr mais que ditz que tôt lo 
mon li apar blanc, e no pot divisar una cauza d'autra(3); e 
los uells li lagremegon lot jorn, e tota la blancor li apar en torn 
la lunica emblanquesida. Aras vos ey dit la cauza els accidens 
d'uquest quart panniculo. 

Aras vos vulh dire las medescinas nostras proadas a totas pro- 
vas proadas a donar. Doncas aquesta es la cura que vos (3) faretz 
en aquesta malautia: vos farelz un cauteri en lo suc delà testa, 
e quant aurelz fait, ajatz .XII. albums d'uou e faitz los ben batre 
en una scudelha amb un fust entro que tornon en escuma, e pueis 
laissatz los pauzar e, faita una ora, ostatz la scuma et ajatz de 

(i) Ms el. 

(2) Fo 176 b, 

(3) Ms. VOS twj. 



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- 115 — 

cotOD e mulalz lo'n eo aquelha dels uous que roman. Ed aquest 
emplaustro vos mudas .X. vegadas e*l joro e .X. a la nuyt entro 
que sia gueritz. 

(iOmptit es de la quarta maoeyra e son causas proadas per nos 
don vos disem per sert que nos ne avem assalz curatz d'aquesla 
enfermetal par gracia de Dieu. El, yeu Benvenguth, vos prec, 
amix meus e filbs cars, que vos autres fassatz segon la mia 
medescina e segon las mias curas provadas, e jamais non poyretz 
errar. Aras vos avem dich de la carta especia del panniculi ; aras 
es(1) tôt complit del pannicnli. 

^XIIL De las autras enfermbtatz que vjenon als uelhs per 

FLECHA.] 

Aras vos vuelh dire de las autras enfermetatz que venon als 
uelhs per flecma, car per ocasion de ûecma motas lagremas 
s'engenron aïs uelhs de las quais lagremas s'en engenron très 
enfermetatz. 

[XIV. De la prumeyra enfermetat la qualu sengbnra 

PER OCASION de FLEGMAI. 

Aras vos vuelh dir la prumey-(2)-ra emfermetal la qualh 
s^engenra per aquestas lagremas, et es trop mala es es contra 
nalura ; don vos disem que per las lagremas atrops que son las 
palpelas tornon molhas, so es las sobiranas, e dedins naysson pels, 
3 fan ponbidura dedins los uelhs, e d'aquelha ponchura los uelhs 
se corompon : e'I malaules non pot obrir los uelhs entro que los 
pelhs ne sian ostatz am poncha de agulha. E fam vos saber que'l 
malaute toroa a pejor estament et el s'apejora entro que los pelhs 
sian natz. Doncas si li fora melbor si non agues traitz los pels. 
Don vous fau saber que aitant quant los pells son arabalz, allant 

(1) Ms. et. 

(2) Fo 176 c. 



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i^1WiifM* i i JW. . J- m -m \ [ \ .^ VW^^mt^^^^^m 



— 116 — 

loroon pus grosses, e per uo c'om ne tratz ne Dayssoo quatre. 
E ponhon los dilz pels los uels coma si eraol pels de porc ; et 
en la ponchura dois pels los uels si torbon e tornon fort vermels 
en aquesta maoeyra que los uels qod pot obrir per la graii pon • 
- chura dels pels desus ditz. E soo trops que*Q perdoo los uels del 
lot per la grau ponchura dels pels. 

Aras vos avem ditas las enfermetatz d'aquesta maneyra de las 
lagremas e de fleuma. Aras vosdirem las curas d'aquesta enfer- 
metat sobre dicha las quais nos avem faytas e provadas per lonc 
tems, per gracia de Dieu. Prenelz doas agulhas que sian ayssi 
longas coma lo det mener, e d*autra part ajas filb, e (1) 
passe per lo trauc de las agulhas, e lia ben las agulhas am lo 
lilh la una après l'autra, e pueis levatzab una man las palpelhas 
de sobre, e prendetz del angelhot e del canton de la palpelba 
am las anguilhas, e liatz, en tal maneyra, la carn am las agulhas 
que puesca claure los uels es obrir, es sian las agulhas ben de 
cascuna part liadas.E layssas las agulhas liadas amb aquelha part 
carn de las palpelhas entre que cajan dels uelhs am la carn os am 
lo cuer. E quant seran casutas, neguna medecina en aquelha 
nafra que auran faitas las agulhas car per se meteis se curara. 
E si lo pannicUiO que s'engenra de dintre los uelhs per occayson 
del movement e delh batement dels pels non sia destruc, megga 
lo'n am la polvera del nabet doas vegadas en lo jorn entre que 
sian los uelhs clars> et amb aquesta cura nos ne avem geritz 
molz malautes e malautas e gasanhatz assatz de bos deniers. Et 
avem ne atrobalz mais de malautes de aquesta malautia en la 
Calabria, que en deguna part, e ven plus a las femnas que non 
fa als homes. 

Aras vos avem ditas las curas de la prumeyra enfermetat que 
ven als uelhs per ocasion de flec-ma e de grant habundancia de 
lagremas. 

(1) Fo 176 d. 



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■ .V4 ^ ]^ ' ^V»-r 



— 117 — 

[XV. De la seconda enfermetat que ven als uelus per plec\ïa] 

Aras vos vuelh dire de la segoada enfermelal que es quaal 
los uelbs aparoQ torbatz e pies (1) de venas, e son pies de petilz 
paoniculi, e-1 pacient non velz clar. Ë nos appelbaai aquesla 
emfermetat panno vitreo^ so es drap de veyre o paano de veiro. 
Aras vos avem dit de la segonda maneyra de la emfermelat. 

Aras vos vuelh dire la cura que hom y deu far an aquesta 
segoada enfermelal que ven per occayson de lagremas. Die vos 
prumeyramenl que quant vos veyrelz los malaules ques an aquesta 
enfermelal segonda ; prumeyramenl, vos li'n fays traire lo cap 
e fdilz lin .!. cauleri redon per lo mal de la testa e perlas templas 
près de las aurolbas, cauleri lonc e del cap redon. Quan vos 
auretz los cauteris, metelz dedins los uelbs de la polvera nostra 
aleœandrina qpe*s fa amb angelbot e sarcocolli, coma es dicb de 
sobre en las caractas, una vegada lo jorn entro que sia guerilz 
ben e una vegada lo mes donalzli'nde lasnostra[s] pillulas iero- 
solimitanas sobra ditas. Et amb aquesta cura vos curatz las 
emfermelalz de las lagremas dels vuelbs las quais venon per 
gran flecma. Mais, quant el anara dormir, manje cascuna nueilz 
del nostre lecloari ques a nom diaolibano \ lo quai alrobaras en 
lo capilol de las caraclas. E d'aquesta emfermetat avem assatz 
alrobal en Toscana et en la marca d'Ancona. 



[XVI. De la terssa enpêrmetat que ven per flecma.] 

Ë la terssa emfermelat es quant lo uelb apar trop carn-(2)- 
os, e si aquelba carnositat es de sobre lo uelb e que sia enduresit 
per .1. an per dos o plus, no'l nos coven a meggar am pillulas 
ni am coUiris quar aproflecba, donc vos li-n farelz [tjrayre la testa 

(1) F* 177 a. 

(2) P» 177 6. 



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— 118 — 

prumeyrameni, e pueissas faylz li-n .1. cauleri coma es dit de 
sobre. Et eo lo segoQ jorn, vos H obretz los uels al malaule am 
voslres delz, e Iota aquelb[a] carnosilat vos subtilmoDt lalbarelz 
en aital maDoyra que non talhes la tuDica, la quai apelbon alcus 
megges conjuDctiva^ et entorn la pupilla e lo blanc de Tuelb vos 
talbares aysi subtilmeus e pauc e pauc eulro ques aquela carno- 
sitat sia de tôt oslada ; e quant aquesla causa aurelz faila, metetz 
dedins lo uelb de ben plen de la polvera alexandrina sensa aulra 
mescla la quai es sobre dila, e pueis ejaz d*estopa mulbada o 
colon, e sia banhalz en s[c]lara d'uou, e mêles de sobre Tuelh 
claus del malaule, e fay aysso per .XV. jorns doas vegadaslodia. 
E complitz los jorns, osla*n lo coton de sobre los uelbs. E pueis 
ajas erba sanclissima/ la quai nos apelham cordelha^ e pisatz lan 
ben, e mesclalz i una glayra d'uou, e melelz lo de sobre Tuelh 
am coton o amb eslopa doas vegadas en lo jorn, elq matin e*! 
vespre, e pueis met i dedins lo uelh de la polvéra sobre dita 
alexaiidrina en lo matin, e de la polvera del nabetk al vespre, e 
garde se de causas contrariosas : so es a-(l)-saber d'angullhas, 
e de cebas, e de legums, e d'erbas veriz, e de carn de buou, e 
de carn de boc, e de cabra, e do tolas autras malas viandas. 

E d'aquesta enfermetlat an mais e Serdenha que en aulra part, 
e nos avem ne assatz gazanhat d'aquesta eufermetat. 

[XYII. De la quarta enfermetat que ven per flecma.] 

Oras vos vuelh dir de la quarla emfermelat que ven per la 
flecma a fa lagremejar los uels. La carta es cant los uels son 
eflallz e lagremeggon, e'I malaules non pot ben obrir los uels per 
la grevesa dels palpelhas ques aparon grevas e pesans, e quant 
vos volretz esser serlz d'aquelfaa eofermelat tenes i assatz las 
palpelhas de sobre am voslres delz e vos venrez de sobre [et 
veirelz] de sobre coma un gras et aquel gras apar quassada e 

(1) F« 177 c. 



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I 



— 119 — 

carDOsa coma gran de milb, et a Dom ronha dels uelbsi'; e die 
vos que quant vos veyretz aquesta enfermetat vos lo'n purgarelz 
en aquesta maneyra, quar ven de flecma falsa. Tu pren : turbis, 
aloe epaticum, reubarbaro 3 .V., e d'autra part ajas de suc de 
ebuli uoa liura, e fay disoivre am aquelhas cauzas sobre dilas e 
laysf^a o eslar enlro al mali, e pueis colalz o, e pueis prenga la 
colbadura, et al segoo dia obrelz los uelbs e reservalz las paU 
pelbas am voslresdetz e lola aquelba carDosital vos li-n curaretz 
am io rasor beo aQlal et talau, e comeusa lo a talhar am lo rasor 
de la part lacremal, so es de! blanc, de ves (1) Taurelha entre 
a Tautra parte tota aquelba grayssa ostatz la-n enleyrament la 
quai esta sota la palpelha de la part carnosa, e quant vos auretz 
levada la carnositat, metez din sobre Tuelb de coton mulhatb en 
clara d*uou e metelz (2) ; 

per canlas vegadas la nafra sera (3). 

Develz saber, senhors, que en tolas las emfermelalz dels uelbs, 
quais que slan ni quais que no, vos devetz aver del enguent 
atabauslro, lo calh vos avem dilb de sobre, que se fay am las 
cimas de las ronze (4) e la peira ques a nom alabauslro, e devetz 
onchar las templas e las silas. 

Quant alcun es ferilz per colp près del uelh et apar lo sanc 
près del uelb, ajas ,1*. teula rossa e fay la-n escalfar al foc ben, e 
pueis met sobre la leula sobre ditha de melh o layssa bolir ben 
pueis e tu ajas de coton mulalb amb aquel melb e met de 
sobre*! colp e cèra guerilz. 

(1) F* 177 d. 

(2) Cinq lignes blanches. 

(3) Quatre lignes blanches. 

(4) (^es cinq mois lascimasdt las ronze sont en surcharge d'une cnrre et d une 
• rriture dilTêrentes, 



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'^^■■•I^ii^i^-^^i^ii"*^-^*: î^-^i-i^jiF*»! «»*•■ 



TABLE DES MATIÈRES 



Introduction 5 

Préface de Bienvenu ». 27 

CHAPITRE I. — La anathomie des yeulx et de ses tuniques. 30 

I. Définition et cognoissance de rueil 30 

II. Des tuniques des yeulx ..,. 30 

CHAPITRE II. — Des humeurs des yeulx 34 

CHAPITRE III. — Des catharactes 36 

I. Des sept espèces de catharactes , 36 

II. De la cure des catharactes 37 

III. La opéracion de la catharacte 38 

IV. De la I* espèce de catharacte 40 

V. De la IP espèce 41 

VI. De la tierce espèce 41 

VII . De la quarte espèce 42 

VIII. De la P espèce incurable 43 

IX. De la IP espèce incurable 44 

X. De la tierce espèce incurable. ." 44 

CHAPITRE IV. — De la passion des yeulx qui procède de la 

COMPLEXION du SANG • . . 4^ 

I. De la pruritude des yeulx 46 

II. De obhtalimie 47 

III. D*une perturbation qui survient aux yeulx pour 

raison de la dicte obtbalimie , 49 

IV. Des pannicules • i .•..••.. . 50 

V. Du premier pannicule ••••,..••« • 51 



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— 122 — 

VI. Du second pannicule 53 

VII . Du tiers pannicule 53 

VIII. Du quart pannicule 55 

CHAPITRE V. — Des maladies des yeulx qui procèdent a 

l'occasion de fleume 4 57 

I. De la P infirmité qui survient pour raison des lermes. 57 
II. De la Ile infirmité 58 

.III. De la Iir. infirmité 59 

IV. De la IV« infirmité 60 

CHAPITRE VI. — De la passion des yeulx faicte pour raison 

DE COLLÈRE 63 

I • De la I« infirmité pour trop grande hahondence de 

l'humeur de collère 63 

II. De la Ile infirmité 64 

CHAPITRE Vil. — Des passions des yeulx qui surviennent 

POUR raison de humeurs mélbncoliques 66 

I. De Topillacion du nerf optique 66 

II. De la II« infirmité qui survient pour raison de 

melencolie 66 

III. De la III« infirmité dite ungule 68 

IV. De la dessicacion des paupières 69 

V. De la IVe infirmité dicte malle humeur 70 

VI . Du renversement des paupières 72 

VII. De la meure ou fungus 73 

CHAPITRE VIII. — Des infirmités qui adviennent aux yeulx 

PAR PERCUSSION 75 

I . Des plaies des yeux 75 

II. Des vertus de la médecine dicte vertu donnée de Dieu. 76 

III. De la perte de la vue par oppilation du nerf optique.. 70 

IV. De la fistule lacrymale selon quelques-uns, et selon 

nous des larmes corrompues 80 

V. Des larmes et d'où elles procèdent 82 

VI. De la difiërence qui existe entre les larmes supé- 

rieures inférieures , 83 



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— 123 — 

VII. De ceux en les yeux desquels entrent des écailles de 

pierre ou de fer 84 

VIII . De la manière d'extraire les barbes d'épis qui rentrent 

dans les jeux 85 

IX. Dos morsures en l'œil par animal vénéneux 85 

CHAPITRE IX. — Des différentes poudres pour les pains et 

TACHES des yeux 87 

I • Des poudres de pierres précieuses • 87 

II. Des poudres de gomme 88 

Liste des différents médicaments donnés par Bienvenu 90 

Glossaire alphabétique des substances médicamenteuses 

employées par Bienvenu 91 

Las ciiras de las enfermetatz et totas malautias dels uelhs 
faitas per Benvengut de Salem. Texte provençal d'après le 

manuscrit de la bibliothèque de Baie (XUV' siècle) 97 

Préface. 99 

II. Las tunicas e las colors dels uelhs 101 

III. De las humors dels uelhs 102 

IV. De las caractas que son en .VIL manejras 103 

V. De las .III. caractas que no s'en podon curar. ...... 106 

VI. De las autras enfermetatz que venon als uelhs 107 

VII. De las enfermetatz que venon als uelhs per aquesta 

obtalmia 109 

VIII. De las enfermetatz dels pans o dels panniculi 110 

IX. Del .1. panniculo qu'es en Tuelh coma gran de milh.. 110 

X« Del segon panniculo 112 

XI. Del ters panniculo 113 

XII. Del quart panniculo 114 

XIII. De las iautras enfermetatz que venon als uelhs per 

âecma 115 

XIV. De la prumeyra enfermetat la qualh s'engenra per 

occasion de âecma 115 

XV • De la segonda enfermetat que ven als uelhs per flectna. 1 17 

XVI. De la terssa enfermetat que ven per flecma »♦. 117 

XVU. De la quarta enfermetat que ven per flecma 118 



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ERRATUM 



Page 9, ligne 23. — Grâce à l'obligeance du Bibliolhécaire de Bâie, le texle 
provençal a été relevé par M. Teulié sur le roaouscril 
lui-môme.' 

Page 3 1 , ligne 29. — Au lieu de ainsi, lisez : ains. 

Page 25, ligue 18.^ Au lieu de réédité en Allemagne, lisez: publié en Allemagne 
pour la première fois par PageU 

Page 48, ligne 15. — Au lieu de anteram album et sarcocolla, il faut lire avec le 
manuscrit de Metz : R. anzarut id est sarcocollam. 



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I. Opération pour guérir la rougeur des yeux 




II. Opération pour arrêter ies larmes 




III. Traitement du pannus 




IV. Blessures de Poeil 

Miniatures tirées d*un manuscrit du XIII« siècle appartenamtti 
Bibliothèque de TEcole de médecine de Montpellier. 



^ditev Google 



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■« • --ï* •'vr* 



i^l ■MM^i. 



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I 




i^nltne auio^ me 

fcrciîmniaae ttuic 
^ttmxe^ ctio iiefô c 
— S\ê niAimmas c^iit i© 

V«t'îne Uni uctifjiir cirÊilci*ii 
, fctiuiutinent! afinnnac» cô 

■=:■ 4 1 que fer Coix H6 ninr' 
mc^ cô aivUniDa itriniw 

^manih4F^b\t; mie niwne 




% 



T'mi ivu neiirnir twci^iienô 
rcni imita cpaa mmcae (x 
loô iicn>5 qtic non an ne 
Uma œ[fco;i que veti oeiJ 
crt^o*«l> Uni. eti avflo eé u 
<intoî îcliil>uniOî.Mini,u 
ce reçût- cun- amo,2 ce ui ini 
niw cumtuindquar canr 
uibnmQzaiOmïnia ihrae6 
yvce mï>a& annoie e^ ^iBar 
^nucoltoa-co imiif fen Kiie 




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mn6ù cuve nn ua inimoî ai 

laissa - 



^ uittmm 'lit»"" ?y°\i^.i 




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